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« La collaboration est l’élément essentiel des communautés Open Source », Thierry Carrez (OpenStack)
Thierry Carrez, vice-président de l'OpenStack Foundation, évoque la nécessité des communautés Open Source à collaborer pour nouer des points d'intégration qui vont dans le sens des utilisateurs. Une stratégie qu'a récemment entamée la fondation.
Alors que s'ouvre le Paris Open Source Summit cette semaine, il est de plus en plus évident que le logiciel libre / open source est désormais partout. Les bénéfices sont multiples. Pour les utilisateurs, la possibilité de regarder sous le capot et d'apporter les modifications nécessaires. Pour les entreprises utilisatrices, un coût maîtrisé, une protection contre les pratiques monopolistiques et le "lock-in", et un levier de recrutement de nouveaux talents. Sur le plan macro-économique, un relai de croissance grâce à une productivité augmentée (plus de collaboration signifie moins de duplication inutile d'effort).
Cette hégémonie de l'Open Source est d'autant plus vraie qu'on descend dans les couches logicielles pour se rapprocher de l'infrastructure et du hardware. Les briques logicielles libres, kernels, hyperviseurs, langages de programmation, services, APIs d'infrastructure programmable ou de déploiement d'applications sont matures, réutilisables, des standards de fait. Elles sont réutilisées, combinées et intégrées dans les piles logicielles de services propriétaires comme Amazon web services, Facebook ou Google. Elles sont souvent invisibles, puisque les entreprises utilisatrices communiquent rarement le détail de leur utilisation, en particulier en France.
L'intégration entre ces briques libres est le nouveau défi de la communauté open source. Les briques existent et sont performantes, mais elles sont souvent développées et testées en isolation par des communautés disjointes. Leur combinaison reste un travail d’intégration complexe que chaque entreprise utilisatrice doit réinventer. Il nous faut conquérir cet espace *entre* les projets open source pour réaliser pleinement les bénéfices du logiciel libre. En ligne de mire, le Edge computing: une infrastructure pleinement ouverte rapprochant la puissance de traitement des données des utilisateurs, relevant les défis de latence apportés par des applications comme la réalité augmentée ou l'Internet des objets.
Un mot d'ordre : intégration
Depuis sa création, la fondation OpenStack s'est attaquée à ce défi de l'intégration, en produisant une pile logicielle permettant de délivrer un service d'infrastructure programmable à l’échelle du datacenter, intégrant de multiples technologies. Mais en se focalisant sur une pile unique adressant un cas d'utilisation spécifique, nous n'allions pas au bout de cette logique d'intégration. C'est pourquoi lors du récent OpenStack Summit à Sydney, la Fondation a annoncé une nouvelle stratégie d'intégration autour des nouveaux enjeux de l'infrastructure ouverte.
Cette stratégie se décline en quatre points: identifier les cas d'utilisation émergents via notre communauté d'utilisateurs, travailer directement avec les communautés open source adjacentes, créer au besoin les pièces logicielles d'intégration manquantes, et tester les solutions pleinement intégrées de bout en bout.
Cette approche nécessite une collaboration accrue entre projets et fondations open source. Il faut que ces communautés disjointes travaillent ensemble: nos projets respectifs sont beaucoup plus complémentaires que compétitifs. Un engagement plus direct des organisations utilisatrices de ces technologies dans leur développement est également nécessaire. Nous avons besoin de leur expérience d'utilisation et d'intégration afin de construire des solutions efficaces et faciles à gérer. Pour accueillir ces contributeurs à temps partiel dans nos projets, il nous faudra sans doute remettre en question un certain nombre de pratiques établies. Et il faudra que ces organisations réalisent qu'elles ont énormément à gagner à s’investir plus directement et publiquement dans les projets open source qu’elles utilisent.
Cette collaboration réinventée est nécessaire si nous voulons relever le défi de l'intégration, construire ce maillon manquant dans la chaîne de l'open source, et rendre le logiciel libre vraiment universel.