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« Le cloud, c'est le sens de l'Histoire », Gérald Karsenti (DG de SAP France)
À VivaTech, le nouveau DG de SAP France a expliqué son ambition et sa vision pour la filiale. Dans la deuxième partie de cet entretien, il aborde la stratégie cloud de SAP et revient sur la clarification de la tarification des accès indirects.
Dans la première partie de cet entretien, Gérald Karsenti abordait son départ surprise d'Oracle et le rôle des startups pour SAP. Dans cette deuxième partie, il explicite sa vision pour la filiale française dans le cloud et les données. Il revient également sur la délicate question des droits d'accès indirects, au cœur de nombreuses discordes, par le passé, avec les clients.
LeMagIT : SAP a de fortes ambitions dans le cloud. Comment allez-vous les concrétiser en France ?
Gérald Karsenti : nous calquons notre stratégie cloud sur nos clients. Quand ils veulent aller sur des clouds publics, nous avons des accords avec AWS, Microsoft et Google. Quand ils veulent aller sur le cloud privé, bien entendu, on les accompagne. Et quand ils nous disent qu'ils ne sont pas prêts à y aller tout de suite, on déploie sur site, chez eux, en attendant le moment où ils le seront. Notre approche est extrêmement flexible.
LeMagIT : vous êtes flexible ; est-ce à dire que vous n'avez pas la volonté de les diriger vers le cloud ?
Gérald Karsenti : si, parce que c'est le sens de l'Histoire. SAP France connait une croissance à 3 chiffres sur le cloud tout en ne négligeant pas notre activité traditionnelle qui croît elle aussi. Ces deux croissances parallèles montrent que notre ouverture d'esprit et notre modèle fonctionnent.
Notre approche est toujours de demander au client de nous expliquer ce qu'il veut faire. Et de nous-mêmes, nous lui proposons de mettre telle partie sur le cloud public, telle autre en cloud privé, et une dernière sur site, le cas échéant.
LeMagIT : récemment, un responsable monde de SuccesFactor regrettait que l'Europe soit à la traîne sur le cloud dans le HCM/SIRH. Quel degré de maturité constatez vous chez les clients français de SAP ?
Gérald Karsenti : mes premiers contacts depuis deux mois montrent qu'ils sont très ouverts sur le cloud. On en discute. Et je n'ai jamais rencontré de société avec une position radicale anti-cloud.
En même temps, ma conviction est que l'intérêt de nos clients est d'aller le plus possible vers le cloud. Le SI de demain est un SI centré sur le service. Dans la paie par exemple, vous allez acheter autant de bulletins de salaire que nécessaire. Et nous, éditeur, nous allons facturer le nombre de bulletins émis avec la possibilité d'augmenter ou de diminuer la voilure à la demande.
Gérald Karsenti, SAP France
Le modèle qui consistait à dire que pour avoir une gestion de sa paie il fallait installer une solution sur un serveur, avec un OS et une base de données, est dépassé. Le modèle de demain ce sont des acteurs IT (dont SAP), avec des datacenters, qui vont fournir des prestations à la demande.
C'est rendre un service au client que de l'aider à aller vers ce modèle. Mais ce serait aussi absurde quand un client a des impératifs particuliers de ne pas s'adapter à lui.
Dans le cloud comme dans la tarification, il ne faut pas être dogmatique. Chez SAP, j'ai découvert une entreprise très agile en interne. Je pense vraiment qu'aujourd'hui nous avons l'offre la plus complète, la plus intégrée, la plus modulaire, la plus flexible et la plus agile. Et le meilleur moyen d'être agile, c'est justement de ne pas être dogmatique.
LeMagIT : vous parlez d'une suite complète de bout en bout, intégrée et modulable (« la Intelligent Enterprise »), ce qui suppose qu'il est aussi possible de choisir d'autres briques que celles de SAP qui communique avec SAP. Où en est-on sur ce point des droits d'accès indirects ? Comment réagissent les clients français aux dernières annonces de SAP ?
Gérald Karsenti : pour la tarification, quand vous êtes dans un environnement indirect, il y a deux possibilités. Soit vous utilisez des systèmes SAP (NDR : Concur, SuccessFactor, Ariba, etc.), et c'est compris dans le prix. Soit vous êtes sur des systèmes tiers (NDR : comme Salesforce).
Gérald Karsenti, SAP France
Autrefois, nous étions sur des notions « d'utilisateurs », ce qui rendait l'équation compliquée avec les systèmes tiers. L'idée est de passer à la notion de « documents ». Cela simplifie beaucoup les choses. Vous allez chercher un document, vous le téléchargez, vous le modifiez : ça ne compte pas. En revanche si vous créez un nouveau document : là oui, ça compte.
Cette nouvelle tarification a deux avantages. Premièrement, on a posé un modèle. Et ce n'est pas rien ! Il y a des concurrents qui n'ont aucun modèle clair. J'ai rencontré le président de l'USF la semaine dernière - d'ailleurs je vais intervenir à la réunion annuelle de l'association fin juin à laquelle il m'a invité. Je ne veux pas trahir ses propos mais je pense que le fond de sa pensée était qu'il était content que nous ayons proposé un modèle.
Deuxième avantage, l'indicateur (le document) est beaucoup plus facile à mesurer.
Mais soyons clairs : il n'y a pas de solution unique. Cela n'existe pas. Donc je vais aller voir le plus de clients, le plus rapidement possible, pour écouter les retours de ceux qui ont besoin d'en discuter. Je vais aussi bientôt rencontrer le Cigref [Club informatique des grandes entreprises françaises], que je connais bien. Sur la tarification comme pour le reste, pour moi, le client doit être au cœur de tout.
LeMagIT : vous en avez discuté avec l'USF, vous allez le faire avec le Cigref. Les accès indirects et les audits de licences sont donc bien des problématiques fortes chez les clients français ?
Gérald Karsenti : déjà je n'aime pas trop le terme "audit". Vous savez, certains clients qui me connaissent déjà m'ont fait venir chez eux pour me parler de ce sujet. Au final, on en a discuté 20 minutes. L'heure et demi suivante on a parlé de tout autre chose.
Tout ça pour dire que l'on est capable de se comprendre. S'il y a des problèmes, on va les régler au cas par cas. On va trouver le bon modèle adapté à chaque client pour bâtir le futur.
LeMagIT : c'est la fin des audits « à l'ancienne » que vous annoncez là ?
Gérald Karsenti : il est normal qu'il y ait des règles pour protéger nos innovations. Un contrat engage mutuellement. Nous nous engageons à livrer les meilleures solutions, que nous ferons évoluer dans le temps. Les clients s'engagent à déployer les logiciels ou à les utiliser en respectant les contrats. Il s'agit juste de ne pas être trop dogmatique.
Gérald Karsenti, SAP France
On ne le dit pas assez, mais les clients sont plutôt volontaires pour travailler en collaboration sur ce sujet. Ils ont besoin de savoir où ils en sont. Aucun d'entre eux n'a envie de se retrouver dans une situation qu'il ne maîtrise pas et qui pourrait, à tout moment, lui créer des soucis.
Mais comme je vous le disais, je n'aime pas ce terme d'audit. Moi je fais tout sauf de l'audit ! Ce n'est pas mon métier. Mon métier c'est de m'assurer que la bonne solution est déployée intelligemment et d'aider mes clients à avoir le meilleur environnement possible. Donc je vais vous dire, même si un client ne déploie pas comme il aurait dû, ma philosophie c'est que quand on se parle, on trouve toujours une solution.