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Florent Raison, Vertiv : « Nous voyons la taille des projets de datacenters augmenter »
Emerson s'est récemment séparé de sa division datacenters, Emerson Network Power, rebaptisée Vertiv, pour la céder au fonds Platinum Equity. Dans un entretien avec LeMagIT, son DG France, Florent Raison, revient sur la société et fait le point sur le marché des datacenters.
À l’occasion d’un entretien avec LeMagIT, Florent Raison, le directeur général de Vertiv (ex-Emerson Network Power) en France est revenu sur la récente décision d’Emerson de se séparer de sa division datacenters, pour la céder à un fonds d’investissement. L’occasion pour le dirigeant de faire le point sur les grandes tendances sur le marché des équipements de datacenter et sur les évolutions qu’observe Vertiv chez ses clients. Florent Raison a aussi répondu aux questions du MagIT sur l’évolution du marché des centres de données et sur le lent décollage des solutions de DCIM.
LeMagIT : Vertiv est né d’une spin-off d’Emerson. Pourquoi un groupe qui jusqu’alors vantait son modèle d’intégration a-t-il cédé cette activité et quels sont aujourd’hui les métiers sur lesquels Vertiv se concentre ?
Florent Raison : Vertiv est le nouveau nom d’Emerson Network Power qui était une division autonome d’Emerson. Elle a été vendue le 1er décembre 2016 à un fonds d’investissement, Platinum equity. Ça date du 1er décembre 2016.
L’objectif de cette opération est de doter Vertiv de tous les atouts qui, dès aujourd’hui et demain, nous permettront d’être plus efficaces sur le marché des datacenters. Nous pensons que nous allons entrer dans un nouveau cycle d’investissements lourds dans les datacenters. Nous avons l’atout d’être adossé à un acteur qui a une certaine puissance financière. Très vite, certains investissements prévus ont été validés et accélérés.
Aujourd’hui, nous pensons être l’une des rares sociétés à pouvoir offrir une solution globale d’infrastructure à nos clients. Nous sommes présents sur le marché de la sécurisation et gestion de l’alimentation électrique avec Liebert, sur le marché de la climatisation de précision et sur le domaine du management et de l’administration des équipements IT (Avocent). Autour de ça, nous sommes aussi présent sur le marché des racks avec Knurr, celui les conteneurs et sur celui des solutions de confinement. Enfin, su dessus de ces couches, nous proposons des solutions DCIM.
LeMagIT : Parmi vos concurrents on trouve des acteurs comme Schneider Electric, mais aussi une multitude d’autres sociétés souvent spécialisées sur un ou plusieurs domaines. Sur le marché, les acteurs des datacenters ont historiquement tendance à découper leurs appels d’offres en lots. Le fait d’être un acteur intégré est-il vraiment une force ?
Florent Raison :Vertiv est l’un des rares acteurs mondiaux à pouvoir offrir une solution globale et nous sommes, de plus, le seul acteur indépendant à disposer de cette capacité. De plus en plus, nous pensons que nos clients vont nous demander des délais très courts de définition de solutions. Pour cela, nous croyons que le fait d’être un acteur global est un atout.
LeMagIT : Le poids des acteurs de la colocation, du cloud, des services providers et des grands hébergeurs va croissant sur le marché de l’infrastructure et des datacenters. Dans l’infrastructure, ces acteurs définissent déjà de plus en plus leurs propres solutions, qu’ils fabriquent ensuite eux-mêmes ou font fabriquer à façon. Voyez-vous une tendance similaire sur le marché des datacenters et celà fait-il évoluer votre métier?
Florent Raison : Nous travaillons avec les Facebook, Microsoft et Amazon ou Equinix en France et avec d’autres grands acteurs que je ne peux malheureusement pas citer. Nous avons récemment identifié des demandes très particulières de leur part. ils attendent de nous des solutions prédéfinies avec leur ingénierie et qui correspondent à un format qui leur est propre.
Pour répondre à ces besoins nous nous appuyons sur une gamme de produits large. Notre ingénierie et notre support technique amont (400 ingénieurs) travaillent et optimisent le Datacener avec nos clients. C’est la partie thermale qui est sans doute la plus complexe aujourd’hui, car il y a des réflexions d’ingénierie importante à avoir. Dans ce contexte, Liebert est très important pour nous.
LeMagIT : Dans les grands datacenters on voit de plus en plus les acteurs avoir recours au free cooling et à des techniques avancées de récupération d’énergie. Cela ne va-t-il pas à l’encontre du développement de vos activités de refroidissement ?
Florent Raison : Nous faisons du free cooling depuis 2011 et nous avons aussi à notre catalogue des solutions de refroidissement adiabatique depuis longtemps. Parmi les gros projets que nous avons menés en 2016, ce sont plutôt ces produits qui ont été installés.
LeMagIT : La taille des projets sur lesquels vous intervenez a-t-elle tendance à grossir ?
2016 a été une année assez extraordinaire en Europe avec des projets particulièrement importants à Amsterdam, en Irlande et en Angleterre.
Ce qui est clair c’est que l’on a des commandes et projets récents où l’on constate que les tailles de projets augmentent. Ce n’est pas aussi gros que les grands datacenters chinois. Mais on voit cette tendance à l’accroissement de la taille des projets en Europe et même en France.
LeMagIT : Parallèlement, on observe l’émergence d’un besoin de datacenters de plus petite taille, pour servir des besoins « d’edge computing » ou pour répondre à des tendances émergentes comme l’IoT. Sur le marché des telcos, la refonte des réseaux rebat aussi les cartes en matière de répartition des équipements et on voit des besoisn pour des petites unités plus proches des utilisateurs finaux.
Florent Raison : Nous constatons aussi qu’il y a un besoin en matière de micro-datacenter et de edge computing. Nous avons développé et nous travaillons sur des produits plus modulaires. Cela permet de répliquer des infrastructures presque à l’infini et cela simplifie aussi la maintenance des équipements. et comme vous nous voyons aussi des changements importants sur le marché des opérateurs télécoms.
LeMagIT : Emerson a été l’un des fervents partisans du DCIM. Pourtant, il semble que ce marché n’ait pas décollé comme prévu et que l’adoption des solutions DCIM soit plus délicate qu’anticipée ?
Florent Raison : Le DCIM est un marché récent, mais nous y avons déjà un nombre important de références. Nous travaillons en France avec des assurances, des grands telcos, des grandes universités. Par rapport à l’ensemble de l’activité globale de Vertiv, ce n’est pas ce qui pèse le plus en termes de revenus. Mais le DCIM est de notre point de vue un outil de gestion primordial, car il permet de superviser toute l’infrastructure technique. Il permet également de faire les analyses capacitaires et offre les éléments de dashboard nécessaires à un client pour suivre le fonctionnement de son datacenter. Nous pensons que le DCIM a aussi un rôle important à jouer dans le cloud et chez les spécialistes de l’hébergement. Les opérateurs de colocation doivent informer les clients de l’état de leurs installations et le DCIM est l’élément qui peut leur permettre de mieux vendre leurs services.