Comment l’Europe perd pied dans la course à l’innovation technologique
A peine neuf des 100 acteurs les plus importants de l’industrie IT ont leur quartier general en Europe, comme le rappelle une étude du cabinet de conseil A.T. Kearney qui montre comment le vieux continent a perdu pied du fait d’importantes pénuries tant en financement qu’en compétences.
A peine neuf des 100 acteurs les plus importants de l’industrie IT ont leur quartier general en Europe, comme le rappelle une étude du cabinet de conseils A.T. Kearney qui montre comment le vieux continent a perdu pied du fait d’importantes pénuries tant en financement qu’en compétences. Baptisée "Rebooting the European High-Tech Industry” l’étude montre qu’un peu plus de 10% des revenus tirés de l’IT par le top 100 sont générés en Europe.
L’Europe a encore perdu l’un de ses acteurs historiques lorsque Microsoft a acquis les divisions produits et services de Nokia, il y a quelques mois, laissant l’Europe sans constructeur de terminaux dans le top 10 mondial.
La croissance des fusions-acquisitions et l’accélération des échanges Etats-Unis Asie signifie désormais que de nombreuses industries IT (AT Kearney recense 9 segments) européennes sont dépendantes de sociétés extérieures en matière de R&D et d’innovation.
Axel Freyberg, co-auteur de l’étude et l’un des spécialistes du cabinet de conseil pour la zone Emea en matière de medias et d’IT insiste sur la fragmentation du marché local, sur les difficultés à trouver des financements d’envergure et enfin sur le niveau des compétences en ingénierie ainsi que sur l’inflexibilité du marché du travail. Selon lui, « un plan stratégique structurant manque, dans lequel l’Europe pourrait miser afin de pousser la croissance du secteur IT. Il faut une politique industrielle afin de soutenir les acteurs existants pour leur permettre de se développer et d’atteindre une taille critique. Les segments les plus prometteurs en Europe se situent dans le B-to-B et quelques leaders émergent à ce niveau sur des segments de niche en dehors du top 100 mondial de l’IT. Quoiqu’il en soit l’Europe n’a que très peu d’acteurs à la taille suffisante pour participer à la consolidation du secteur dans leurs domaines. Et du coup ils se retrouvent vulnérables face aux stratégies d’acteurs plus puissants venant d’autres parties du monde ».
La croissance moyenne en Europe est attendue autour de 2,2% entre 2011 et 2015 ce qui représente moins de la moitié de la croissance prévue en Amérique du Nord (5,2%) ou en Asie (5,4%).
Pour Thomas Kratzert, co-auteur de l’étude et Partner A.T. Kearney, "les sociétés européennes et particulièrement les fournisseurs de services IT, sont plus dépendants de leur marché domestique que leurs homologues américains ou asiatiques, et de fait pourraient perdre de nouvelles parts de marché à cause de cela ».
Plutôt peu encourageant, Thomas Kratzert estime que « les caractéristiques historiques et culturelles de l’Europe rendent impossible la réplication des conditions qui ont permis le succès de l’industrie IT en Amérique ou en Asie. Les structures de l’Europe sont à la fois de une force qui autorise le développement de la concurrence et une faiblesse qui réduit l’obtention de résultats ».
En début d’année le plan Horizon 2020 – visant à favoriser la R&D et l’innovation à travers un programme dote de 80 milliards d’euros – a marqué une première réaction. Mais pour Hervé Collignon, co-auteur de l’étude et Partner A.T. Kearney, « les pouvoirs publics doivent également apporter leur contribution en faisant de la relance de l’industrie IT une Top-priorité. Les agences gouvernementales, les acteurs IT, les syndicats, patronaux et les investisseurs doivent travailler ensemble à un plan d’envergure et de long-terme ».
Adaptation d'un article de Kayleigh Bateman - Computerweekly