Seventyfour - stock.adobe.com

Antonin Hily, un professeur Tournesol dans la cyber…

Antonin Hily est une « gueule ». à l'enthousiasme et aux emportements communicatifs. Sur les réseaux, ses posts bien sentis ont souvent l’art de remettre les choses à leur place. Ça serait oublier qu'il a réussi à garder intacts ses rêves d’enfant.

Tout, dans le physique et la voix d'Antonin, est fort. Lors d’une interview par téléphone, sa voix réussit à couvrir les assauts d’une tempête d’Ouest naissante qui ponctue l’hiver Finistérien. Antonin Hily, 51 ans, garde dans son regard étonné et ses éclats de rire l'enthousiasme du gamin qu’il n’a quelque part jamais cessé d'être. C’est rare – et c’est donc important.

Comme pour beaucoup, rien ne prédestinait Antonin Hily à travailler dans la cybersécurité : « quand j’avais 7-8 ans, mon rêve absolu était de faire en sorte que les gens mangent à leur faim. Ma mère, institutrice, recevait souvent des courriers pour aider à lutter contre la faim dans le monde, et mon rêve, c’était de faire pousser des plantes dans le désert pour éradiquer la faim et la soif dans le monde ». 

Faire pousser des plantes dans le désert, un rêve d’enfant…

Ce rêve pousse le jeune homme à entreprendre des études de biologie moléculaire à Orsay – « maintenant on dit organismes génétiquement modifiés, » précise-t-il en souriant. Embauché par un laboratoire de recherche privé, il trouve vite une cause à défendre : celle des tournesols.

« C’est génial, un tournesol », s’enthousiasme-t-il, « ça capture le soleil, ça fait de l’ombre, ça a de grandes racines, donc ça peut survivre dans un climat très sec. Ça produit de l’huile, et ça nourrit les animaux. J’étais très inspiré par les tournesols », se souvient-il en riant, « et j'essayais de mettre en point une variété capable de pousser dans le désert ».

Ses recherches ne rencontrent que peu d’écho dans le laboratoire où il essaye de convertir son énergie et ses idées en travail intéressant… et rentable. « Peu à peu, j’ai compris que les tournesols qui poussaient dans le désert, ça n’intéressait pas grand monde », explique-t-il. Le jeune chercheur a vite été prié de « s’intéresser aux choses sérieuses ». De quoi rappeler le businessman que rencontre le Petit Prince lors de sa quatrième escale.

Sauf que rentrer dans le rang ne plaît pas du tout à Antonin : « j’ai compris que je ne faisais rien d’utile – selon mes critères. Je commençais à tourner en rond et à m’ennuyer ». Ce qui, chez lui, ne peut pas durer très longtemps...

Antonin Hily se remémore alors ses autres premières amours adolescentes : l'informatique. Le boulimique de connaissances qu'il est depuis l’enfance se met à carburer à toute vitesse en acquérant et développant des connaissances réseau : « c’est l'époque des écoles primaires qui commençaient à être informatisées, des ordinateurs MO5, TO7 », se souvient-il. Toute une époque glorieuse des débuts de l’enseignement informatique. Il devient responsable informatiques des GRETA (GRoupement d’ETAblissements pour la formation continue des Adultes), où il trouve rapidement un nouveau souffle pour alimenter son enthousiasme.  

Aider, donner confiance

Car Antonin n’est pas que curieux : issu d’une famille d'enseignants, il aime non seulement apprendre, mais aussi transmettre. Il passe alors un CAPES (Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré) d’enseignant en informatique, et occupe ses soirées, après des journées bien remplies, à former en informatique des enfants dits « défavorisés » et des adultes, qu’il initie en cours du soir aux joies des premières suites logicielles Windows… 

Une expérience marquante et fondatrice : « j’ai côtoyé des gamins extraordinaires, qui simplement n’avaient pas eu de bol. Ils avaient une soif d’apprendre et de s’en sortir que j’ai rarement vue ailleurs. Les aider, leur redonner confiance en eux, leur remettre le pied à l’étrier pour reprendre un départ dans la vie, c’était une de nos plus grandes fiertés », se rappelle-t-il.

Il garde de cette époque quelques fabuleux souvenirs, de belles rencontres, et une vraie conviction : « il faut savoir donner sa chance à quelqu’un qui n’en a pas eu, et voir chez quelqu’un des capacités, une envie, plutôt qu’un parcours et un CV ».

À l’instinct et à la sensibilité

Un principe qui devient, au fil des années et des expériences, une ligne de vie. Alors qu’il était responsable du SOC de Sopra Steria à Toulouse, Antonin a recruté, pour faire de la recherche en vulnérabilités et de la « threat intelligence » [renseignement sur les menaces informatiques, N.D.L.R.] des historiens, des linguistes… et très peu de profils techniques. Pourquoi ? « Mais parce que, pour pister des failles et entrer sans la tête de cybercriminels, il faut éviter de raisonner sur des chemins et des processus techniques ! »

Une de ses plus grandes fiertés a été de repérer des gens comme Nathalie Granier, Sébastien Durou, Bashar Kabani... et de les intégrer dans le SOC ou dans l’équipe de threat intelligence. Ils étaient tous issus d’univers éloignés de la cybersécurité, mais finalement tellement proches de ses besoins.

« Quand je recrute quelqu’un, je vois qui j’ai en face de moi, ce qui l’anime, le fait vibrer et la plupart du temps, je ne regarde pas le CV. Quand je regarde le CV, c’est que je vois des incohérences, un manque, et c’est en fait mauvais signe », explique-t-il en souriant.

Comment s'étonner qu'avec un tel profil, il rencontre une autre fonceuse instinctive, Audrey Amédro, fondatrice de Sesame IT ? Entre ces deux tempéraments bien marqués, la rencontre aurait pu faire des étincelles. C’est au contraire une alchimie qui contribue, sans aucun doute pour Antonin, au développement de l’entreprise. « J‘y vais à l’instinct et à la sensibilité, pour avancer et construire une histoire », explique Antonin Hily : « c’est comme ça que j’avance, et, sans doute, que je fais avancer ».

Pour approfondir sur Gestion de la sécurité (SIEM, SOAR, SOC)