Salil Parekh, Capgemini : "un millier d'indiens travaillent sur des projets français"
A l’issue de la présentation des résultats trimestriels de Capgemini, et alors que les effectifs indiens de la SSII ont dépassé le nombre de collaborateurs français, Salil Parekh, directeur du secteur financier de la SSII en Inde ainsi que directeur des régions Asie-Pacifique, a accepté de répondre à nos questions. L’occasion de revenir sur la stratégie indienne du prestataire et sur ses ambitions pour le marché domestique du sous-continent.
LeMagIT : C’est en Inde que Capgemini compte désormais le plus de salariés, devant la France. Mais cette transition s'est produite plus tard qu'initialement attendu. Pourquoi ?
Salil Parekh : L’Inde vient effectivement de dépasser la France en terme d’effectifs chez Capgemini. L’accent a été sur l’Inde depuis plusieurs années, comme le montre la croissance régulière des effectifs indiens de Capgemini : 1 934 personnes en 2004 et plus de 20 000 en 2009. Au cours des douze derniers mois, la croissance, pour l’ensemble du groupe – y compris en Inde, donc –, s’est ralentie en raison de la crise. Mais l’amélioration de la situation dans certains domaines nous a permis relancer activement les recrutements dans le pays. Par exemple, nous recrutons pour supporter le lancement de notre nouvelle activité de Business Information Management.
LeMagIT : Actuellement, comment se répartissent les collaborateurs indiens de Capgemini entre projets effectués pour des donneurs d’ordre hexagonaux et projets hors France ?
S.P. : Nous renforçons constamment nos équipes – tant en volume qu’en termes de compétences – à travers toutes les régions selon un modèle organisationnel « One Team ». Nous sommes un groupe résolument multiculturel. La qualité des relations construites avec nos clients par nos équipes sur site, associée à la puissance de nos plateformes offshore, nous confère une position unique sur le marché. La répartition entre ressources onshore et offshore dépend de chaque projet, chaque pays, chaque secteur d’activité. Par exemple, plus de 50 % de nos collaborateurs travaillant sur des projets pour l’Amérique du Nord sont basés en Inde. Mais les projets français n’impliquent qu’environ un millier de collaborateurs indiens alors que nous avons environ 20 000 salariés en France.
LeMagIT : Quelle a été l’évolution de la part de l’Inde dans les contrats de développement et de maintenance logicielle conclus par Capgemini au cours des deux dernières années ?
S.P. : Elle a progressé régulièrement. A ce jour, presque chaque contrat important de développement ou de maintenance logicielle comporte une part indienne significative (sauf pour les administrations publiques où l’offshore, quoiqu’en progression, reste limité). Comme exemples, je peux citer Warner Brothers, Philips, Maxeda, Fosters, Coca-Cola, HSBC.
LeMagIT : Accenture et IBM renforcent également fortement leur présence en Inde. Cette stratégie commence-t-elle à peser sur votre capacité à recruter, voire à polluer le marché avec, par exemple, des faux CV ?
S.P. : Les grandes entreprises IT indiennes, de même que Accenture ou IBM, ont massivement recruté de jeunes diplômés indiens. Mais notre stratégie, cette année, a plutôt consisté à recruter de manière plus ciblée des personnes d’expérience. Cela nous a permis de nous différencier : l’expérience moyenne de nos collaborateurs est supérieure à cinq ans ; ce qui est plus élevé que chez nos concurrents. Nous pensons que, alors qu’il y a toujours une concurrence sévère autour de compétences de niche ou particulièrement recherchées, les ressources indiennes, en termes de compétences, restent suffisamment étendues pour les besoins de Capgemini dans un futur prévisible. Nos processus de recrutement sont très rigoureux et, typiquement, seuls 5 % des candidats que nous rencontrons finissent par nous rejoindre. Cela réduit significativement le risque d’embaucher des personnes inopportunes.
LeMagIT : Récemment, le Nasscom – chambre syndicale du patronat des SSII indiennes – a dénoncé la faible employabilité des jeunes diplômés indiens. Comment percevez-vous la situation ?
S.P. : Comme je viens de l’indiquer, nous avons adopté une stratégie de recrutement très particulière. Et nous en retirons les bénéfices. A l’embauche, les jeunes diplômés suivent un processus de formation de 6 à 8 mois qui les rend productifs. Nous avons un programme très rigoureux d’intégration qui se concentre sur les compétences techniques ainsi que sur la qualité et les processus associés. Y compris sur des domaines de savoir-vivre tels que la culture d’entreprise, le service au client, la communication. A la fin de chaque semaine, des évaluations permettent d’estimer la progression de la recrue. A l’issue de la formation, des mentors assurent la supervision des recrues pour accélérer leur progression opérationnelle.
Les recrues déjà expérimentées font également l’objet d’évaluations périodiques de leurs compétences et sont susceptibles de recevoir des formations nécessaires pour combler d’éventuelles lacunes. Le temps d’investissement dans la formation est un indicateur de la performance pour chaque collaborateur. Et la formation est étroitement associée à la progression de carrière.
LeMagIT : Quels sont objectifs pour les prochains 6 à 12 mois ?
S.P. : Nous avons commencé à nous intéresser au marché domestique indien début 2008. L’Inde constitue sans aucun doute un marché à forte croissance et à fort volume. Et la croissance promet de s’y maintenir pour les 10 à 15 prochaines années. Nous avons déjà 23 clients en Inde auxquels nous apportons des services de conseil IT. Nous voudrions leur proposer des prestations complémentaires, à commencer par de l’externalisation, du développement et de la maintenance applicative. Nous avons donc mis en place une nouvelle division dédiée à la recherche des opportunités sur le marché domestique indien. Cette division commencera par opérer sur une base limitée et devrait donc profiter d’une croissance rapide.
Dans les mois qui viennent, nous allons nous concentrer sur les secteurs public, de la banque et des services financiers, mais également sur les services associés aux environnements SAP et Oracle. Notre expérience internationale en matière de conseil et dans le secteur public constituera un différenciateur clé.