Hervé Couturier, SAP : un Français aux commandes de Netweaver
A l'occasion de l'ouverture à Berlin de la conférence technique européenne de SAP (TechEd), rencontre avec le nouveau patron de la R&D de la plate-forme d'intégration Netweaver et de tout le porte-feuille décisionnel de l'éditeur. Cet ex-Business Objects, désormais à la tête de 5 000 ingénieurs, revient sur l'intégration des deux lignes de produits et expose sa vision de la fusion du décisionnel et du transactionnel.
Responsable de la R&D de Business Objects quand il était encore indépendant, Hervé Couturier vient de voir ses fonctions s'étendre, à la faveur de l'intégration de la société française au sein du groupe SAP. Ce Français, chez BO depuis 2002, hérite non seulement de toute la R&D autour du porte-feuille de produits de BI (dont le datawaherouse BW), mais prend également en charge les développements autour de Netweaver, la plate-forme SOA de l'éditeur allemand, au coeur de toute sa stratégie grand compte. A la tête d'une entité comptant environ 5 000 personnes, Hervé Couturier se retrouve au centre des principaux projets stratégiques de l'éditeur.
Après la fusion entre BO et SAP, le groupe a clarifié ses choix en matière de produits de BI. Mais des questions demeurent concernant la plate-forme : comment vont s'intégrer XI (celle de BO) et Netweaver ?
Hervé Couturier : Le premier axe de rapprochement résidera dans une administration commune. Par exemple, en rapprochant les outils de gestion du cycle de vie - pour passer une application d'une phase de test, à la pré-production, puis à la production -, de gestion des identités et d'attribution des rôles. Nous menons aussi une réflexion autour de la couche BI, notamment autour des workflow, des nouvelles expériences utilisateurs - intégrant par exemple les réseaux sociaux - ou de la couche sémantique. L'objectif est de définir une feuille de route à trois ans, que j'espère pouvoir dévoiler au début de l'année prochaine.
Quels sont les grands principes qui guident la R&D du groupe ?
H.C. : Premier principe : toute l'offre de BO va être optimisée pour SAP. C'est par exemple la philosophie des annonces que nous avons déjà effectuées autour de la recherche - avec l'accès aux fonctions de Netweaver depuis l'interface BO -, de l'intégration de données - avec la possibilité d'alimenter BW depuis l'ETL de BO - ou encore du MDM (Master Data Management, gestion des données maîtres, ndlr). Le corollaire de ces décisions : certaines équipes de R&D venant de Netweaver et de BO, par exemple en matière d'outils analytiques, d'outils de reporting ou de MDM, seront réunies.
Ou en êtes-vous du projet Galaxy, censé améliorer l'ouverture de Netweaver ?
H.C. : Ce moteur de BPM va permettre à nos clients d'étendre la plate-forme au-delà des processus métier livrés par SAP. Il s'agit de capturer et modifier des processus, donc d'aller bien plus loin qu'un simple paramétrage. Cet outil, qui fait partie du programme Composite Environment, est aujourd'hui en bêta test notamment chez Airbus. Il sortira au début de 2009.
En termes de R&D, qu'apporte SAP aux équipes de BO ? Et vice-versa ?
H.C. : SAP amène son expérience de la conception d'infrastructures vitales pour les entreprises. Alors que BO bâtit plutôt des systèmes certes critiques, mais pas vitaux. On va essayer de s'influencer mutuellement, en proposant des extensions plus flexibles tout en conservant la stabilité du coeur. Il s'agit en somme d'apporter la robustesse de l'administration chère à SAP à BO et l'ouverture de BO à Netweaver.
Il y aurait donc une complémentarité. Mais au service de quelle vision ?
H.C. : On va assister à une fusion du transactionnel et de l'analyse. Demain, un rapport deviendra le point d'entrée d'un système opérationnel. Nous sommes les seuls à être capables de combler ce vide entre la stratégie et l'exécution, car Oracle a séparé ces deux visions dans son organisation. Si on parvient à connecter les tableaux de bord au système transactionnel - en allant jusqu'à proposer des actions directement sur les écrans décisionnels -, on aménera un niveau de productivité exceptionnel à nos clients. Aujourd'hui, on ne sait pas encore proposer d'action sur les tableaux de bord et gérer des questions comme la sécurité ou le système de référence. On en est au stade du laboratoire sur ces sujets. Mais je suis pressé : j'espère amener sur le marché les premières concrétisations de cette vision dès le début 2010.
Quels sont les plans en matière d'évolution de la plate-forme BO en dehors de l'environnement Netweaver ?
H.C. : La plate-forme BO est agnostique par rapport aux langages de développement, via un outil dont nous disposons pour nous greffer aux systèmes de nos clients. On va garder cette ouverture pour les entreprises non SAP. J'ajoute que Netweaver, de son côté, devrait aussi être capable d'évoluer en environnement non SAP pour proposer par exemple des outils d'administration.
Depuis quelques années, le décisionnel en Open Source est en plein développement. Considérez-vous cette menace comme sérieuse pour votre activité ?
H.C. : Bien sûr, on va perdre quelques affaires du fait de la maturité grandissante de l'Open Source. Mais la valeur ajoutée de SAP se situe dans sa connaissance des processus métier et de leur caractère critique pour la vie de l'entreprise. Ainsi que dans sa capacité à innover, via la fusion du transactionnel et de l'analyse. Sur tous ces points, je ne pense pas que l'Open Source parvienne à nous rattraper. L'Open Source ne fait que copier la BI d'il y a trois à cinq ans.