Guy Mamou-Mani, Groupe Open : « la régie est en décroissance rapide »
Venu du monde de la distribution informatique, Groupe Open a accompli en quelques années un virage vers les services. D'abord en mettant la main sur Teamlog. Puis, tout récemment, en prenant le contrôle de la SSII nordiste Sylis. Ce qui en fait, avec 4 200 personnes pour 325 millions d'euros par an, un poids moyen dans les SSII en France. Entretien avec le co-président de Groupe Open.
Vous venez de prendre le contrôle de Sylis, une SSII spécialisée dans la régie, alors que cette forme de prestation tend à décroître et que la crise actuelle ne devrait qu'accentuer ce phénomène. N'est-ce pas une stratégie risquée ?
Guy Mamou-Mani : Depuis le virage que nous avons pris en 2004-2005 en acquérant Teamlog, notre volonté était de nous transformer en pure SSII, dotée d'une taille critique suffisante. Une structure ayant les moyens de l'industrialisation de ses offres, avec la mise en place de contrats de service ou d'infogérance complétés par des investissements dans CMMI ou Itil. Cet objectif est aujourd'hui atteint. C'est essentiel car, effectivement, nous sommes dans une phase de transformation rapide de la demande.
Depuis un an déjà, les grands comptes mettent fin à des régies pour passer dans le même temps des appels d'offres importants sur des prestations au forfait. Pour répondre à cette mutation, nous avons lancé l'offre Teamshore il y a 18 mois : elle mélange des prestations de proximité, du nearshore en province et en Espagne et le recours à une structure offshore que nous avons montée en Ukraine. Aujourd'hui, nous avons réorganisé Teamlog autour de pôles de conseil, d'intégration et d'infogérance. Et la régie ne pèse plus que 50 % de l'activité. C'est ce modèle que nous allons appliquer à Sylis.
Si on fait le parallèle avec Steria, qui a lui aussi engagé cette transformation, on voit que la transition est ardue. Rémunération des commerciaux, alignement des méthodes entre les équipes, choix d'outils communs, les chantiers sont multiples...
G.M.M. : C'est vrai. D'ailleurs, comme d'autres SSII, nous avons connu un premier semestre assez moyen. Tout simplement parce que la décroissance des régies est rapide et que la montée en puissance des nouvelles offres est plus progressive. Le timing n'est donc pas facile à gérer. Le marché nous pousse à agir vite.
Sous la houlette de l'autre co-président de Groupe Open, Frédéric Sebag, nous avons entamé la prise de connaissance de Sylis, avec une équipe dédiée assistée d'un cabinet de conseil. Nous en connaîtrons les conclusions mi-décembre. Dans la foulée, nous mettrons sur pied un plan d'action qui devra lui aussi s'appliquer assez rapidement. Nous n'avons de toute façon pas le choix.
Qu'apporte Sylis au groupe que vous constituez ?
G.M.M. : En plus d'une complémentarité géographique et sectorielle (Sylis se positionne plutôt sur l'industrie et la distribution et a une forte implantation dans le Nord de la France, ndlr), cette acquisition nous confère une taille critique. Nous venons de remporter des références que ni Sylis, ni Teamlog n'auraient pu décrocher seuls. Notre problème de taille critique est réglé, au moins à l'horizon 2010. Même si nous envisageons encore quelques rachats pour nous renforcer par exemple dans l'infogérance ou le conseil. Mais pas avant trois à six mois.
Comment avez-vous financé cette stratégie ?
G.M.M. : Nous avions anticipé ce besoin via une levée de fonds de 70 millions d'euros en septembre 2007, dans des conditions qu'on ne pourrait plus imaginer aujourd'hui. Cette dette arrive à échéance entre 2012 et 2014. Ensuite, nous avons vendu Logix, l'entité distribution de Groupe Open, pour 120 millions d'euros, soit environ trois fois les estimations des analystes. En prenant en compte le rachat de Sylis, qui nous a coûté 46 millions, et l'OPA sur les minoritaires de Teamlog, il nous reste encore quelque 70 millions en caisse.
Quelles sont les conséquences de la crise sur votre activité ?
G.M.M. : La situation n'est ni aussi noire que ne veulent le dire ou l'écrire la presse et les analystes, ni aussi optimiste que ne le dit le Syntec Informatique, dont le ton me paraît un peu décalé. Même si je rejoins le syndicat professionnel sur les perspectives chiffrées qu'il a données en début de semaine. On assiste effectivement à une transformation rapide des demandes des clients, à de la négociation sur les tarifs, pas réellement à des arrêts brutaux de projets.
En ce qui concerne Groupe Open, nous prévoyons malgré tout une amélioration de notre résultat opérationnel au second semestre. Avec, d'ici quelques années, l'objectif d'atteindre une marge de 8 %.
La structure que vous avez montée est avant tout le fruit du rapprochement de Teamlog et de Sylis (s'y ajoute le rachat de Hays IT). Sous quelle identité allez-vous opérer à l'avenir ?
G.M.M. : Déjà, sur les marchés, Groupe Open restera le seul véhicule coté. Le titre Sylis étant retiré de la cote dès aujourd'hui et Teamlog avant la fin de l'année. En terme opérationnel, nous opérerons dans un premier temps sous les marques "Sylis - Groupe Open" et "Teamlog - Groupe Open". Nous réfléchissons à un éventuel regroupement sous une marque ombrelle, voire au choix d'un nouveau nom.