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TransfoNum : comment La Redoute prépare le futur de sa relation client

En 2014, La Redoute s’attaque à sa dette technologique sur la relation client. Son ambition : basculer vers des processus standardisés, industrialisés et des conseillers experts des clients et non des outils. La transformation se poursuit avec l’IA générative, la Data et l’avant-vente.

La Redoute a une longue histoire de 180 ans. La création de l’entreprise remonte à 1837. Son parcours depuis n’a pas été un long fleuve tranquille. Le spécialiste de la vente par correspondance a flirté avec la faillite avant de ressusciter et de devenir un acteur incontournable du e-commerce. 2014 constitue une date charnière dans son histoire avec le rachat par ses dirigeants.

Avant de renaître, La Redoute allait devoir achever des transformations profondes, notamment dans le domaine de la relation client. Dans ce secteur, le constat était sans appel, se souvient Jean-Marc Pénélaud, directeur de la Relation Client arrivé en 2014. « Nous avions une très grosse dette technologique. Nous comptions environ une quinzaine d’outils différents pour prendre en charge nos clients dans des conditions acceptables. »

2016 : année du CRM et de l’industrialisation

Pour les conseillers, les opérations s’avéraient complexes. D’autant que les processus en place, « non standardisés et plutôt manuels », ne constituaient pas des facilitateurs. « Les processus étaient plus liés à des outils et à leurs fonctionnalités plutôt [qu’aux] parcours et besoins des clients. »

Il était dès lors indispensable d’industrialiser pour accroître l’efficacité et réduire les délais de traitement des demandes clientèle. Cet environnement technique complexe et hétérogène se traduisait enfin par des conseillers « plus experts des outils que de la relation client. Ce qui posait problème. », souligne le dirigeant de la marque française. Un changement s’imposait « pour remettre le cap vers nos clients ».

Côté infrastructure, les systèmes AS400 étaient « robustes », mais peu « flexibles ». Sur le CRM, les besoins étaient conséquents également. Un appel d’offres était donc lancé en 2016 et remporté par E-Deal – devenu depuis Efficy.

La solution de l’éditeur est toujours en place, mais tend vers l’obsolescence. La Redoute se prépare à une nouvelle étape de modernisation de sa brique CRM.

Son périmètre d’activité et ses besoins ont nettement changé depuis 2016. Avant d’entamer cette nouvelle étape, l’e-commerçant a donc dû transformer en profondeur et sur des axes multiples : outils, humain, organisationnel, etc.

« Cela nécessite une stratégie complète que l’on déroule au fur et à mesure, y compris au gré des opportunités », note Jean-Marc Pénélaud. La refonte des outils occupait une place importante. Au niveau humain, La Redoute a notamment dû se doter d’une base de connaissances.

Les processus ont été formalisés et standardisés, comme le rappel systématique du client après traitement de sa demande. Les parcours aussi ont été retravaillés.

La Redoute prête pour la phase 2 de sa relation client

En 2016, le cahier des charges du CRM comportait un certain nombre d’exigences. Depuis, il s’est largement étoffé. Et ce qui importe aujourd’hui au directeur de la relation client, c’est l’avenir (soit le nouveau cahier des charges correspondant au périmètre actuel). Pour La Redoute, cela signifie une activité client en France et à l’international, et donc un outil multilingue et « capable de s’adapter aux spécificités de chaque pays. On ne peut pas entrer tous les pays dans le même moule. »

La Redoute en 2023, c’est aussi une clientèle B2B avec « des exigences et des processus particuliers », des magasins (une dizaine) dont les vendeurs doivent disposer d’une même donnée, multicanal pour les clients finaux. L’e-commerçant dispose aussi de sa marketplace accueillant plus de 500 vendeurs.

Pour la relation client, cette place de marché représente un « gros sujet » et un défi à relever afin de gérer la communication avec les vendeurs tiers, collecter des données pour le CRM, et permettre à La Redoute « de jouer le rôle de tiers de confiance, de reprendre la main et apporter une solution optimale au client. »

« Bien souvent, on nous livre des Ferrari, mais sans nous aider à les piloter et à les optimiser. [...] Pas la peine d’acheter une Rolls si on l’utilise comme une 2CV. »
Jean-Marc PénélaudDirecteur de la Relation Client, La Redoute

Le prochain CRM devra s’adapter à ce « large périmètre », tout en « étant facile d’intégration », simple d’utilisation et d’accès pour les conseillers, et être évolutif pour embarquer les nouvelles technologies. Sur ce point, Jean-Marc Pénélaud a en ligne de mire l’intelligence artificielle générative, que les e-commerçants commencent à déployer, à l’image de Carrefour et Cdiscount.

Outre les fonctionnalités et bien sûr le prix, le patron de la relation client fait de l’accompagnement par l’éditeur un critère majeur de sélection. « Bien souvent, on nous livre des Ferrari, mais sans nous aider à les piloter et à les optimiser. Je serai particulièrement vigilant sur ce paramètre en ce qui concerne nos prochains choix. Pas la peine d’acheter une Rolls si on l’utilise comme une 2CV. »

La relation client en évolution permanente

Déjà déployé chez La Redoute, Efficy développe d’ailleurs une nouvelle mouture de son progiciel auquel les équipes de La Redoute auront accès.

« Nous sommes satisfaits de notre relation avec Efficy et impatients de voir la nouvelle version afin de vérifier si elle correspond à notre cahier des charges. Si ce n’était pas le cas, nous examinerions les propositions d’autres éditeurs. Ce n’est pas d’actualité. Je pense qu’Efficy a plutôt une longueur d’avance. »

On-premise ou cloud ? Le sujet est d’abord une problématique IT pour Jean-Marc Pénélaud. « Les caractéristiques techniques sont secondaires. L’outil doit être à la disposition des utilisateurs et c’est leur satisfaction qui m’importe », tranche-t-il. Le challenge pour l’éditeur consiste essentiellement « à prouver que sa solution est la meilleure pour répondre à nos enjeux futurs. »

Or ceux-ci ne manquent pas. La relation client à La Redoute est devenue plus « centrale et stratégique », ce qui impliquait de gagner en efficacité et en différenciation. Son périmètre et ses actions évoluent constamment, signale le dirigeant de l’enseigne.

Deux axes sont clés pour améliorer l’efficience et la proximité en tant que différenciateur : des parcours simples et performants (et l’humain, via les conseillers).

Sur les parcours, La Redoute s’ouvre à de nouveaux canaux pour « être là où sont les clients. Nous avons beaucoup développé le messaging par exemple. Nous étions les premiers en France à lancer Business Chat », illustre le directeur relation client. Autre illustration : la possibilité, dans l’application mobile, de contacter directement le service. En octobre, l’enseigne faisait en outre ses débuts sur WhatsApp.

Les interactions s’effectuent également via le self-care et les bots. Jean-Marc Pénélaud concède d’ailleurs un léger retard dans le domaine des chatbots. Il sera bientôt comblé via un contrat avec le fournisseur Inbenta. Début octobre, l’entreprise prévoyait le lancement d’une première version dès novembre. Devait « rapidement » lui succéder une itération dopée à l’IA générative.

Une complémentarité technologies et conseillers

Le volet humain reste « complémentaire » de ces implémentations technologiques, tient à préciser le cadre de La Redoute. L’e-commerçant travaille aussi à l’amélioration de l’expérience conseiller pour développer toujours plus leur expertise client. Ce qui passe par « la simplification des parcours, des process et des outils. »

Sur la partie outils, le service exploite la solution de centre de contacts Odigo et RingCentral – encapsulé dans Odigo – pour les communications unifiées. À noter que les parcours, côté client, changent eux aussi. Depuis début octobre, des processus d’accompagnement du client de bout en bout ont été lancés.

Finie l’escalade entre des niveaux 1 et 2. Un même conseiller gère la résolution d’une demande du début à la fin. À la clé, l’entreprise observe une hausse de la satisfaction et de la qualité grâce à un plus fort investissement des conseillers.

Côté parcours toujours, La Redoute cible ceux qualifiés « à forte valeur », par exemple les transactions dont le montant est élevé sur des produits de la maison. Numéro dédié, suivi, informations, contacts multiples. Le site veut soigner ses acheteurs.

Résultat : un faible taux d’incident et de demandes et une hausse du taux de ré-achat.

Pour piloter le tout, la direction et ses équipes s’appuient sur le décisionnel. Le développement de la culture de la donnée et des compétences BI, Jean-Marc Pénélaud y a notamment travaillé en collaboration avec l’ancien Chief Data Officer du groupe, Samir Amellal, désormais CDO et DSI d’Auchan Retail.

Aujourd’hui, La Redoute revendique des gains tangibles. La satisfaction client est par exemple passée de 50 % à 80 %. Elle doit encore progresser de cinq points pour atteindre l’objectif fixé.

Décisionnel et données stratégiques dans le pilotage

Le directeur identifie une autre « belle réussite » : la capacité de son département à collaborer avec les autres fonctions. Une fois la politique post-achat et ses composantes définies avec la direction générale, la relation client a pu travailler avec les business units et les partenaires externes afin de repenser les parcours en les simplifiant tout en tenant compte de leurs contraintes respectives.

« Cela a très bien fonctionné. Sans eux les gains n’auraient pas été atteints. La relation client est une résultante. L’enjeu consiste à identifier les irritants clients pour les mettre sous contrôle et favoriser le business. C’est aussi créer du lien avec les BU pour que chaque fois qu’un nouveau produit ou process est mis en place, ils nous impliquent naturellement. »

« De la donnée, nous en avons beaucoup et partout. »
Jean-Marc PénélaudDirecteur de la Relation Client, La Redoute

La politique post-achat est décrite comme la colonne vertébrale entre la relation client et les différents métiers de La Redoute, c’est-à-dire un levier de décloisonnement. Jean-Marc Pénélaud entend continuer à capitaliser pour progresser sur la valorisation des données. « De la donnée, nous en avons beaucoup et partout », indique-t-il.

Une première étape a consisté à la capturer, la documenter et la centraliser, pour permettre accès et croisements. La relation client, un département transverse, est particulièrement friande de ces croisements, qui exploitent des sources provenant de la logistique, des produits ou des ventes.

« Grâce à nos nouvelles organisations, nous avons pu franchir une belle étape en matière d’utilisation des données. Nous espérons en franchir une nouvelle avec une approche véritablement décloisonnée et une donnée simple d’accès pour tous les utilisateurs. »

De manière opérationnelle, cela signifie par exemple des tableaux PowerBI adaptés à chaque niveau de décision et « surtout des données mises à jour très souvent. »

La progression dépendra aussi d’une plus grande autonomie des data analystes dans l’accès et le traitement des données disponibles.

Ambition centre de profit et IA générative

Jean-Marc Pénélaud est en quête de données qui permettent de mesurer précisément l’apport de valeur de ses actions, et ainsi démontrer que la relation client ne se résume pas à être un centre de coûts. « C’est un Graal sur lequel nous travaillons depuis des années. »

Pour s’en approcher, ses équipes cherchent à établir la contribution dans le taux de réachat.

« [Le rôle de la relation client] doit évoluer pour être plus proactif, mieux analyser la data, pour en tirer des actions et les partager avec les différentes BU. »
Jean-Marc PénélaudDirecteur de la Relation Client, La Redoute

À l’image de la DSI, Jean-Marc Pénélaud ambitionne de faire de la relation client un business partner interne. « Son rôle doit évoluer pour être plus proactif, mieux analyser la data pour en tirer des actions et les partager avec les différentes BU. La finalité reste d’optimiser l’activité et la fidélité. Ce que cherche le client, c’est à réaliser simplement et en confiance ses achats. »

En termes de projets, cette volonté va donc se traduire par le lancement d’un bot (positionné d’abord au niveau de la FAQ), le développement du 360° sur les interactions client en captant et en réconciliant les données (ou voix du client) sur les différents canaux, le raccourcissement des délais de réponses sur les médias écrits, et le passage à des conseillers polyvalents (c’est-à-dire eux aussi 360°).

Sur la partie conseiller, un bot pourrait aussi résumer des échanges et ainsi accélérer le processus de traitement. Sur l’IA générative, La Redoute ne fait pas mystère de son intérêt à l’égard du projet mené dans le secteur, comme chez Cdiscount avec iAdvize sur l’avant-vente. L’enseigne se prépare aussi à développer sa propre solution avec l’éditeur dans ce secteur.

L’avant-vente constitue un nouveau théâtre d’opérations et donc de création de valeur pour la relation client. « Nous nous sommes jusqu’à présent beaucoup concentrés sur l’après-vente. Nous avons atteint un bon niveau sur le post-achat, ce qui nous permet de nous refocaliser sur d’autres parcours, dont l’avant-vente », confirme son directeur.

« La relation client peut jouer un rôle prépondérant, par exemple pour rassurer le client sur certains achats. Je pense notamment à l’achat d’un canapé en ligne. L’intervention d’un conseiller peut faire la différence pour expliquer, rassurer et prendre en charge la demande du client pour la transformer ».

« Je n’ai pas de doute sur le ROI », assure-t-il.

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