Stockage : les parfumeries Beauty Success réussissent un pari risqué
Pour résoudre le problème des applications métiers qui saturaient sa baie de disques, la chaîne d’instituts de beauté a expérimenté une technologie peu documentée : les VVOLs.
Alors qu’il n’existait pour ainsi dire pas d’exemple connu en France, La chaîne de parfumerie et d’instituts de beauté Beauty Success a osé passer le stockage de ses machines virtuelles au format VVOL. Le mode de fonctionnement VVOL est une technique que VMware propose depuis 2015 pour résoudre des problèmes de performances. Mais ce fonctionnement tranche tellement avec les habitudes de stockage que les fabricants de baies de disques ne l’ont jusqu’ici pas spécialement promue.
« Nous étions dans une impasse. Selon les anciennes bonnes pratique du stockage, nous avions divisé notre baie de disques en plusieurs volumes de 1,5 To chacun, soit une vingtaine de volumes répartis entre 140 machines virtuelles. Le problème avec un tel schéma est que vous courrez le risque qu’une machine virtuelle sature le volume qu’elle utilise au point de le rendre inutilisable pour toutes les autres VMs qui y accèdent. Et c’est arrivé : dans ce cas, plus aucune application du même set ne peut écrire de données », raconte Edouard Jugie, le responsable technique de Beauty Success.
« Éviter les pannes devenait un enfer : nous devions surveiller en permanence les performances et, au moindre signe avant-coureur, déplacer une VM dangereuse vers le volume où il restait plus de place et où la bande passante était moins occupée », dit-il, en expliquant que Beauty Success compte 140 boutiques en propre, plus 180 franchisés, tous connectés en VPN MPLS au siège technique situé en Dordogne pour accéder à leurs outils métiers.
Ce sont ces outils – des applications décisionnelles, un portail pour les commandes, un autre pour le suivi des commandes, une messagerie interne interne pour la logistique... – qui s’exécutent dans les machines virtuelles. Tous plus critiques les uns que les autres, ils sont maintenus en exploitation par neuf informaticiens, seulement.
« Nos applications sont virtualisées avec VMware ESXi, lequel propose une solution technique à notre problème : les VVOLs. Avec les VVOLs, c’est le système de virtualisation qui s’occupe tout seul d’attribuer les meilleures ressources de stockage aux VMs et qui, surtout, évite qu’une VM sature le stockage des autres. »
Mais il y a un problème : nous sommes alors en 2019, près de quatre ans après le lancement des VVOLs et, en France, aucune entreprise n’a encore témoigné que ce système fonctionnait.
Pure Storage pour son approche plus moderne, plus « sexy »
Fin 2019, l’équipe de Beauty Success est de toute façon contrainte de remplacer ses serveurs et sa baie de stockage qui arrivent en fin de vie contractuelle. Depuis 2010, l’enseigne achète régulièrement son stockage chez NetApp. « Au-delà des VVOLs, notre priorité était de passer à 100% de disques SSD, parce qu’il s’agissait des seuls sur notre baie d’alors qui ne saturaient jamais », indique le responsable technique.
Un appel d’offres est lancé. NetApp répond présent comme d’habitude. Huawei rend sa copie trop en retard. Et Pure Storage se manifeste aussi.
« Pure Storage nous a séduits, car ils avaient une approche bien plus moderne. D’abord, commercialement, leur programme Evergreen, nous permet de faire évoluer la baie de disques en cours de route : il est possible de remplacer les SSD par des modèles plus puissants sans changer le contrôleur et vice-versa. Ensuite, au niveau fonctionnel, la console d’administration de Pure Storage est bien plus sexy. Elle offre par exemple un module qui dresse des statistiques sur les goulets d’étranglement, ce qui permet de bien mieux anticiper les problèmes de performances. »
NetApp promet que des fonctions équivalentes arriveront bientôt. Les deux fournisseurs s’engagent aussi à supporter les VVOLs. « Nous sommes un an plus tard et NetApp n’a toujours pas sorti la console d’administration promise. Je suis donc bien content d’avoir à ce moment-là pris la décision de basculer sur du Pure Storage », lance Edouard Jugie.
Une baie livrée déjà optimisée
Une baie FlashArray//X20 de Pure Storage est donc déployée dès le mois de janvier 2020, après le pic d’activité des fêtes de fin d’année. Elle intègre deux contrôleurs, ses emplacements disques, remplis à moitié, offrent 20 To de capacité brute. « L’ensemble de nos machines virtuelles stocke exactement 24 To de données, mais nous jouons sur les fonctions de réduction de données – déduplication et compression – qui nous permettent de stocker 4,6 To de données utiles dans 1 To seulement. A l’heure actuelle, moins de 6 To sont réellement occupés », précise-t-il.
La baie est reliée en Fiber Channel 8 Gbit/s aux serveurs. « Dans un premier temps, nous avons conservé l’infrastructure Fibre Channel que nous utilisions sur notre NetApp. Ce n’est pas elle qui nous posait des problèmes de performances. La remplacer par du Fiber Channel plus performant pouvait attendre. »
Le prestataire Solution Data accompagne Edouard Jugie et son équipe pour la migration. « Franchement, la mise en production a été bien moins complexe que les fois précédentes. Pure Storage nous a fourni une baie quasiment prête à l’emploi, avec tous les réglages optimaux déjà effectués. Nous n’avons quasiment rien eu à toucher. Chez NetApp, nous devions faire preuve d’expérience pour régler nous-mêmes les optimisations. Au-delà de l’expérience, c’est surtout le temps à consacrer à ces petites tâches qui nous manque. »
La transition des données de l’ancienne baie vers la nouvelle prendra une semaine, seulement. Les machines virtuelles sont transférées, par lots successifs de dix, de manière transparente, via la fonction vMotion de VMware.
L’intérêt des VVOLs : l’abolition des opérations de maintenance manuelles
Et puis, bien sûr, il y a eu le passage aux VVOLs. « Tant pis pour les retours d’expérience ! Cette technologie nous paraissait essentielle. Et puis, cela faisait un moment qu’elle existait. Nous n’étions pas non plus face à une fonction en version beta. Bref, avec l’aide de Solution Data, nous l’avons mise en œuvre », dit Edouard Jugie, avec une certaine fierté.
Auparavant, chacun des volumes physiques de 1,5 To hébergeait trois fichiers par machine virtuelle : sa configuration, son image-RAM et, bien entendu, son image-disque. Désormais, chacun de ces fichiers est stocké sur un volume virtuel. « Cela résulte donc sur une quantité très importante de volumes virtuels. Mais ce n’est pas un problème dans le sens où l’hyperviseur ESXi de VMware gère tout cela de manière transparente avec la baie de disques, jusqu’à augmenter dynamiquement la taille des volumes virtuels selon les besoins. »
Edouard Jugie tient à souligner la facilité d’utilisation qu’il a gagnée : « auparavant, pour récupérer de l’espace, je devais lancer des commandes sur chacun de mes 20 volumes de 1,5 To. Désormais, il n’y a plus d’opération manuelle. Tout est automatique », se réjouit-il !
Il note toutefois une différence de fonctionnement au niveau des sauvegardes. « Nous utilisons Veeam Backup pour nos sauvegardes, lequel dispose de plug-ins pour récupérer automatiquement les snapshots produits par les baies de disques, NetApp comme Pure Storage. Mais ce principe ne fonctionne plus dès lors que l’on utilise les VVOLs. Nous avons dû reconfigurer Veeam Backup pour qu’il s’interface à présent directement avec ESXi. »
Pour autant, les sauvegardes se déroulent tout aussi bien que précédemment. « Depuis la mise en production nous n’avons connu aucun écueil. Les sauvegardes sont même deux fois plus rapides, car nous avons par ailleurs modernisé le NAS qui les héberge, une machine ExaGrid. C’est en tout cas la preuve que nous n’avions pas d’urgence à moderniser notre infrastructure Fiber Channel et que nous avons raison de penser que le système des VVOLs ne nous poserait pas de problème. »
Une maintenance proactive de la part du constructeur
En ce qui concerne les performances, l’équipe d’Edouard Jugie a mesuré qu’elles étaient trois fois meilleures qu’auparavant. Notamment sur l’exécution des traitements par lots (batches) dans les applications de décisionnel et de logistique, du fait de la présence de SSD uniquement. « En pratique, cela signifie que nos équipes obtiennent les ordres de livraison bien plus tôt qu’auparvant, soit un réel bénéfice métier. »
Tout comme pour sa baie NetApp, Edouard Jugie a contracté une maintenance 24/7 chez Pure Storage. « J’ai pu constater avec bonheur que Pure Storage faisait de la maintenance proactive : ils nous contactent quand ils découvrent un problème dans leur firmware et nous proposent de faire eux-mêmes une mise à jour. C’est une chose que l’on ne nous avait jamais proposée chez NetApp. »
« En l’occurrence, pour les mises à jour, nous devions faire une demande à notre prestataire, qui la remontait ensuite à NetApp. Il fallait planifier l’opération, ce n’était pas pratique et, au final, nous n’y consentions qu’une fois par an », dit-il, en expliquant que, en définitive, le maintien en conditions optimales obéissait plus à des contraintes de calendrier qu’à des impératifs techniques.
« Il faut comprendre que, dans une structure de notre taille, nous n’avons qu’une seule baie de stockage. Nous ne pouvons pas nous permettre de prendre le risque de la perdre en essayant d’installer nous-mêmes les mises à jour. Encore une fois, l’offre de Pure Storage est donc bien plus adaptée à nos besoins », conclut-il.