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Sanofi optimise ses recherches pharmaceutiques avec Quinten
Dans le cadre de plusieurs projets de recherche, Sanofi a fait appel à la société Quinten pour analyser de nombreuses molécules et identifier plus rapidement les bons candidats au développement.
Accélérer la recherche et la découverte de molécules dans une industrie pharmaceutique ultra-concurrentielle. C’est pour répondre cette problématique que le laboratoire pharmaceutique français Sanofi a décidé de s’appuyer sur la méthodologie et les technologies de Quinten, une entreprise française spécialisée dans la valorisation et l’enrichissement des données.
Pour mémoire, Quinten est une Jeune entreprise hexagonale qui a la particularité d’avoir assis son expertise d’analyse des données dans des secteurs aussi critiques que ceux de la cosmétique, de la pharmacie ou encore de la recherche médicale – Sanofi est l’un de ses clients les plus représentatifs. La société s’est ainsi construite des fondations solides pour aller attaquer d’autres secteurs d’activités, comme les services financiers, la banque, les assurances et bien sûr le marketing, de plus en plus consommateurs et utilisateurs de données en volume
Ces activités, Quinten les a bâties sur des algorithmes maison, conçus par l’un des fondateurs de la société, expert en mathématiques pour les services financiers. Guillaume Bourdon, CEO et co-fondateur de la société, nous avait expliqué que « l’algorithme de la société, qui s'appuie sur un apprentissage supervisé, identifie tous les sous-groupes remarquables dans une base de données en testant toutes les combinaisons possibles ».
Un modèle qui répondait justement aux besoins de Sanofi en matière de chimie médicinale et de design de nouvelles molécules. « La chimie médicinale porte en fait sur la création de molécules à visée thérapeutique. Pour cela, un nombre important de propriétés sont prises en compte afin que ces molécules aient les effets désirés chez le patient », décrypte Laurent Schio, responsable du département Chimie Médicinale - Optimisation moléculaire, dans un entretien avec la rédaction.
Dans ce cadre, la chimie médicinale comprend un processus de découverte, d’exploration puis d’optimisation de nouvelles séries chimiques ; ce qui conduit à étudier un nombre élevé de molécules. Les meilleures sont sélectionnées pour partir en développement pré-clinique (la phase où les molécules sont testées sur des animaux pour évaluer la tolérance).
Ces phases permettent ensuite de créer un dossier pour pouvoir tester les molécules chez l’homme. « Nous agissons en amont et essayons de détecter une nouvelle pépite. Nous nous arrêtons quand la molécule qui correspond au cahier des charges est trouvée », poursuit Laurent Schio.
Un contexte d’incrémentation de données en flux tendu
Mais la difficulté est de composer avec un niveau d’exigence qui évolue sans cesse et qui, par conséquent, doit être pris en compte et intégré dans les objectifs des équipes de Sanofi. « On analyse d’abord une maladie. Par exemple, on identifie qu’une protéine en particulier est responsable du développement d’un cancer type. On va donc essayer de bloquer cette protéine, appelée cible. On cherche à construire un inhibiteur. La phase d’après porte sur l’intégration d’autres paramètres clés dans l’équation, comme la sélectivité, la solubilité, la tolérance, l’exposition chez l’animal. »
A cela s’ajoute également d’autres données : les contraintes règlementaires. « Nous disposons aujourd’hui de plus d’éléments pour augmenter la probabilité qu’une nouvelle molécule puisse passer avec succès les phases de tests chez l’animal et chez l’homme, mais sommes aussi soumis à beaucoup plus de prérequis et de contraintes, qu’il faut prendre en compte très tôt en recherche pour éviter la manifestation potentielle d’effets secondaires en clinique. Cela doit être réintroduit dans le processus de découverte ». Et autant de données nouvelles avec lesquelles il faut composer – et recomposer.
« Ainsi entre 10 et 15 paramètres sont analysés en parallèle, chacun ayant un impact sur les autres », raconte encore Laurent Schio prenant l’exemple du Rubik’s Cube où chacune des faces illustre une propriété à optimiser.
« Quand une face est optimisée, il faut la défaire pour en optimiser une autre. Chaque modification opérée sur la molécule va peut-être convenir pour une propriété, mais être négative pour les autres. Il s’agit donc de trouver un compromis entre toutes les propriétés pour identifier une molécule qui peut être sélectionnée. On parle d’optimisation multi-paramétrique, qui est un processus très complexe et lent », explique-t-il encore.
Des bases projets, associées à des bases centrales
L’ensemble des analyses de ces paramètres est stocké dans des bases de données centrales. Les données sont exploitées et analysées à deux niveaux : dans le cadre de projets type, ou dans le cadre d’une observation globale, pour affiner les activités de recherche du groupe. Des données spécifiques aux projets sont agrégées et comparées à celles inhérentes aux molécules déjà développées.
« Ces molécules constituent ensuite la base de produits de Sanofi. Elles sont ensuite utilisées pour réaliser une opération dite de « screening ». Plus d’1 million de molécules existantes sont ainsi testées automatiquement sur de nouvelles cibles. Les données issues de ces procédures sont aussi stockées dans des bases, qui s’incrémentent au fur et à mesure. « Le profil d’un produit s’incrémente sur la base du nombre de fois qu’il a été analysé », ajoute encore Laurent Schio.
A chaque projet, des nouvelles données sont ainsi générées et incrémentent d’autant les bases en place. « Le stockage occupe certes une place clé dans le système de Sanofi. Mais aussi les capacités de traitements à opérer sur un volume très importants de données. »
Pour démêler cela et tester des algorithmiques plus puissants, Sanofi s’est donc adressé à Quinten.
« A la fin d’un projet de recherche, explique Laurent Schio, nous disposons de plusieurs milliers de molécules. L’algorithme de Quinten nous a permis de faire le tri en multi dimension et d’accélérer l’identification des bonnes molécules pour développement.»
Extraire de nouvelles connaissances des données disponibles
Selon lui, l’intérêt des outils développés par Quinten réside dans leur capacité à traiter des données de qualité variable, avec parfois des valeurs manquantes, pour en extraire de nouvelles connaissances, et permettre aux chimistes de mieux orienter leurs recherches. L’enjeu pour les chimistes est d’identifier les caractéristiques moléculaires présentant les meilleures chances de succès simultanément sur les différentes propriétés à satisfaire.
Au final, côté échange de données, les deux partenaires ont mis en place un modus operandi très classique. Quinten et Sanofi collaborent sur des serveurs « en zone neutre » sur lesquelles sont placées les données. Quinten les extrait et opère ses propres traitements. L’ensemble des opérations est réalisé dans un environnement sécurisé, confidentialité oblige.