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SITA et Bolloré Logistics misent sur les DLT dans la maintenance aérienne
Une dizaine d’acteurs du transport aérien ont fondé la « MRO Blockchain Alliance » pour explorer la manière dont les registres distribués peuvent fluidifier les échanges d’informations mondiaux sur les pièces détachées des avions de ligne.
Les acteurs du transport aérien regardent avec attention le potentiel de la blockchain dans la gestion de la logistique. Plusieurs d’entre eux viennent de former une alliance industrielle : « la MRO Blockchain Alliance ».
Ce groupe est composé du fournisseur historique de services informatiques SITA (qui appartient lui-même à un groupement coopératif de compagnies aériennes) et de fournisseurs de solutions pour la chaîne de maintenance, de réparation et de révision des avions (ou MRO pour maintenance, repair and overhaul).
Selon PwC, cette technologie promet d’énormes bénéfices financiers pour le secteur. Selon une de ses études, la blockchain pourrait augmenter les revenus de l’industrie aérospatiale de 4 %, soit 40 milliards de dollars, tout en réduisant les coûts liés au MRO de 3,5 milliards $ au niveau mondial.
La MRO Blockchain Alliance a pour mission d’étudier le potentiel de cette technologie pour suivre, tracer et enregistrer les pièces d’avions.
Outre SITA, on trouve Bolloré Logistics, Cathay Pacific, FLYdocs, le groupe HAECO, Ramco Systems et Willis Lease Finance Corporation parmi les membres fondateurs.
Une preuve de faisabilité (PoC) est en cours d’élaboration pour suivre et enregistrer numériquement les mouvements et l’historique de maintenance des pièces entre un grand nombre de fournisseurs.
Pour SITA, il n’existe actuellement aucune base de données mondiale de ces échanges. De plus le partage des données est incomplet et la numérisation ne serait encore que partielle. « Nous pensons que l’utilisation de la blockchain simplifiera et accélérera le suivi des pièces tout en permettant un partage sécurisé des informations entre les acteurs du secteur », avance l’association dans un communiqué.
Matthys Serfontein, President of Air Travel Solutions chez SITA, explique que cette initiative s’inscrit pour l’éditeur dans l’exploration des différentes applications possibles de la blockchain dans le secteur (comme dans les aéroports, lire ci-après). « Dans un secteur aussi interconnecté que le transport aérien, la capacité de partager et d’enregistrer des données communes de manière sécurisée sans renoncer au contrôle de ces données est fondamentale pour réaliser de nouveaux gains d’efficacité », déclare-t-il. « Et c’est encore plus vrai pour le secteur de la maintenance, de la réparation et de l’entretien des avions ».
Selon des chiffres de SITA, cette activité liée au MRO traite 25 milliards de pièces provenant d’environ 20 000 fournisseurs, pour permettre les 144 000 vols effectués chaque jour.
L’alliance commencera par une phase de planification. Le premier PoC est attendu pour le deuxième trimestre de cette année.
Bien que le blockchain soit surtout connue pour ses applications dans les services financiers, les registres numériques distribués (DLT) sont de plus en plus envisagés dans la chaîne d’approvisionnement. Elle permet de suivre et de tracer la suite des échanges entre les différentes parties d’une supply chain. Comme tous les acteurs de cette chaîne peuvent voir les transactions, la blockchain peut réduire le temps nécessaire au rapprochement, permettre des processus plus rapides, et faciliter les audits a posteriori en cas de problème. En France, une société comme Tilkal s’est spécialisée dans ce domaine et travaille, entre autres, avec Casino. Carrefour collabore lui avec IBM, qui a lancé sa blockchain privée dédiée à l’alimentaire (IBM Food Trust).
Plusieurs PoC (DHL et Accenture, IBM, etc.) sont également en cours dans le secteur pharmaceutique pour lutter contre la contrefaçon de médicaments en traçant leurs chaînes logistiques depuis la production jusqu’aux patients.
Dans le secteur aérien, les registres distribués ont aussi du potentiel pour les aéroports. Le cabinet d’analystes Frost & Sullivan estime que « la blockchain pourrait s’avérer être le catalyseur pour un environnement aéroportuaire véritablement collaboratif, entre des acteurs qui travaillent aujourd’hui en silos », à savoir la société gérante de l’aéroport, les sociétés de nettoyage, les douanes, la police, les compagnies aériennes, les entreprises de restauration, les exploitants de commerces, etc.
En France, Air France-KLM s’est associé en 2018 avec une startup suisse (Winding Tree) pour se lancer dans la blockchain, mais le groupe n’a plus communiqué sur le sujet depuis l’annonce de ce partenariat. Preuve que si la blockchain possède un potentiel, trouver où et surtout comment le concrétiser de manière opérationnelle demande du temps.
Avec Karl Flinders de Computer Weekly