OPEN : comment la RATP supervise sa consommation d’énergie
Afin de superviser sa consommation d’énergie, la RATP s’est tournée vers Suez et sa solution On’Connect fluids. La plateforme permet d’automatiser la récolte et l’analyse de données à partir de tableaux de bord, mais aussi de paramétrer des seuils d’alerte.
Bien connue des Franciliens, la RATP gère l’exploitation, la maintenance, l’ingénierie, l’information voyageur et la billettique d’un réseau de transport mêlant métros, trains (RER), tramway, bus, funiculaires et autres. Avant la crise sanitaire, la régie transportait pas moins de 16 millions de voyageurs par jour dans 14 pays, soit 4,8 milliards de trajets par an, majoritairement en île de France.
Sans trop de surprise, une telle activité est énergivore et polluante. Si le groupe a réduit de 8 % sa consommation d’énergie et de 13 % ses émissions de gaz à effet de serre entre 2015 et 2019, notamment en passant à l’électrique ou à l’hybride 27 % des bus de son parc, son objectif à l’horizon 2025 est bien plus ambitieux.
Les ambitions vertes de la RATP
« Dans le cadre de notre démarche RSE [Responsabilité sociétale des entreprises N.D.L.R.], nous avons une politique environnementale forte. Nous avons l’objectif de réduire de 20 % notre consommation d’énergie, de 50 % nos émissions de gaz à effet de serre et d’optimiser nos usages en eau d’ici 2025 », affirme Aurélia Menacer, responsable Énergie, Climat et Écoconception chez la RATP.
Or, la RATP supervise aussi des stations et des bâtiments pour chacun des types de transport qu’elle propose. En l’occurrence, la gestion de l’eau, du gaz et de l’électricité n’est pas une mince affaire quand il faut traiter les informations en provenance de plusieurs sites et de plusieurs fournisseurs.
En outre, l’entreprise dispose en Île-de-France de son propre réseau de transformation et de distribution d’électricité haute tension (2 000 km de câbles souterrains) qui fournit « 75 % de l’alimentation en énergie électrique nécessaire au fonctionnement des lignes, stations et locaux du réseau métro, RER et tramway ». Le groupe consomme jusqu’à 1,5 milliard kWh par an.
Aurélia MenacerResponsable Énergie, Climat et Écoconception, RATP
« Nous cherchions un outil pour augmenter l’efficacité du suivi de nos consommations sur les sites de la RATP. Nous avions déjà la possibilité de le faire, mais avec différents logiciels. Nos collègues sur site n’avaient pas une solution globale qui leur permettait d’avoir une vision d’ensemble sur leur usage », ajoute la responsable. « Nous souhaitions également des mesures affinées, la capacité à récolter des données chez nos fournisseurs et nos distributeurs, ainsi que d’intégrer les données de la RATP ».
C’est avec ce cahier des charges que l’exploitant de service public de transport a lancé un appel d’offres. Le groupe Suez l’a emporté avec sa solution On’Connect fluids. Il s’agit d’une plateforme qui automatise la collecte de données multifluide (électricité, eau, gaz, chauffage urbain, réseau de froid) en provenance de compteurs, de capteurs de métriques, mais elle ingère aussi les informations sur les bâtiments, les factures ou encore les contrats passés avec les fournisseurs.
Un système de génération de tableaux de bord permet d’associer les niveaux de consommations, de les combiner et de les situer par site sur une carte. Il est également possible d’éditer des rapports, de contrôler les factures. La plateforme est en partie hébergée sur « un cloud français » dont Suez préfère taire le nom. Certaines données sont stockées dans un datacenter du fournisseur d’énergie.
OPEN, un outil de pilotage multifluide
Déployé en avril et disponible depuis juillet 2020 au sein de la RATP, On’Connect Fluids se nomme OPEN (Outil de Pilotage de l’Eau et de l’éNergie). Il permet de réaliser le bilan énergétique de 115 sites tertiaires et industriels. De même, les consommations d’eau de 369 gares et stations RATP sont analysées dans le logiciel. Le groupe collecte des informations en provenance d’une douzaine de fournisseurs, soit plus de 1 000 contrats et plus de 1 200 compteurs (connectés ou non) différents.
Aurélie MenacerRATP
« L’outil se connecte aux API des fournisseurs et des distributeurs, traite la donnée et nous la remet en forme pour qu’elle soit accessible pour les utilisateurs ». Les données sont actualisées toutes les heures. Cette phase d’intégration a pris « plusieurs mois », selon Aurélia Menacer. « Il fallait incorporer tous les contrats, l’historique de consommation depuis 2015, se créer les bases pour les tableaux de bord et paramétrer les profils », liste-t-elle.
Auparavant, le groupe avait testé le déploiement de capteurs connectés associés à des compteurs. « Nous avions effectué une expérimentation sur trois sites RATP complètement différents pendant laquelle nous avions installé des capteurs d’impulsion. Nous étions déjà dans cette dimension multifluide, mais nous avons réalisé que nous avions déjà beaucoup de données en interne et chez nos fournisseurs », indique Aurélia Menacer.
Cela n’empêche pas l’entreprise d’employer des capteurs connectés supplémentaires dans certaines situations. OPEN intègre les données des compteurs généraux des fournisseurs ou ceux de la RATP. Le groupe ajoute parfois des capteurs qui vont permettre de préciser la consommation. « C’est important pour des sites de maintenance comme ceux dédiés aux bus, par exemple. Il rassemble souvent plusieurs activités : entretien mécanique, nettoyage des véhicules et de leurs accessoires. Nous pouvons placer un capteur de température au niveau de l’atelier pour vérifier que nous avons les bonnes conditions. De même, nous disposons des capteurs pour suivre la consommation d’eau des machines de nettoyage », précise la responsable Énergie, Climat et Écoconception chez la RATP. Le groupe envisage d’étendre ce type de cas d’usage auprès de Suez.
Des usages perfectionnés, un bilan énergétique à anticiper
Aujourd’hui, 300 personnes au sein de la RATP recourent à l’outil. « Différents profils ont accès à la plateforme. Certains visualisent les consommations de leur site, d’autres sont des énergéticiens, ou des gérants multisites », détaille Aurélia Menacer. La RATP poursuit les formations afin de démocratiser son usage. La responsable mise notamment sur les tableaux de bord et les cartes qui facilitent selon elle la visualisation des données disponibles.
« Beaucoup de nos collègues utilisaient des tables Excel pour synthétiser les données ou il fallait attendre d’avoir la facture pour certains fournisseurs. Désormais, ils ont accès à toutes les informations depuis une seule plateforme ».
Aurélia MenacerRATP
Mais ce sont les capacités d’alerte d’un moteur de règle intégré qui ont fini de convaincre la RATP. « Nous avons des données fiables, plus rapidement. En conséquence, nous pouvons mieux agir : nous détectons les dérives de consommation, les fuites d’eau et suivons nos plans de performance énergétique, par exemple pour les bâtiments », constate Aurélia Menacer. En particulier, les équipes de la RATP analysent le fonctionnement des sites et configurent des seuils d’alerte.
Si le besoin est principalement venu du département auquel appartient Aurélia Menacer, l’ensemble des divisions de l’entreprise ont été mises à contribution. « Nous continuons à accompagner certains départements dans la prise en main. Cet outil a bien vocation à supporter nos différents plans d’action environnementaux tout en réduisant notre empreinte énergétique », rappelle la responsable. Il faudra attendre tout de même une année complète afin de mesurer les effets du projet OPEN sur la consommation de fluides.
De son côté, Suez guide le groupe dans les phases d’installation des capteurs, dans la personnalisation de la plateforme et la formation. Dans un deuxième temps, Suez pourrait faire bénéficier au spécialiste du transport de son expertise et celle de ses partenaires en analyse avancées des fluides.