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Comment Marks & Spencer forme ses employés à la data science
La chaîne de magasins britannique élabore une formation en data science de niveau Master. Elle entend ainsi faire de la discipline une compétence commune à l’échelle de toute l’organisation.
Marks & Spencer entend renforcer les capacités de ses employés en data science. Sa plus récente initiative a consisté à dispenser une formation en data science et en intelligence artificielle (IA) de niveau 7 à 10 personnes en interne. Ce « Niveau 7 » est le terme qu’utilise Cambridge Spark, l’institut de formations choisi par Marks & Spencer. Il correspond également à une classification officielle du Royaume-Uni. « Il s’agit essentiellement d’un Master », explique Suze Howse, responsable des données de l’entreprise chez M&S.
Suze Howse se décrit comme une ancienne de M&S – une « M&S lifer ». Elle a commencé en caisse et a évolué jusqu’à la planification centrale des produits alimentaires, avant d’endosser, il y a deux ans de cela, une fonction liée au numérique et aux données, et d’obtenir l’an dernier la direction d’une équipe chargée des données. Suze Howse fait partie de l’entreprise depuis 14 ans. Elle est devenue responsable de la stratégie des données en 2019.
« Mon rôle consiste à contribuer à l’activité à une plus grande échelle et à établir des partenariats dans ce cadre », explique-t-elle à nos confrères de Computer Weekly [propriété de Techtarget, également propriétaire du MagIT, N.D.R.]. « [Je cherche à] promouvoir et comprendre ce que sont les données et leur importance, ainsi que la manière de les appréhender, puis d’en tirer une valeur et une aide décisionnelle. ».
L’équipe de Suze Howse se compose d’ingénieurs et d’architectes des données, ainsi que de responsables des livraisons techniques. « Ils pilotent la migration vers notre plateforme cloud. Celle-ci constitue une partie importante de notre transformation, en partenariat avec Microsoft », explique-t-elle. « Nous disposons aussi d’équipes côté produits et data science. Leur rôle consiste à identifier les problèmes au sein de l’activité et à recourir à la science des données pour les résoudre tout en générant de la valeur.
« À titre d’exemple, nous avons élaboré un modèle qui sélectionne le prix de vente optimal dans notre rayon Vêtements et Produits domestiques. Il automatise le processus et épargne ainsi à nos vendeurs une grande part de tâches manuelles. En outre, il optimise l’équilibre entre expérience côté client et bénéfice côté M&S. »
Une accélération de la montée en compétence
Depuis 2018, M&S a formé 280 personnes, ainsi que 500 de ses principaux cadres dirigeants, à la compétence en matière de données par le biais d’une formation de data analyst de niveau 4 et d’un cours de technicien de données de niveau 3.
Dans une publication de blog parue sur le site Web d’entreprise de Marks & Spencer, Suze Howse écrivait : « Notre équipe compte 10 collègues, qui pour la plupart sont des diplômés de notre programme d’analyste de données de niveau 4. Ils ont entamé leur progression vers le niveau 7 et sont devenus des professionnels à la pointe de leur discipline. En 15 mois, ils ont appris toute une gamme de techniques en data science, dans des domaines tels que la modélisation, le machine learning, ou encore l’automatisation et l’optimisation des processus métier ».
« Pour mettre cette approche en contexte, la plupart des entreprises considéreraient comme un privilège de disposer, parmi leurs employés, d’un diplômé de niveau 7 ; nous en avons 10. Ce qui montre notre sérieux en matière de données, ici, chez M&S. »
« Parallèlement aux avantages commerciaux, le nouveau programme a un certain nombre d’effets bénéfiques sur notre pipeline de talents. Tout d’abord, il nous aide à attirer et à fidéliser ces derniers. En effet, aucun autre enseigne ne dispose d’un programme de niveau 7 [au Royaume-Uni]. Ensuite, il nous permet de cultiver nos talents existants, en encourageant un nombre croissant de nos 70 000 collaborateurs à envisager une carrière dans le secteur des données. »
Et Suze Howse d’expliquer à Computer Weekly : « Il s’agit du premier programme d’apprentissage en data science et IA dédié à des collaborateurs qui disposent niveau de compréhension d’un certain dans l’espace des données. Concrètement, cela signifie que nous comptons aujourd’hui 10 employés dans la discipline qui ne sont pas data scientists ».
« Ces personnes proviennent d’autres secteurs d’activité – vêtements, produits domestiques, vente au détail et immobilier ; certains du domaine du numérique et des données. Elles sont championnes des données dans leur espace », poursuit-elle. « Elles ont aujourd’hui la possibilité d’accroître leurs connaissances techniques, et ainsi de poursuivre leur rôle d’ambassadeur dans le domaine des données, mais aussi dans celui de techniques de science des données plus avancées. »
Chez M&S, les praticiens de la donnée forment les cadres
Suze Howse expose également à Computer Weekly le schéma de mentorat inversé destiné aux principaux cadres dirigeants de M&S. « L’intérêt dont a fait montre notre équipe dirigeante à l’échelle de l’activité a été exceptionnel », explique-t-elle. « À titre d’exemple, Katie Bickerstaffe, Directrice des opérations, compte parmi les personnes impliquées dans le mentorat ».
L’approche de Marks & Spencer consiste à établir un partenariat entre les dirigeants et les praticiens issus de toute l’activité, en fonction des intérêts de chacun. « Ainsi, ils peuvent vouloir en apprendre davantage sur la data science, ou sur les outils analytiques. Nous retenons alors le praticien adéquat et établissons le partenariat, puis nous organisons des réunions mensuelles. »
Marks & Spencer organise des événements internes consacrés au numérique et aux traitements des données – les « DigiFest » – ainsi qu’un hackathon semestriel.
« Le DigiFest est mon événement préféré », poursuit Suze Howse. « Nous l’avons lancé en 2019. C’est un événement annuel que nous organisons au niveau de l’entreprise. Il s’agit d’une conférence sur tous les aspects du numérique. Et nous invitons chaque collaborateur M&S à y assister. Même les magasins bénéficient d’une version, certes réduite, de l’événement, car nous accordons de la valeur aux contacts qu’ils ont avec la clientèle ».
« Toute la question revient à connaître notre comportement par rapport à notre stratégie numérique. Qu’avons-nous livré d’exceptionnel via notre partenariat avec Ocado, notre application mobile ou les fiches Cambridge Spark ? Nous avons invité des orateurs. Et c’était l’occasion pour nous de nous adresser directement à nos collaborateurs et de leur faire sentir qu’ils étaient vraiment de la partie. Notre rôle ne se borne pas à piloter et livrer une stratégie numérique ; il consiste aussi à établir un partenariat avec l’activité et à le concrétiser auprès de ses opérationnels. »
Des événements ouverts à tous les métiers
En 2021, 2 500 salariés de M&S assistait au DigiFest, dont 300 en présentiel.
Suze HowseResponsable des données de l'entreprise, Marks & Spencer
« Je pense que personne ne s’attendrait à voir M&S comme la première enseigne de détail à lancer un programme d’apprentissage en data science et d’IA. Et pourtant nous l’avons fait. »
Le détaillant dispose également d’une plateforme de données en cloud – Beam – qui englobe ses ressources pédagogiques sur les données, et depuis laquelle il a développé une « Beam Academy », lancée il y a un an. La Beam Academy, explique Suze Howse, est la suite logique du programme d’analyste de données de niveau 4. « Par exemple, un trimestre entier de formation a été consacré à Power BI, notre outil de visualisation des données en libre-service », explique-t-elle. Cette formation concernait les magasins, ainsi que tous les collègues ; elle leur a donné confiance dans l’interaction avec Power BI et l’accès à la base de données », ajoute-t-elle.
« En ce qui me concerne, l’élément clé, c’est ma longue carrière chez M&S. Je connais notre renommée dans de nombreux domaines ; alimentation de qualité, produits de qualité… », poursuit Suze Howse. « Nous sommes une enseigne britannique réputée, notre héritage est considérable. Mais selon moi, les gens pensent rarement aux limites que nous repoussons dans le cadre de notre activité numérique et de données. Et je crois que cet apprentissage de niveau 7 en est un exemple vraiment remarquable. »