Le hackathon, outil d’accélération de l’IA générative au Club Med
Le Club Med réalisait en juin, sur trois jours, un hackathon en association avec Microsoft. Un rendez-vous préparé en amont durant trois mois pour sourcer six cas d’usage prioritaires et composer les équipes participantes.
Pourquoi et quand réaliser un hackathon ? À chaque entreprise son mode d’emploi. Dans le domaine de l’IA générative, Air France a ainsi initié sa démarche d’acculturation et d’idéation par le biais d’un hackathon. Au Club Med, le hackathon est intervenu lors de la seconde phase de ses initiatives GenAI.
La stratégie Gen IA de l’entreprise a été engagée en mars 2023. Elle se traduisait, en septembre, par de premiers cas d’usage et un déploiement progressif. Et en juin 2024, le groupe réunissait des collaborateurs durant trois jours au siège de Microsoft à Issy-les-Moulineaux pour un hackathon dédié aux modèles génératifs.
Des mois de préparation pour sélectionner les bons projets
Pour le Chief Data Officer du Club Med, Siddhartha Chatterjee, les finalités d’un tel rendez-vous sont multiples.
L’acculturation en est une, autant pour les équipes techniques que pour les métiers. Le hackathon était aussi l’opportunité de faire collaborer, en simultané, les différents profils sur des projets communs.
« Un gage d’efficacité », juge le CDO. Le hackathon avait en outre pour objectif « d’embarquer d’autres métiers » sur la GenAI, après une première phase plutôt consacrée à la relation client. « Le Club Med entre dans une étape d’accélération », indique-t-il. Y étaient associées d’autres fonctions de l’entreprise, dont les RH, les opérations et le juridique.
« Nous avons utilisé le hackathon comme un levier, c’est-à-dire un moyen d’élaborer notre feuille de route d’IA générative », ajoute Siddhartha Chatterjee. Mais pour atteindre un tel objectif, trois jours de développement ne suffisent pas.
En amont, plusieurs mois ont été consacrés à la préparation de l’évènement, à commencer par le sourcing des cas d’usage, ou l’identification et la préparation des données. « Lors du jour J, nous disposions de six projets validés. Le hackathon avait donc d’abord pour objet de confirmer ou non leur faisabilité. »
Au terme des trois jours d’ateliers, l’intérêt des six projets a été conforté. Pour établir leur pertinence, plusieurs équipes ont été composées. Elles comprenaient des profils métiers, dont un juriste pour le cas d’usage lié au « légal », de data scientists, d’architectes, d’un data engineer, de product owners et enfin de coachs Microsoft maîtrisant les technologies Azure.
Le chatbot interne vitrine de l’impact de la GenAI
Siddhartha ChatterjeeChief Data Officer, Club Med
Grâce à ces « squads » pluridisciplinaires, les experts Data et métiers du Club Med ont conçu six prototypes. L’entreprise a notamment approfondi le sujet chatbot (interne & externe) engagé en 2023.
« Nous sommes confrontés à un goulet d’étranglement au niveau de la data. Les vendeurs, qui sont les premiers utilisateurs du chatbot, demandent en effet plus de données », détaille le CDO. « Le hackathon a donc été consacré au sourcing des données et à la vectorisation de bases pour pouvoir alimenter plus efficacement le chatbot avec de nouvelles sources de données ».
Siddhartha ChatterjeeChief Data Officer, Club Med
La direction data du Club Med a, en parallèle, posé les fondations d’autres usages de la GenAI, par exemple avec les achats. L’entreprise développe un outil destiné à améliorer le pilotage de ces opérations.
Et cela commence par la collecte des données tarifaires des produits alimentaires (nourriture et boisson) et de leurs évolutions. L’outil mis au point procède à un crawling du web pour capter des informations (inflation, prix des denrées, etc.) et contribuer ainsi aux décisions d’approvisionnement des acheteurs.
Des gains considérables sur l’affectation de 15 000 G.O
Avec l’IA générative, Club Med s’efforce également de « résoudre un processus chronophage » : la bonne affectation de ses collaborateurs, ses G.O (« Gentils Organisateurs »). « Chaque saison, nous procédons à 15 000 affectations », indique le CDO. Ces tâches restent actuellement « assez manuelles » et gourmandes en temps pour les RH.
Pour améliorer ces opérations, le Club Med combine IA générative et techniques de recherche opérationnelle. Là encore, un prototype a été élaboré. De complexes développements restent à réaliser, pour basculer vers un processus d’affectation automatisé et « gagner massivement du temps ».
Plus classiquement, le groupe de vacances s’intéresse au potentiel de la GenAI pour la création de contenus marketing. Baptisé « Gentil Writer », l’assistant d’écriture permet, en fonction d’un contexte et d’une cible, de générer du contenu « respectant le tone of voice du Club Med ». Le bot présente d’ores et déjà « des résultats très satisfaisants », se félicite le CDO.
Le bilan serait aussi encourageant dans le domaine IT. Grâce à ces modèles, l’entreprise souhaite affecter plus efficacement les tickets de support informatique.
Enfin, le Club Med approfondit le potentiel de l’IA générative pour le juridique. Par le biais d’un RAG interne, l’entreprise ambitionne de simplifier les recherches documentaires de ses juristes. « En langage naturel, le RAG permettra de rechercher des documents. Nous avons d’abord sélectionné les typologies de documents juridiques les plus demandées », précise le chief data officer.
Cette base de documents sera ensuite enrichie pour permettre des recherches supplémentaires au sein du patrimoine de données non structurées du Club Med.
Une roadmap GenAI claire pour 15 mois
À la suite du hackathon, l’entreprise prévoit, au cours des prochains mois, de porter en production trois des six projets.
Siddhartha ChatterjeeChief Data Officer, Club Med
Achats, affectation des G.O et RAG, considérés comme « stratégiques », nécessitent plus de développements. Un MVP pourrait suivre pour chacun de ces projets en 2024 avant un passage à l’échelle courant d’année prochaine.
« Mais notre priorité numéro 1 reste le chatbot avec un enjeu d’industrialisation. D’ici la fin d’année, il pourrait être déployé dans une dizaine de pays après des débuts au Brésil. Ce projet à impact est notre vitrine. Les cas d’usage travaillés en hackathon, et qui ont démontré leur valeur, viennent enrichir notre roadmap. Ils seront au centre de nos développements sur les 15 prochains mois. »
Pour le Club Med le hackathon est donc une méthode efficace… « à condition d’avoir bien préparé ce rendez-vous en amont », insiste Siddhartha Chatterjee. Choix de la problématique métier, logistique, technique, sélection des profils. Les motifs d’échec d’un hackathon ne manquent pas, prévient-il encore.