La CFDT boucle enfin la refonte de son système d’information
Se reposant des bénévoles, la CFDT a entamé une mutation numérique en 2010 qui se traduit par une première application : Gasel.
C’est lors de son congrès de 2010 que la CFDT décide de revoir son approche vis-à-vis de la gestion de ses adhérents et, plus généralement, de la façon dont l’informatique de la confédération est administrée. Jusqu’alors gérée par le service financier, l’informatique va disposer d’une véritable direction, ou plutôt, d’un service des systèmes d’information.
La CFDT lance alors l’idée de refonte de son système de gestion des adhérents. « Il fallait mettre l’adhérent au centre du système et non plus seulement les cotisations. Ces données existaient, mais elles étaient réparties dans plusieurs systèmes et étaient incohérentes entre elles », explique Patrice Salsa, Secrétaire Confédéral responsable des systèmes d'information de la CFDT.
Un logiciel sur-mesure pour un millier de syndicats
Avant cette refonte, l’informatique de la CFDT consistait en un ensemble d’applications dédiées à la collecte des cotisations des adhérents. Un client lourd, développé en Foxpro, était installé sur au moins un PC chez chacun des 1 000 syndicats qui composent la confédération. Les données étaient collectées par envois de disquettes, puis par email, et consolidées dans une base de données centrale dans une approche complètement tournée vers la collecte des cotisations.
Un système obsolète en décalage avec les systèmes informatiques utilisés par les syndiqués
En central, une application Java permettait aux salariés de la CFDT de gérer les cotisations. Un système obsolète et une architecture hétérogène de plus en plus en décalage avec les systèmes informatiques utilisés par les salariés syndiqués.
Pour rénover son système de collecte, la confédération doit alors imaginer son nouveau système de gestion des adhérents de A à Z car il n’existe pas de système éditeur sur le marché. « Chaque centrale syndicale à son propre mode de fonctionnement, confie Patrice Salsa, de ce fait, il n’y a pas une solution type SAP répondant à nos besoins. »
Pour la mise en place de son nouveau système Gasel (Gestion des adhérents et des structures en ligne), la CFDT choisit alors de s’adosser à Neoxia afin d’élaborer le schéma directeur de son informatique, puis le mettre en œuvre. « Neoxia maitrisait bien les processus d’industrialisation. Beaucoup de projets informatiques échouent car les processus ne sont pas assez industrialisés, notamment au niveau de la maintenance du code développé. Ils nous ont apportés cette démarche et nous ont aidés à implémenter nos processus d’intégration continue. »
Le processus mis en place permet au service informatique de répondre en quelques semaines lorsqu’un nouveau besoin est exprimé par la base, via des cycles de développement assez courts entre l’expression de besoin et la mise en production. « Neoxia nous a aussi apportés un pilotage de la qualité par l’analyse de la performance applicative en temps réel via des sondes qui monitorent en temps réel l’activité de l’application, en relation avec la qualité du code », complète Patrice Salsa.
L’architecture orientée objet s'appuie sur un MDM et une gestion de processus
« Nous avons fait le choix de partir sur une architecture orientée objet, c’est-à-dire nous concentrer sur l’écriture de nos règles métier, nos règles de fonctionnement, et implémenter dans notre système d’information un ensemble de progiciels achetés sur étagère. Ceux-ci vont prendre en charge les grandes fonctions que l’on doit trouver dans un système de gestion. »
Nous faisons appel au nearshore, mais que dans un pays où il y a un droit du travail
Patrice Salsa, responsable des systèmes d'information de la CFDT
Parmi les grandes briques du système d’information rénové de la CFDT figure la solution de MDM d’Orchestra Networks qui consolide l’ensemble des données relatives aux adhérents. C’est la solution Open Source Bonitasoft qui a été choisie pour assurer de gestion des processus (BPM) et le logiciel Bdoc pour le volet éditique.
Patrice Salsa n’a pas souhaité privilégier les solutions Open Source dans cette architecture : « L’important pour nous était de disposer de solution standards et interopérables. L’Open Source est certes intéressant, c’est vrai, mais les coûts que l‘on a pas sur les licences, on les retrouve sur le développement. »
De même, le responsable informatique ne rejette pas l’outsourcing et l’offshore, mais avec quelques nuances : « nous ne sommes qu’une dizaine de personnes, donc nous ne pouvons pas mener en interne les développements. Comme toute entreprise, nous faisons appel à des prestataires extérieurs, des régies, des forfaits et passons des contrats de TMA. Nous faisons appel au nearshore, mais pas n’importe où. Nous ne le faisons que dans un pays où il y a un droit du travail, la liberté syndicale, le Maroc, en l’occurrence, mais on ne l’aurait certainement pas fait dans certains autres pays. C’est une exigence éthique et morale qui doit être en accord avec les valeurs que nous défendons. »
Une mise en place plutôt laborieuse dans les syndicats
La mise en production de l’application n’a pas été une chose simple et la CFDT a dû fait face à la grogne des syndicalistes invités à abandonner leur application Foxpro pour l’interface Web de Gasel. Des salariés rompus à la négociation, si bien qu’il a fallu une année de dialogue et de retouches de l’application afin que Gasel réponde finalement aux attentes de ses utilisateurs.
« A la CFDT, les salariés ne représentent qu’une minorité des effectifs. La plupart des militants sont des salariés qui donnent de leur temps au syndicat. Sur cette population, la gestion du changement n’est pas quelque chose de simple. Changer d’outil informatique alors que celui-ci est utilisé depuis une dizaine d’années, sur lequel les gens étaient formés, pour passer sur un outil qui ne répondait pas tout à fait à leurs habitudes de travail, a généré de la grogne et du stress auprès des utilisateurs. Mais nous sommes une organisation qui favorise le dialogue et l’expression. »
Une pause avant un autre grand projet
Aujourd’hui, l’application Gasel est stabilisée et le responsable informatique veut marquer une pause avant de lancer à nouveau un grand projet. Il tire les conclusions de ce déploiement : « la CFDT s’est lancée dans ce projet avec une certaine faiblesse du côté de la maitrise d’ouvrage, c’est-à-dire du côté de l’expression du besoin, de la validation des processus. Autant de points qui ont perturbé le fonctionnement des sections syndicales pendant la première année. Aujourd’hui, les problèmes sont derrière nous ! »
Avec Gasel, le CFDT dispose maintenant d’une continuité de l’information lorsque l’adhérent qui, au grès d’une mutation ou d’un changement de métier, peut être amené à changer de syndicat. Il était alors considéré comme radié lorsqu'il quittait le syndicat d’origine. Avec un système centralisé, la fonction de transfert permet à la CFDT de maintenir la continuité des services auxquels il a droit, ses assurances syndicales, l’assistance juridique, etc. De même, l’application permet désormais l’adhésion en ligne afin de mieux répondre aux habitudes des nouvelles générations.
Projet de plusieurs millions d’euros, Gasel est en production depuis 18 mois. Le dernier grand syndicat a été basculé au mois de juin et les tout derniers syndicats membres de la confédération l’ont rejoint en octobre. Aujourd’hui le système compte 4 000 utilisateurs actifs et son MDM gère 1,2 million d’enregistrements.