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L’Icam devient un institut pilote pour la virtualisation de stations de travail
En virtualisant les postes de CAO de tous ses sites sur des nœuds Nutanix équipés de GPU NVidia, l’Icam permet à ses étudiants de travailler leur cursus d’ingénieur où et quand ils le désirent depuis leurs PC personnels.
« Nous avons vocation à former des ingénieurs, pas à faire acheter à nos étudiants des stations de travail pour préparer les cours. » Voilà comment Dominique Bugliani, le responsable des systèmes d’information du groupe Icam, résume la situation que l’Institut s’est décidé à résoudre en 2018.
« Ma mission est de faciliter les bonnes pratiques autour de l’outil numérique. Parmi celles-ci, il y a l’idée d’investir différemment dans le matériel et de mieux servir les étudiants. D’une part, parce que nous n’en pouvons plus des limites physiques et de la maintenance des équipements. D’autre part parce que les nouvelles générations aspirent à consommer différemment le poste de travail. Elles veulent du BYOD, mais aussi avoir la possibilité de travailler en dehors des salles de classes » raconte-t-il.
Résoudre la sédentarité, le coût et la maintenance des stations de CAO physiques
Dans ses cursus d’ingénieurs, l’Icam forme ses étudiants sur des logiciels de CAO comme Catia, AutoCAD, SolidWorks ou encore MatLab, des solutions qui ne s’exécutent que sur des PC richement pourvus en processeurs et en GPU. Cet équipement étant onéreux, leur nombre est limité et il faut planifier, parfois le weekend, leurs heures d’utilisation. Une situation qui se répète sur les six sites français de l’Icam, à Paris, Lille, Toulouse, Nantes, Vannes et La Roche-sur-Yon.
L’idée de résoudre l’inertie imposée par ces machines grâce à la virtualisation est venue de l’un des enseignants de l’Icam sur son site de Douala, au Cameroun. « Il était parvenu à faire utiliser ses logiciels en dehors des murs de sa classe grâce à des outils Open source qui diffusaient des sessions distantes depuis une machine Windows. Nous avons été très impressionnés et avons demandé à notre intégrateur S-Cube la réalisation d’une maquette similaire en 2016, sur notre site Paris-Sénart, car il s’agissait à l’époque de l’établissement le mieux fourni en Wifi », raconte Dominique Bugliani.
Ce POC, qui virtualisait les stations Windows d’une salle de classe sur un serveur Dell EMC grâce au logiciel VMware Horizon View, restera en place presque deux ans. « Outre évaluer l’infrastructure nécessaire, un tel test met surtout à l’épreuve la résistance au changement des enseignants. A notre grande satisfaction, nous avons pu constater que les professeurs ont été très enthousiastes et même moteurs pour que nous basculions ce modèle en production. »
Trois nœuds Nutanix, avec GPU NVidia, par site pour un total de 740 stations virtuelles
Début 2018, L’Icam passe donc commande à S-Cube de 21 nœuds Nutanix à raison de trois nœuds sur chacun des six sites français de l’institut, plus trois autres nœuds hébergés par S-Cube lui-même. Ce septième site virtuel sert à fournir des sessions de stations Windows additionnelles lors des forts pics d’activité.
« Nous avions évalué plusieurs solutions techniques qui nous avaient été présentées par des concurrents de S-Cube lors de notre appel d’offres. Nous avons retenu la proposition de S-Cube car, outre leur connaissance du dossier et leur prix plus attractif, leur configuration Nutanix était plus performante que les configurations de marques concurrentes que l’on nous proposait par ailleurs. A mon avis, la supériorité de Nutanix tient dans le fait que la donnée est mieux ordonnée entre les nœuds, au point d’obtenir la rapidité des baies de stockage Flash avec des disques classiques », indique Dominique Bugliani.
Les configurations sont taillées avec suffisamment de processeurs, de RAM, de disques et, surtout, de GPU NVidia Tesla pour exécuter simultanément jusqu’à 740 VM similaires à des stations de travail physiques. Celles-ci sont virtualisées depuis les nœuds d’une part via l’hyperviseur ESXi de VMware pour la partie logique et, d’autre part, par le logiciel vGPU de NVidia qui répartit l’accélération graphique de sorte que chaque étudiant puisse par exemple faire tourner sur son écran une pièce en 3D de manière fluide.
Ils utilisent à distance ces VMs via un client Horizon de VMware capable de présenter les écrans virtuels sans saccade, même au travers d’une connexion 4G ou ADSL. Grâce à ce système, les étudiants peuvent utiliser les logiciels les plus gourmands en puissance depuis un PC, un Mac ou un ChromeBook de base.
« Nous pouvons aussi multiplier plus facilement les postes de CAO dans nos murs. Nous avons par exemple équipé des classes sur notre site de Lille avec des Raspberry Pi à 70€ en guise de stations de travail », lance Dominique Bugliani. Notons que VMware, comme son concurrent Citrix proposent en effet depuis l’année dernière des clients de leurs solutions de VDI pour Raspberry PI – une mini-machine qui coûte 40 fois moins cher qu’une station de travail – et que diverses distributions Linux ont été mises au point pour fournir une solution clés en main. Citons par exemple RPiTC.
Le point clé du projet : adapter le réseau
Le déploiement de la solution a eu lieu lors de l’été 2018. Entre janvier et juillet, l’Icam a surtout passé du temps à résoudre la seule réelle difficulté technique de ce projet : la refonte de son réseau. « Jusqu’ici, chacun de nos sites avait un LAN autonome pour nos postes sédentaires. Il fallait à présent uniformiser un accès pour nos étudiants et nos professeurs qui se connectent de manière nomade, redimensionner nos bornes Wifi internes et enfin interconnecter nos sites avec le celui de S-Cube pour qu’il puisse prendre automatiquement la main en cas de débordement d’activité », explique le responsable de l’Icam.
Il précise que ce projet de virtualisation des stations fait partie d’un plus vaste chantier appelé Campus Numérique et censé donné à tous les utilisateurs l’accès à toutes les ressources de tous les sites de l’Icam. A cette fin, les six campus physiques et le datacenter de S-Cube ont été interconnectés avec une ligne spécialisée à 200 Mbits/s. Un annuaire maître Active Directory a par ailleurs été configuré puis répliqué avec des Active Directory locaux sur chacun des sites. Il permet aux étudiants et aux professeurs, depuis leur client VMware Horizon, de s’authentifier partout avec les mêmes identifiants pour accéder aux mêmes stations virtuelles. L’installation des bornes Wifi, dont le dimensionnement nécessite des mesures précises, est toujours en cours.
Beaucoup de stations virtuelles, mais peu de stockage grâce à App Volume
Par ailleurs, les stations virtuelles sont configurées avec la fonction App Volume de VMware dont le principal intérêt est de n’avoir pas à configurer, maintenir et stocker une machine virtuelle par utilisateur. « Avec App Volume, nous configurons un master pour le système d’exploitation Windows 10 et un disque virtuel pour chaque application. Puis nous paramétrons un profil par utilisateur. Lorsque l’un d’eux se connecte, le système recrée dynamiquement la station de travail virtuelle dont il a besoin, avec la bonne puissance et les bonnes applications », détaille Dominique Bugliani.
Il témoigne que cette technique apporte deux bénéfices : d’une part, elle lui évite de stocker 740 VM de 200 Go chacune ; les sept infrastructures hyperconvergées Nutanix ne contiennent chacune qu’une quarantaine d’images disques. « Et encore. Nous travaillons à uniformiser nos logiciels pour réduire ce nombre et rationaliser nos licences », précise-t-il. D’autre part, le fait de démarrer sur une VM neuve à chaque connexion fait disparaître les résidus logiciels - icônes inattendues sur le bureau, malwares éventuels et autres reconfigurations inappropriées de Windows - qui s’amoncelaient sur les stations physiques.
Les projets et les données des étudiants ne sont pour leur part pas directement stockés sur les infrastructures Nutanix mais sur des espaces Google Drive en cloud, lesquels font partie du package Campus Numérique de l’Icam.
Des utilisateurs satisfaits même s’il reste quelques points techniques à résoudre
Après un premier trimestre d’utilisation, les étudiants saluent cette innovation qui leur permet de travailler sur leurs projets à l’endroit et au moment qu’ils choisissent. « Pour les cours, j'utilise un PC tablette grand public qui est facilement transportable mais assez limité au niveau de la mémoire et de la capacité de calcul. Pouvoir disposer d’une machine virtuelle avec des logiciels 3D qui n’utilisent pas les ressources de mon PC est donc idéal », témoigne par exemple Michaëlla Deniaux, étudiante en 5e année.
Même constat chez les enseignants : « le campus numérique offre confort et gain de temps. Les logiciels sont déjà configurés en fonction des besoins et demandes spécifiques de l’enseignant. Tous les étudiants partagent ainsi une même et unique configuration, ce qui facilite notamment les travaux pratiques et les projets communs », commente Christophe Pennel, responsable de l’Enseignement Supérieur à l’Icam.
Toutefois, les stations de travail physiques n’ont pas encore toutes été démontées. « Dans certains de nos ateliers, les stations pilotent des machines-outils via des cartes Arduino. Or, nous n’avons pas encore trouvé un moyen fiable de connecter ces cartes Arduino aux machines virtuelles », relève Dominique Bugliani.
La solution doit aussi encore mûrir : « Les machines virtuelles plantent régulièrement ; ce n’est pas la faute de la virtualisation, puisque cela arrivait aussi sur les machines physiques. Néanmoins cela nécessite qu’une personne soit disponible à tout moment pour les relancer, y compris le soir et le weekend puisque nos étudiants peuvent travailler depuis chez eux. Nous n’avons pas encore déterminé si nous nous chargerons de cette tâche en interne ou si nous la confierons à S-Cube », ajoute-t-il.
Il n’empêche que l’Icam fait figure d’institut pilote pour la virtualisation des postes de CAO sur un campus. « En à peine quelques mois, nous avons déjà été contactés par de nombreuses autres écoles qui souhaitaient dupliquer notre modèle. Nous le déclinerons bientôt nous-mêmes sur nos antennes à l’étranger. Je sais aussi que notre intégrateur S-Cube a obtenu de Nutanix le prix du meilleur projet européen de l’année grâce à notre déploiement », conclut-il.