Formation immersive : Alstom se met sur les rails du métavers
Après la cession de ses activités énergies, Alstom a dû recréer entièrement son université d’entreprise. L’occasion pour le groupe de digitaliser ses formations. Un virage encore accentué par le recours à la réalité virtuelle, premier pas vers le métavers.
Le métavers appliqué à la formation reste encore un concept. L’usage de la réalité virtuelle est, en revanche, déjà bien présent dans les entreprises, par exemple au sein de SNCF Réseaux, qui développe du contenu immersif pour la formation, la simulation et la conduite de changement.
Pour Thiên-Sinh P, Head of Academy & Customer Services chez l’éditeur Uptale, spécialiste de la formation immersive, « les promesses [des univers virtuels] sont belles, mais il demeure un certain nombre d’obstacles ».
Des obstacles à la massification de la VR en entreprise
Leurs conceptions restent complexes. Les coûts des environnements virtuels pour la formation sont également élevés, et leurs créations longues. Et le déploiement à l’échelle l’est plus encore si les contenus sont exclusifs aux casques de réalité virtuel (VR), ce qui pose aussi des difficultés.
Pour lever ces freins, Uptale a donc développé une plateforme Web fonctionnant en low code pour que les professionnels de la formation et de la conception de supports puissent travailler en autonomie. En outre, les contenus conçus via la solution sont compatibles avec tous les terminaux et s’intègrent aux plateformes d’e-learning (LMS).
Pour l’éditeur, c’est un premier pas vers le métavers. Plusieurs grandes entreprises l’utilisent déjà : Stellantis (150 expériences immersives créées en 3 ans), Michelin, L’Oréal, Total Énergies, Danone, Fnac Darty… ou encore Alstom. Qui en a dit plus sur son projet lors de l’événement IMagine Day Métavers organisée par l’IMA.
Chez Alstom, le recours à la réalité virtuelle et à l’immersion en formation s’inscrit dans une refonte plus profonde de la formation interne par la digitalisation.
Dans l’entreprise, cette digitalisation et l’usage des nouvelles technologies, dont la VR, ont contribué depuis 2015 « à la compétitivité du groupe », explique Franck Gaillard, directeur de la formation pour le groupe Alstom.
Cette compétitivité était d’autant plus critique que l’industriel a fortement changé de visage, après la vente ô combien polémique de ses activités énergies (et corporate) à General Electric. Alstom devient alors un pure-player du transport « avec un enjeu critique, qui est celui de la croissance afin de devenir leader sur ce marché. »
Formation en mode ATAWADAC pour Alstom
Avec cette cession, Alstom a également perdu son université interne d’entreprise. Tout devait donc être recréé.
Une stratégie de formation est alors définie visant à accompagner la politique de croissance de l’entreprise. « Nous ne pouvions pas continuer à réaliser des formations en présentiel pour des dizaines de milliers de collaborateurs partout dans le monde. »
La première étape a donc consisté à numériser la formation, en plus de la recentrer encore plus sur les utilisateurs. Cette philosophie se résume en un acronyme : ATAWADAC (Any Time, AnyWhere, Any Device, Any Content).
Sur l’exercice 2019/2020, ce sont 27 000 collaborateurs qui ont pu être formés.
Parallèlement, Alstom réfléchissait à une nouvelle stratégie prévoyant le recours à la réalité virtuelle et à la réalité étendue. « On ne parlait pas encore de métavers, mais on peut assez facilement considérer que c’est ce qui est dans le viseur », commente Franck Gaillard.
Si le métavers n’est pas encore une réalité tangible, la digitalisation a fait ses preuves à l’occasion des confinements de 2020. Alstom a pu assurer la continuité de sa formation dans le monde. Pas dans tous les domaines cependant.
« Ce n’était pas possible pour les formations techniques, pour du team building, ou de l’événementiel, pour lesquelles, bien que nous soyons déjà très digitalisés, il y avait des limites », ajoute le directeur. Pour y remédier, les RH ont donc cherché à accentuer l’usage des technologies.
80 contenus immersifs en VR
Alstom a ainsi exploité différents outils pour concevoir des contenus immersifs, dont celui de Uptale, et pour organiser de l’événementiel (avec Komodal et Virbela).
Les supports de formation, 80 à ce jour, sont disponibles sur la plateforme LMS du groupe et ainsi accessibles aux 36 000 collaborateurs de l’époque.
Cet effectif est passé à plus de 75 000 depuis le rachat de Bombardier Transport. Grâce au travail d’intégration de l’IT, dès le jour 1 de la fusion, tous les collaborateurs ont pu accéder à l’intégralité des contenus.
À cette occasion, Alstom a organisé un challenge s’appuyant sur des visites virtuelles de sites industriels et des présentations de produits du nouveau groupe. Le digital a ainsi favorisé les liens entre les entités, en plus de réduire les coûts de la formation.
Mais pour Franck Gaillard, les bénéfices résident aussi dans les impacts pédagogiques, environnementaux et de qualité de vie pour les formateurs.
Sur le plan pédagogique, la réalité virtuelle permet un meilleur apprentissage par l’immersion dans des environnements proches des conditions réelles. Elle permet aussi des formations sur des situations présentant des risques, par exemple sur le ferroviaire, avec des gains financiers à la clé.
Alstom engage à présent une nouvelle étape de transformation sur la formation dans le cadre de son université d’entreprise. Le groupe met ainsi en place des campus dans différentes régions du monde. Ceux-ci proposent des « discovery tour de la réalité virtuelle pour s’approprier les outils et les moyens techniques. »
Propos recueillis à l’occasion de la conférence IMagine Day Métavers organisée par l’IMA le 12 octobre 2022.