Golf : la Ryder Cup 2023 bat le record d’installation réseau
Le tournoi international de golf qui s’est tenu le week-end dernier près de Rome a mobilisé 800 bornes Wifi 6E, 200 switches, deux fibres circulaires de plusieurs kilomètres et une infrastructure 5G privée.
Le Marco Simone Golf & Country Club, dans la banlieue de Rome, accueillait la semaine dernière la dernière édition de la coupe de golf Ryder Cup, qui a lieu tous les deux ans, alternativement aux USA et en Europe. Sur le plan technologique, cette compétition s’est traduite par le défi de couvrir 150 hectares de rase campagne italienne en fibres, Wifi et 5G privée.
Il s’agissait de connecter 250 000 personnes sur place, 80 caméras très haute résolution, une salle de presse d’où des centaines de journalistes devaient retransmettre leur reportage et encore des centaines d’objets connectés. Ces derniers allaient des petits buggys permettant aux équipes de se déplacer sur le terrain, jusqu’aux lecteurs de badges RFID pour laisser entrer les personnes dans les différentes zones, en passant par des sondes qui mesurent aussi bien le vent que la densité de la foule.
« Je dirais que la plus grosse différence avec l’édition de 2018, qui se tenait à Paris, est que nous ne nous limitons plus à collecter des informations sur site pour les traiter localement. Cette année, elles partent toutes dans le cloud, vers des serveurs en ligne qui diffusent les vidéos pour les médias, qui servent à alimenter quatre applications mobiles pour les personnes présentes (sportifs, spectateurs, équipes techniques, équipes de sécurité) et qui alimentent des consoles de contrôle au QG opérationnel », lance Michael Cole, le directeur technologique de l’édition européenne de la compétition (en photo en haut de l’article).
« Et puis, aussi, nous collectons beaucoup plus de données qu’auparavant, pour alimenter ces services en cloud qui offrent des fonctions de tableaux de bord et de géolocalisation inédites. Et parce que nos spectateurs filment les événements avec des smartphones en 48 mégapixels. À ce titre, nous avons déployé 800 bornes wifi 6 et 6E sur toute la zone et nous avons triplé notre bande passante vers Internet (soit 20 Gbit/s au lieu de 7 Gbit/s). Je pense que c’est un record pour une compétition », ajoute-t-il en se félicitant d’avoir mis en place la Ryver Cup la plus numérique qui ait existé.
Le fait de mettre toutes les fonctions en cloud réduit aussi de manière drastique l’équipement informatique sur place. « Le cloud évite d’envoyer des baies très lourdes et des équipes d’informaticiens sur les lieux où se déroulent les compétitions. Cela représente des économies très importantes et un avantage considérable en matière de bilan carbone. C’est une vraie révolution dans les événements sportifs », indique notre interlocuteur.
HPE pour l’intégration des équipements et un 5G privée
L’équipementier réseau choisi par la Ryder Cup est HPE Aruba Networking (nouveau nom à rallonge d’Aruba, la division de HPE dédiée aux équipements réseau). Son intérêt est justement la richesse de ses consoles de gestion en cloud.
« Elles nous apportent un haut degré d’information et de contrôle. Grâce à elles, il devient par exemple possible de voir l’utilisation des bornes et autres éléments connectés et nous pouvons intervenir à distance sur leur fonctionnement. Typiquement, nous pouvons mettre en veille certains éléments quand la foule s’en éloigne, ce qui nous fait économiser de l’énergie », dit Michael Cole, en reconnaissant toutefois que cette fonctionnalité, encore un peu avant-gardiste, n’a pas été exploitée au maximum de son potentiel lors de la présente Ryder Cup.
Un autre argument en faveur de HPE est qu’il a racheté récemment l’équipementier Athonet, un spécialiste de la 4G/5G privée, en février dernier.
« Pour les caméras, typiquement, nous avons fait courir deux fibres optiques en cercle tout autour du terrain. Et, à différents points, nous avons installé des cabinets réseau avec des connecteurs Ethernet auxquels sont reliées, en filaire, les caméras et les bornes Wifi. Cela permet de transporter 10 Gbit/s par fibre. Mais, notre problème a été d’enterrer les fibres sur le site, parfois à six mètres sous la surface. Et il faut les déterrer ensuite. C’est très compliqué et parfois ce n’est juste pas possible. »
« Donc, comme il était impossible de tout relier en filaire, nous avons connecté une partie des équipements avec un réseau mobile privé », explique le directeur technologique de la compétition.
Le réseau mobile privé fournit une couverture étendue aux parties les plus éloignées du terrain de golf, ainsi qu’un réseau privé sécurisé dédié au personnel. Il offre de fait une couverture complète du parcours. Pour autant, le réseau mobile privé est moins utilisé comme un réseau de données alternatif – notamment pour relier certaines bornes Wifi –, que comme réseau cellulaire pour des services critiques comme la sécurité, l’intendance, la billetterie et le comptage des points.
Michael Cole fait remarquer que l’une des applications possibles avec un réseau mobile privé, mais qui ne l’est pas avec du Wifi est le « Push-to-Talk ». En clair, il s’agit de simuler du Talkie-walkie pour le personnel. Chaque personnel de sécurité et chaque technicien, par exemple, dispose d’une application sur son smartphone qui lui permet de s’adresser directement à tous les autres membres de son équipe.
« Sans ce réseau radio privé, nous aurions dû passer par les antennes 4G/5G publiques, lesquelles sont forcément sous pression, vu la quantité de spectateurs qui s’y connectent », précise-t-il. LeMagIT apprendra par la suite que le site est couvert en 5G publique par les opérateurs Tim et Vodaphone, lesquels ont eux-mêmes musclé leur infrastructure pour l’événement.
Router et interpréter un maximum d’informations
En pratique, Athonet a installé une antenne 4G/5G sur l’un des toits des installations préfabriquées et chaque appareil s’y connecte au moyen d’une carte SIM dédiée. Cette antenne est pilotée par le serveur Tactical Cube qu’Athonet a mis au point pour faire office de RAN et de cœur de réseau mobile.
Ce réseau mobile privé est soumis en Italie aux mêmes contraintes qu’en France. L’organisateur de l’événement a dû acheter une licence au gouvernement pour couvrir 1 km2 avec une bande de fréquences large de 20 MHz.
En France, cette bande de fréquence se situe aux alentours de 2,6 GHz, ce qui la rend compatible avec tous les appareils 4 G. En Italie, elle se situe aux alentours de 3,8 GHz et n’est donc compatible qu’avec les appareils 5 G. Pour autant, et même si HPE parle ici de « 5G privée », il s’agit d’un réseau mobile privé similaire en termes de performances et de fonctionnalités à celui possible en France.
Les signaux véhiculés par les fibres et le réseau radio convergent vers un total de 200 switches HPE Aruba Networking CX. Ceux-ci routent les données sur site, mais aussi vers le cloud. La connexion Internet est triple : on dénombre deux fibres en 10 Gbit/s chacune vers un opérateur local, plus un modem 5G qui permet de faire remonter les données via les antennes 5G publiques des opérateurs. On note que ce modem est accessoirement alimenté par un panneau solaire pour minimiser la consommation électrique.
Outre router les données, en particulier vers le cloud, ce sont aussi ces switches CX qui décodent les métriques de chaque équipement pour nourrir les consoles de contrôle.
Parmi ces consoles, on trouve HPE Aruba Networking Central (qui identifie les causes des goulets d’étranglement grâce à un moteur d’IA et propose de les résoudre), Clear Pass (qui authentifie de manière sécurisée chaque équipement ou personne connectée) et GreenLake edge-to-cloud (qui assure le pilotage des équipements).
Selon Michael Cole, ces consoles doivent permettre aux équipes techniques d’intervenir en moins de dix minutes pour résoudre une panne ou une congestion.
« Nous avons tout mis en place pour que la Ryder Cup soit un succès sur le plan numérique. Nous devons à présent penser à la prochaine édition. À mon avis, notre prochaine étape sera d’apporter une expérience encore plus immersive. Il s’agira typiquement de visualiser le trajet des balles de golf, que ce soit depuis les caméras officielles, comme depuis les smartphones des spectateurs. Voire de le faire en réalité augmentée », conclut Michael Cole.