Comment Porsche est passé à DevOps (et a contourné la résistance au changement)
L’humain, les processus et les technologies sont les 3 piliers inséparables pour mettre en place une démarche DevOps. Porsche expliquait sa méthode à l’occasion de la conférence PuppetCon.
Quand une entreprise décide de concrétiser ses ambitions en matière de développement agile, il est généralement admis que la réussite de DevOps nécessite clairement une stratégie qui prend en compte à la fois l’humain, les processus et la technologie.
A l’occasion de la PuppetConf qui s’est tenue à la mi-octobre à San Francisco, les participants étaient justement des révélateurs de cette approche, affichant leur expérience, quel que soit leur niveau d’avancement dans DevOps.
L’humain est souvent considéré comme le composant de l’équation DevOps le plus difficile à résoudre. Pas étonnant dès lors que Puppet ait consacré une grand partie des sessions de son événement à conseiller les entreprises sur la nécessité d’insuffler une nouvelle culture d’entreprise.
C’est par exemple le cas de Porsche, le constructeur automobile allemand, qui a détaillé la façon dont il avait résolu ce problème humain dans sa transition vers DevOps.
Pour Thorsten Biel, en charge des services d’intégration et Cloud de Porsche, cette transformation s’inscrit dans une stratégie à plus grande échelle du groupe qui passe par le déploiement d’applications et de services numériques. Le programme Porsche Connects vise en cela à améliorer la précieuse expérience clients des propriétaires de ses couteux véhicules. « Nos équipes IT jouent un rôle clé dans cette transformation », affirme-t-il. « Nous passons d’une entreprise qui agissait en réaction à une plus pro-active, innovante et centrée sur l’expérience cliente. »
Dans le cadre de ces travaux, son équipe a déjà modifié son organisation pour devenir plus agile, tout en accompagnant Porsche vers le Cloud pour ses applications de vente et de relation client.
Le Cloud pour renforcer à la proximité avec le client
Le constructeur s’adosse actuellement à un datacenter en Allemagne pour tous ses services dans le monde, ce qui peut poser des problèmes de latence et de performance. « La latence entre l’Allemagne et des pays comme l’Australie et le Chine, là où sont aussi nos client, est particulièrement élevée. Placer l’application dans le Cloud résout ce problème. Nous rapprochons l’application de nos clients », note-t-il.
Ces changements ont pris du temps. Thorsten Biel évoque notamment des problèmes de culture, comme l’un des éléments les plus bloquants. « Mon équipe a déjà adopté des processus agiles. Nous sommes allés loin dans l’automatisation, mais ceux qui ne connaissent pas les méthodes agiles et travaillent de la même façon depuis de nombreuses années ont quelques réserves quant ces changements. »
Ces trois principes (humain, processus et technologie) sont au cœur de la transformation de Porsche. D’ailleurs, « impossible de mettre en application l’un sans les deux autres si vous voulez avoir une démarche DevOps réussie », explique-t-il partageant son expérience. Selon lui, il ne s’agit pas de missionner des personnes pour l’adoption de DevOps, mais en revanche, créer une culture de la confiance dans l’IT semble plus propice à une bonne mise en place du concept.
« Nous avons justement ré-organisé notre équipe pour créer cette culture de confiance. Nous avons donc créé une équipe de promotion de DevOps, composée d’architectes, de chefs de projets, de consultants techniques capables de dialoguer avec d’autres développeurs et chefs de projets et de les accompagner à déployer leurs projets avec à l’esprit, une démarche DevOps », ajoute-t-il.
« Avoir été capable de créer une équipe de promotion DevOps, de revoir nos processus et d’optimiser notre capacité d’automatisation nous a permis de nous transformer comme jamais auparavant », poursuit-il.
Pourquoi résister ?
« La résistance au changement rencontrée par Porsche dans les premiers jours de sa transformation vers DevOps est compréhensible », reconnait Nigel Kersten, en charge de la stratégie chez Puppet. Selon lui, la meilleure chose à faire dans ce cas est de comprendre les raisons du blocage. « Si vous avez passé 30 ans à faire le même travail, avec la même méthode, nous devons faire de l’empathie car le changement est en effet difficile », soutient-il. Il se peut que les personnes ne comprennent pas le futur de leur poste, sous un modèle DevOps.
« D’une certaine façon, le terme DevOps génère de la peur chez les ops, car ils se demandent s’ils doivent aussi devenir développeur. Ils se disent : ‘en tant qu’ops, nous écrivons déjà du code, des fichiers batch, des scripts shell et de configurations pour les imprimantes, mais nous ne le vivons pas comme de la programmation ou du développement’ », rapporte le responsable.
« Personne ne s’attend à ce qu’un sysadmin devienne architecte, mais vous devez connaître un peu le développement et les principes de l’ingénierie logicielle. En réalité, si vous apprenez quelques-uns de ces concepts, ce que vous faites déjà peut devenir plus facile et plus complet et enfin, plus fiable », explique encore Nigel Kersten.
DevOps et la technologie
La partie technologique d’une transition vers DevOps est souvent considérée comme relativement facile à mettre en place, comparée aux parties humains et processus. Mais c’est sans compter sur le fait que beaucoup d’entreprises composent avec des environnements IT hétérogènes très complexes, composés par exemple de solutions hybrides, multi-fournisseurs. Sans parler des expérimentations autour des containers et autres outils destinés à moderniser l’IT.
Avec de tels dispositifs, les équipes opérationnelles ont du mal à automatiser leur IT et à adopter les principes de IaC (Infrastructure as Code), considérée comme un must pour accélérer les développements et les cycles de delivery.
Et justement. A l’occasion de cet événement, Puppet a présenté une version de test de son outil Discovery, conçu pour donner des indicateurs en temps réel sur les performances de l’infrastructure. Un tableau de bord détaille le nombre de serveurs actifs, le placement des instances Cloud et permet de suivre les modifications de fichiers par exemple. La solution est optimisée pour vSphere, AWS et Azure. Le support de Google Cloud est prévu par Puppet.
Du scaling-up avec l’automatisation
L’automatisation est d’ailleurs au cœur du discours de Sanjay Mirchandani, président de CEO de Puppet, comme la conférence a pu le réveler. Et donc du portefeuille de la société. Cela passe par exemple par Puppet Tasks, une gamme de produits pour aider les entreprises à automatiser leur infrastructure et leurs applications. Cela comprend Puppet Bolt, pour les entreprises qui démarrent dans l’automatisation de processus ou s’adossent à des petites infrastructures avec des processus ad-hoc.
« Je parle à des DSI tous les jours et les conversations autour de DevOps et de l’automatisation portent sur l’expansion de certains projets à l’ensemble de l’entreprise », explique le CEO. Cela est plus simple pour les entreprises nées avec le Cloud, ajoute-t-il, car elles n’ont pas à digérer le très contraignant legacy.
L’automatisation inquiète
L’automatisation peut être d’une grande aide, car cela apporte de la cohérence et des capacités d’anticipation dans la création d’environnements de déploiement.Toutefois, la volonté de Puppet de devenir omniprésent dans l’infrastructure et les applications pourrait bien inquiéter les DSI, craignant pour la pérennité de leurs postes. « On demande à tous de faire toujours plus et l’automatisation ne va pas contribuer à supprimer des emplois. Cela va en fait vous permettre de faire ce que souhaitent les métiers », affirme enfin Nigel Kersten.