Comment Axa bascule ses « datas » décisionnelles dans le cloud
Partenaire de longue date avec Microsoft, Axa a choisi Azure pour basculer l’ensemble de ses données décisionnelles et Big Data dans le cloud. Un projet titanesque engagé voici deux ans et qui verra la plateforme Axa Shine devenir le hub de données standard pour toutes les entités du groupe.
Classé 46e au Top 500 des entreprises, Axa est le numéro 1 mondial de l’assurance et, comme toutes les grandes entreprises, a placé ce que l’on appelle aujourd’hui la « Data » au cœur de sa stratégie de transformation. Néanmoins, la donnée est loin d’être une thématique nouvelle pour l’assureur.
L’entreprise qui compte plus de 160 000 collaborateurs a mis en place son premier infocentre en 2005 et a initié une stratégie Big Data en 2015 avec des cas d’usage tels que la lutte contre la fraude, la télématique et la mise en place d’une approche Self-BI pour ses utilisateurs métiers. Partenaire Microsoft, Axa a déployé au fil des années une quarantaine d’applications métiers sur sa plateforme décisionnelle Microsoft et plus de 1 000 rapports pour plus de 22 000 utilisateurs.
En outre, la plateforme leur propose plus de 60 cubes multidimensionnels, avec 900 dimensions en production. Ce sont en tout 12 To de données qui sont stockées sur une plateforme on-premise, et le moteur d’intégration et de transformation accède à 2 500 sources de données. Pour la partie Data Lake de l’infrastructure Axa, celle-ci a été construite sur des briques technologies Cloudera et Spark. Le Data Lake stocke 600 To de données dans environ 62 000 tables et plus de 500 conteneurs de base de données. Son moteur d’intégration de données lui permet d’accéder à 4 000 sources environ.
Une plateforme « Next Gen » pour préparer l’avenir
Aussi puissante soit-elle, cette plateforme commençait à accuser le poids des ans et en 2020 Axa franchit une nouvelle étape en mettant une place une plateforme Data « Next Gen ». Baptisée Shine, cette plateforme intègre à la fois des capacités Big Data et décisionnelles, et doit pouvoir être rapidement instanciée sur différentes zones géographiques.
Sylvain MathevetEn charge des plateformes, AXA Group Operations
Sylvain Mathevet, en charge des plateformes chez AXA Group Operations, explique ce qui a motivé le projet : « Le premier moteur au lancement du projet Shine était l’obsolescence des plateformes. Certaines étaient très anciennes, notamment la plateforme BI qui datait de 2005 et il fallait moderniser le reporting qui était on-premise. Le deuxième moteur consistait dans le désalignement entre la plateforme et les besoins des utilisateurs en termes d’autonomie et d’innovation de “Time to Market”, la qualité de service et la montée en charge ainsi qu’un désalignement avec les régulations locales auxquelles les solutions en place ne nous permettaient pas de répondre. »
Parmi les autres points qui ont fait pencher la balance en faveur d’un renouvellement de la plateforme de données, la stratégie du groupe Axa qui vise à basculer petit à petit les systèmes legacy et la data vers le cloud, un dernier objectif étant de diminuer les coûts de l’infrastructure IT. Autant de points qui ont poussé AXA Group Operations à concevoir Axa Shine, une plateforme Data s’appuyant à 100 % sur Microsoft Azure, et amenée à être déployée dans toutes les entités du groupe qui en émettront le besoin.
Sylvain Mathevet résume ce en quoi consiste cette plateforme de nouvelle génération : « Shine regroupe des fonctionnalités et des accélérateurs bâtis sur les différents services délivrés par Microsoft Azure. Ces accélérateurs sont compatibles avec les exigences de sécurité et de conformité du groupe et visent à couvrir les besoins de 3 grands types d’utilisateurs : les utilisateurs finaux avec des fonctions de BI, d’analytique, de Data Science, les responsables IT en charge de la maintenance et des opérations autour des applications Data, et enfin les développeurs. »
Techniquement, pour son volet Business Intelligence, analytique et data science, Shine met en œuvre des notebooks Databricks, Power BI et la suite Office 365 pour la restitution. Les cubes de données sont chargés sur Azure Analysis Services et le stockage des données est assuré soit sur Azure Data Lake Store, soit en fichiers au format Parquet.
Pour les transformations de données, Shine délivre des services d’ingestion de données, de transformation, et de travail sur la qualité s’appuyant sur Azure Data Factory, Azure Event Hub et Databricks. Enfin, les fonctions transverses mettent en œuvre plusieurs briques Azure, dont Azure DevOps. Pour chapeauter le tout, Axa a développé une interface d’administration, un moteur générique de préparation de données et un « blueprint » qui permet d’instancier la plateforme via Azure DevOps pour avoir un déploiement très rapide.
Une plateforme prête à être instanciée à la demande
En effet, le parti pris d’Axa Shine n’est pas de faire converger toutes les données au niveau mondial sur une plateforme unique, mais bien d’instancier la plateforme en fonction des besoins de chaque entité. Axa est un groupe très décentralisé avec de multiples entités et chacune d’elles dispose d’une équipe qui va vouloir utiliser la plateforme. Celle-ci permet aux entités du groupe d’être complètement autonomes sur 3 grands usages : l’accès aux données par les utilisateurs finaux, le développement d’applications analytiques et l’exploitation au quotidien de ces applications.
Sylvain MathevetAXA Group Operations
La plateforme se compose globalement de 3 catégories de modules. Au cœur de Shine, les fonctions d’automatisation, de monitoring, de conformité et de sécurité. Au-dessus de ces briques de base viennent se positionner les fonctions liées à la donnée elle-même, avec le Master Data Management, la Data Preparation, le stockage dans le Data Lake, le streaming de données et la gouvernance.
Enfin, au-dessus viennent se placer les cas d’usage avec le reporting, la Data Science, la notion de Data Lab et demain le Machine Learning, etc. Axa Shine se présente comme un framework complet avec le stockage, et de traitement des données avec un volet automatisation, des moteurs d’intégration de données automatiques, des fonctions de Business Intelligence Self-Service pour ses utilisateurs et des fonctions d’administration des ressources accessibles via API ou un portail dédié.
Enfin, une console développée spécifiquement par Axa permet de piloter l’ensemble de la plateforme afin de lever toute la complexité inhérente au portail Azure. « Le portail Azure demande une vraie expertise pour savoir comment activer les ressources recherchées, les paramétrer, arrêter et redémarrer des serveurs. Nous avons rendu tout cela beaucoup plus accessible. Avec la Shine Console, un utilisateur qui ne connaît pas Azure Web Portal va pouvoir piloter ses applications, en fonction des droits qui lui ont été attribués. », explique Sylvain Mathevet.
Une conception progressive directement liée aux premiers cas d’usage
Sylvain MathevetAXA Group Operations
La conception d’Axa Shine a demandé de 4 à 6 mois de travail sur le design de l’architecture, avec une validation par les architectes du groupe, ainsi que les entités elles-mêmes. Le développement des premières fonctionnalités a été lancé en mode agile avec un premier projet business pilote du développement.
« Plutôt qu’une approche Big Bang, nous avons eu une approche itérative où nous avons ajouté des fonctionnalités à notre framework tout en développant de premiers cas d’usage. Ceux-ci ont eux-mêmes donné lieu au développement de nouvelles fonctionnalités dans le framework et c’est ainsi que le backlog des fonctionnalités du cœur de Shine s’est alimenté au fur et à mesure du projet. », raconte Sylvain Mathevet.
Ce n’est que lorsque l’équipe projet a considéré que le cœur de la plateforme était suffisamment stable, que les chantiers de migration de l’existant ont pu être lancés afin de migrer l’ancienne plateforme Data vers le cloud. Cette approche progressive et itérative qui a privilégié le co-design et parfois le codéveloppement avec les entités du groupe a représenté près de deux années de travail.
Tout cela pour aboutir à la plateforme Axa Shine actuelle, sachant qu’Axa a dû monter en compétence sur Microsoft Azure en parallèle, comme l’indique Sylvain Mathevet : « Au lancement du projet, personne ne maîtrisait véritablement les capacités d’Azure, nous avons donc créé une équipe commune Axa/Microsoft pour déployer rapidement un premier framework et ensuite effectuer un transfert de compétences sur les équipes internes. »
Actuellement, la maturité de la plateforme et les outils développés par Axa permettent à une entité de déployer intégralement Shine en une dizaine de jours seulement. Ensuite, provisionner un serveur se fait en un clic.
Sylvain MathevetAXA Group Operations
Outre ce Time-to-Market accordé aux métiers, Sylvain Mathevet estime que Shine est aussi un outil de maîtrise des coûts : « Un rapport donne en quasi-temps réel la consommation des ressources Azure jusqu’au niveau applicatif. Un responsable de département d’une entité qui exploite plusieurs applications va avoir une vision fine sur chaque application de la consommation des ressources et donc du coût associé. Et il va pouvoir engager des actions de réajustement ou de redesign pour optimiser sa consommation de ressources. »
La réduction des coûts de fonctionnement pour les entités est estimée à 20 % à 30 % à périmètre constant. Enfin, le responsable estime que Shine constitue une forte valeur ajoutée pour les utilisateurs, par son intégration avec tout l’environnement Azure, dont 365, mais aussi le Machine Learning, Azure Data Hub, etc. Un moyen pour l’assureur d’être certain de pouvoir faire face aux besoins futurs de ses utilisateurs en intégrant de nouvelles briques fonctionnelles très rapidement.
Le responsable de la Data estime que la plateforme Shine a d’ores et déjà rencontré un grand succès dans le groupe. 16 applications sont actuellement en production sur Shine, soit plus de 5 000 utilisateurs et 24 projets sont en cours de déploiement. Une dizaine d’entités ont déployé la plateforme ou sont en cours de déploiement. La migration du reporting et du Data Lake existant devrait être menée d’ici la fin de l’année 2020.