Trois étapes importantes pour bien débuter avec l’IA
L’Intelligence Artificielle n’est pas si simple à mettre en place dans une organisation. Elle demande de penser différemment, de bien comprendre ce qu’elle peut faire, et de ne pas négliger les données. Voici trois conseils pour partir sur de bonnes bases.
Développer une application à base d’Intelligence Artificielle demande une logique bien différente de celle de la programmation traditionnelle. Au fur et à mesure que l’IA s’impose dans de nombreux secteurs d’activité (si ce n’est tous les secteurs), votre entreprise va devoir apprendre à « penser IA » pour vraiment se familiariser avec ces technologies.
L’IA est parfois appelée « logiciel 2.0 » en raison de la façon fondamentalement différente dont elle est programmée. Au lieu de dire à l’ordinateur ce qu’il doit faire, il faut laisser l’ordinateur apprendre par lui-même. Pour le rendre « plus intelligent », il suffit de lui fournir des données (nombreuses et de qualité) d’entraînement. Puis l’IA se « programme » toute seule en détectant les tendances dans cet ensemble de données.
Pour cette raison, il est aussi parfois difficile de savoir ce que l’IA a réellement appris. Il y a eu des cas où une IA entraînée pour détecter des moutons a appris à détecter de l’herbe. L’exemple est drôle, mais il existe des cas, où l’IA reproduit – voire crée – des biais racistes ou sexistes dans l’algorithme, là où ils sont difficiles à détecter.
Il est donc important de bien comprendre comment appréhender l’IA. Voici trois conseils pour vous aider à débuter.
1. Ayez des attentes réalistes sur ce que l’IA peut (et ne peut) pas faire pour votre entreprise.
Première chose, vous devez avoir des attentes raisonnables sur ce que l’IA peut faire pour vous.
Malheureusement, le battage médiatique et marketing des éditeurs rend difficile un jugement raisonné. Les articles concernant une apocalypse économique provoquée par l’IA, par exemple, rendent les machines beaucoup plus intelligentes qu’elles ne le sont, ce qui conduit à des attentes erronées.
Autre point à avoir en tête : la plupart des projets mesurent les résultats de l’IA en fonction de sa précision par rapport à la performance humaine dans une situation identique. Mais ce n’est pas suffisant.
Un réseau neuronal, par exemple, peut détecter un cancer dans une radio avec une précision de 94 %, battant ainsi les radiologistes humains. Mais si le domaine médical a effectivement besoin d’une IA super-précise, ce n’est pas forcément le cas de toutes les industries. Un moteur de recommandation de contenus, par exemple, serait parfait avec un taux de précision de 80 %.
« L’IA peut être considérée comme bonne, même si elle ne fournit une augmentation que de 2 % ou si elle n’est précise qu’à 30 % », affirme Xun Wang, directeur technique chez Bloomreach, une plateforme « d’expérience digitale basée sur l’IA ».
« La question n’est pas de savoir si ces chiffres sont assez gros, mais comment utiliser une technologie ou un composant d’IA dans un système plus large pour initier une amélioration progressive ».
L’indicateur pertinent n’est donc pas le pourcentage d’exactitude de l’IA en lui-même, mais plutôt dans quelle mesure elle aide votre entreprise. Au lieu de s’attendre ou de craindre que l’IA remplace votre personnel, une vraie mesure serait plutôt de voir comment elle les augmente, c’est-à-dire comme elle peut faciliter leur travail, améliorer leur précision et leur libérer du temps.
2. Trouver la valeur dans les données de l’entreprise
Pour commencer à utiliser l’intelligence artificielle, vous avez besoin de données de qualité. Cela peut paraître évident, mais il est surprenant de voir combien de fois l’étape de la collecte des données est ignorée, certainement parce que beaucoup de personnes ne « pensent pas encore IA ».
Pour penser IA, les DSI doivent étudier les processus de leur entreprise, lister les données qu’ils collectent (ou celles qu’ils auront besoin de collecter) et trouver des moyens ad hoc pour optimiser l’entreprise avec l’IA.
Ces données peuvent se trouver dans votre CRM, dans les logs de votre site Web ou dans les tickets d’assistance. En pensant IA, vous commencerez à voir ces données différemment. Ce n’est plus le contenu de ces données qui compte, mais les modèles et les caractéristiques que vous pourrez en extraire.
Par « données », nous n’entendons pas seulement la ventilation démographie ou le comportement de navigation. L’IA est incroyablement stupide dans le sens où elle n’a aucune idée de ce qu’elle fait, mais elle est aussi extrêmement maline pour détecter des schémas récurrents auxquels nous n’aurions pas pensé. Ce qui manque de compréhension humaine à l’IA, elle le compense en rapidité de traitement.
Par exemple, dans le domaine de la compréhension du langage naturel, les chercheurs ont alimenté l’IA avec des gigaoctets de texte. Leur but était de faire en sorte que l’IA trouve des similitudes et des relations entre les mots – par exemple, le fait que la relation entre « femme » et « homme » a une structure similaire à celle entre « reine » et « roi ». Début juillet, les scientifiques ont transposé ce mécanisme de corrélation dans un tout autre domaine : pour étudier des tonnes de résumés scientifiques afin de découvrir des composés chimiques jusqu’alors négligés.
L’apport de l’IA permet d’explorer les données à la recherche de potentiels inexploités. Par exemple, on peut imaginer un système de support qui recommanderait des solutions aux problèmes des utilisateurs avant qu’ils n’envoient quoi que ce soit aux opérateurs, en fonction du contexte de ce qu’ils écrivent et pas seulement de mots-clés. Ou par l’analyse des sentiments, détecter la gravité des problèmes des clients et affecter des agents aux profils seniors aux cas les plus urgents.
Bien sûr, il y aura toujours des cas où vous trouverez un besoin auquel l’IA pourra répondre, mais pour lesquels vous n’aurez pas les données nécessaires. Dans ces cas, vous pouvez soit lancer un projet pour commencer à collecter ces nouvelles données en interne, soit les acquérir ou acheter les données auprès de sources tierces pour débuter plus rapidement.
3. Commencez par des algorithmes simples
Lorsque vous commencez avec l’IA, il est important de penser petit.
« Partez des processus qui comportent le moins d’obstacles ou d’inertie à surmonter et ceux qui permettent les meilleurs résultats et les plus mesurables », recommande Ruslan Gavrilyuk, cofondateur et président de TeqAtlas, spécialiste et évangéliste des technologies émergentes. « Commencez petit, automatisez un processus à la fois et ne passez à une autre étape qu’après des résultats visibles ».
Ruslan GavrilyukCofondateur et président, TeqAtlas
L’une des raisons de commencer petit est liée à la nécessité d’entraîner l’IA. Rien n’est plus frustrant que passer des heures voire des jours à entraîner un algorithme et de se rendre compte au final que les résultats ne sont pas fiables. Pour cette raison, il est bienvenu de commencer avec des algorithmes simples. Du fait qu’ils s’entraînent beaucoup plus rapidement, ces algorithmes permettent de voir si vous êtes sur la bonne voie sans attendre un délai trop long.
« N’oubliez pas qu’il faut du temps pour obtenir des résultats visibles, sans même parler de ROI », poursuit Ruslan Gavrilyuk. Ne vous lancez donc pas directement dans le Deep Learning ou dans la création de réseaux neuronaux convolutifs dès votre premier essai.
De même, votre équipe IA devra préparer les données, ce qui est beaucoup plus facile à dire qu’à faire. Pour reprendre une maxime souvent citée dans le monde de la BI : « garbage in, garbage out ». On ne le répétera jamais assez, la qualité des données est importante. Quand Open AI a formé son « monstrueux » modèle GPT-2, il ne s’est appuyé que sur les articles les mieux notés sur Reddit.
Enfin, pendant l’entraînement, vos développeurs devront aussi jeter un d’œil à la façon dont le modèle comprend les données. Regarder sous le capot permet de voir si l’IA fait bien ce que vous attendez d’elle (ce qui est plus aisé avec des algorithmes simples).
Ce n’est qu’une fois que les données sont propres et que l’algorithme est assez bien compris que vous pourrez tenter de l’optimiser en passant à des IA plus avancées – comme les réseaux neuronaux convolutifs ou récurrents. Et lorsque vous en serez là, Ruslan Gavrilyuk recommande de « louer de la puissance de calcul et du stockage, plutôt que de l’acheter et de l’entretenir ».