Stratégie IA : les cinq bonnes habitudes pour la mener à bien (Gartner)
En ce début d’année – malgré un contexte particulier – il est toujours bienvenu de prendre de bonnes résolutions. Lors de son Symposium, Gartner a recommandé aux entreprises cinq habitudes afin d’assurer le succès de leur stratégie IA.
« Si vous vous les appropriez, si vous les utilisez, si vous les documentez pour chaque aspect de votre organisation, cela fera largement la différence », vante Whit Andrews, vice-président et analyste émérite chez le cabinet de conseils Gartner.
Ces cinq habitudes mises en exergue par Gartner sont associées à trois catégories essentielles pour bâtir une stratégie IA : la variété, la formalité et l’harmonie.
Variété : constituer des équipes interdisciplinaires…
La première habitude à prendre, selon Whit Andrews, vise à constituer des équipes interdisciplinaires. « Les entreprises qui pensent que leur stratégie IA est fortement alignée avec leur démarche économique et apporte une valeur ajoutée composent des équipes IA avec des rôles variés, pour chaque projet qu’elles mènent », note-t-il. Gartner estime que ces entreprises prêtes pour l’IA ont 14 % de fonctions différentes en plus dans leurs équipes de data science.
… également en dehors de la data science
Mais cette nécessité de pluralité implique une autre méthode grandement recommandée par l’analyste. Il ne s’agit pas seulement de rassembler des spécialistes de la donnée comme des data scientists, des ingénieurs en machine learning ou des data analysts. « Les membres d’une équipe doivent venir de diverses parties d’une organisation. Ils ont besoin d’avoir des compétences, des antécédents diversifiés pour améliorer l’expérience utilisateur et la valeur apportée par l’IA aux clients », conseille le chercheur de Gartner.
Whit Andrews constate que les entreprises qui prennent l’IA à bras-le-corps comptent dans leurs équipes des chefs de projets, des stratèges, des designers et parfois des experts en cybersécurité. « Cette variété est un moyen pour qu’une stratégie IA ait un réel impact », assure-t-il.
Formalité : insuffler une gouvernance à la stratégie IA…
La troisième habitude s’inscrit dans la catégorie « formalité ». Car si la variété est importante, « nous ne devons pas en perdre le contrôle ». Il s’agit de fournir une gouvernance, un cadre pour éviter que les intentions dérivent, sachant que 75 % des projets d’IA ne dépassent pas le stade du POC, selon les observations du cabinet d’analyse.
Cet encadrement doit passer par l’implication des plus hauts dirigeants, que ce soit en matière de stratégie et de financement. « Les entreprises qui décident de leurs budgets IA auprès de la direction (C-level en VO) sont deux fois plus susceptibles d’atteindre le quatrième le niveau de maturité de l’intelligence artificielle », estime Whit Andrews. « Les projets doivent être présidés par un responsable haut placé qui connaît les enjeux de l’IA au sein de son entreprise et qui a le pouvoir de décision financier », ajoute-t-il.
… qui passe par l’analyse des risques financiers
De cette assomption découle une quatrième habitude : mesurer l’impact économique de l’IA au sein de l’entreprise. « Nous estimons que 51 % des sociétés qui examinent l’aspect et les risques financiers que pose l’IA sont plus à même de mener à bien leurs projets que celles qui ne le font pas », récite Whit Andrews. Là encore, le concept de variété, de pluralité, prend toute son importance, car cette mesure économique provient généralement du fait que les organisations concernées multiplient les programmes avec des équipes interdisciplinaires.
« Si l’on applique cette méthode organisationnelle [la combinaison des quatre habitudes déjà décrites], toutes les personnes impliquées peuvent constater à quel point un projet est pertinent à leur niveau », assure-t-il. Whit Andrews illustre son propos par l’exemple d’un algorithme d’analyse d’images dédié à la sécurité qui, s’il est connu des principaux intéressés dans la compagnie, peut être réutilisé pour d’autres usages, comme l’évaluation de la force d’une marque sur le Web.
« Je ne dis pas que chaque projet doit obligatoirement garantir un retour sur investissement. En réalité, beaucoup d’entreprises se lancent dans l’IA en supposant qu’il n’y ait pas d’impact positif, mais vous devez être capable de mesurer ces effets et comprendre ce qu’il est possible de faire avec ».
Harmonie : réduire au maximum les Proof of concepts
La cinquième habitude doit apporter une forme d’harmonie dans une stratégie IA. Selon Gartner, ce serait en réduisant au maximum le nombre de proof of concepts que l’on généralise l’utilisation de l’intelligence artificielle. « C’est intéressant, car jusqu’alors la plupart des observateurs conseillaient d’essayer le plus de choses possible afin de constater ce qui fonctionne. Ensuite, il fallait se concentrer dans le domaine ou le cas d’usage où l’IA était la plus pertinente », commente Whit Andrews. « La situation a changé : les budgets ont changé, les stratégies ont changé, et la manière dont les entreprises abordent l’IA a également évolué pour de bonnes raisons ».
Whit AndrewsVice-président et analyste émérite, Gartner
Les entreprises seraient désormais plus à même de juger, avant même de lancer un projet, et d’évaluer si des algorithmes de machine learning répondront à un problème spécifique. Il faudrait alors « restreindre ses ambitions », mais le faire intelligemment en appliquant les quatre pratiques précédentes.
En résumé, l’interdisciplinarité des équipes IA – et leur connaissance de différents domaines d’expertise de la société – associée à la prise de décision par les dirigeants permettrait de mieux comprendre les possibles impacts d’un cas d’usage de l’IA et donc d’éviter les investissements inutiles. « Les entreprises qui recourent à l’IA en production réalisent 20 % de POC en moins que les autres. Cela signifie qu’une sélection rigoureuse des projets candidats apporte des bénéfices substantiels », martèle l’analyste.
Selon Whit Andrews, cette approche doit être intentionnelle pour que la combinaison des catégories listées ci-dessus prenne effet. En l’occurrence, certains groupes comme France Télévisions appliquent déjà, sans le formaliser ainsi, ces habitudes. Mais c’est une autre histoire que nous vous conterons plus tard.