Quelques pistes pour rénover les datacenters
Les responsables des infrastructures et des opérations, déjà en quête de solutions de croissance, se tournent de plus en plus vers des idées et des technologies novatrices.
Meilleure capacité, intégration de services métiers innovants, réduction des coûts opérationnels… avec la bonne approche, l'infrastructure en place dans le datacenter peut évoluer. Ainsi, les entreprises qui conservent des applications sur site devront envisager une restructuration de l'infrastructure physique pour améliorer l'efficacité et prolonger la durée de vie de leurs salles informatiques.
Les responsables des infrastructures et des opérations se focalisent généralement sur la migration dans le cloud, les stratégies dites de Edge computing et le rapprochement des applications au plus près des utilisateurs. Mais c’est oublier qu’il est possible de conserver des applications essentielles en local. Bien que contre-intuitif, l’investissement en continu dans un datacenter traditionnel offre des avantages à court et à long termes.
Trois leviers permettent d'optimiser les centres existants pour y intégrer de nouveaux services métiers : améliorer leurs performances, optimiser l'espace et modifier l'infrastructure.
Améliorer les performances
Dans les datacenters qui approchent leur limite de capacité, l'espace et la puissance électrique sont les principaux freins à l'ajout de matériel ou d'infrastructures de refroidissement adaptées. Le choix s'oriente donc souvent vers la création d'un datacenter nouvelle génération qui assure une croissance à plus long terme ou vers l'utilisation de services à la demande (colocation, cloud, hébergement). Bien que viables, ces options, qui impliquent d'externaliser les charges de travail, comportent des risques et compliquent l'environnement d'exploitation.
Une alternative pérenne consiste à utiliser des armoires rack autonomes. Ces armoires intègrent plusieurs baies ou racks qui supportent des charges de moyenne à haute densité. L'ajout d'un mécanisme interne de refroidissement, la mise à niveau ou le recyclage des racks haute densité à refroidissement autonome sont souvent des réponses simples et efficaces au manque d'espace.
Optimiser l'espace
La solution de modernisation la moins contraignante consiste à faire de la place pour une armoire rack autonome, puis à réorganiser l'espace en de plus petites zones avant de le réaménager. Ces armoires autonomes doivent en principe être branchées sur une unité de distribution d'alimentation (un PDU) et nécessitent parfois une unité de refroidissement ou de distribution de réfrigérant. Vous devrez compter 20 % d'espace supplémentaire par module pour ces équipements.
Les systèmes de refroidissement intégrés au rack sont autonomes et n'imposent ni confinement ni configuration en allée chaude/allée froide, ce qui offre plus de liberté pour disposer les nouveaux racks.
Après l'implantation commence la migration échelonnée des applications. Cette opération ne peut pas se faire à l'identique, car les armoires rack ont une densité de refroidissement supérieure. Dans un datacenter, un rack est souvent utilisé à la moitié de sa capacité (en moyenne à 50 ou 60 %) pour éviter de créer des points chauds au sol. Les racks autonomes permettent de migrer 40 à 50 % de charges de travail en plus. Par exemple, un nouveau module autonome quatre baies peut absorber les charges de travail de six à huit racks, sans agrandir la salle. Il est donc peu probable que les applications déplacées dans un nouveau module proviennent des mêmes racks, et la plus ancienne section de la zone serveur sera largement fragmentée.
L'étape suivante consiste à rationaliser l'environnement en déplaçant les charges de travail des racks sous-utilisés pour libérer encore plus d'espace au sol. Puis vient le tour du déménagement de l'équipement et du dégagement de la zone suivante pour permettre l'installation d'un nouveau rack autonome. La densité globale de traitement par rack augmente à chaque nouvelle unité installée et le ratio puissance au mètre carré/empreinte globale s'inverse : la première augmente largement et la seconde diminue. Il peut être intéressant de profiter de la migration pour changer les serveurs, suivant leur stade de cycle de vie.
Des serveurs moins encombrants permettent de densifier les racks et de diminuer les besoins en électricité et en refroidissement. Encore faut-il que la puissance en entrée du datacenter soit adaptée aux racks à haute densité… Lorsqu'un volume important de charges de travail est migré dans les racks à haute densité, la charge de refroidissement globale diminue, car une grande partie du flux de refroidissement est gérée dans le rack et non plus dans le datacenter.
Modifier l'infrastructure
Les puces nouvelle génération abaissent l'émission de chaleur des processeurs, mais la densification des équipements due à l'augmentation de la puissance de traitement accroît les besoins en refroidissement… Face à l'afflux de serveurs haute densité, les responsables des infrastructures et des opérations doivent adapter le refroidissement des salles informatiques.
Les systèmes de refroidissement par liquide ou immersif permettent de mettre à niveau des datacenters à très forte densité soumis à des contraintes d'espace, par exemple pour intégrer des applications de supercalcul ou d'intelligence artificielle. Selon les prévisions de Gartner, d'ici à 2025, les coûts opérationnels des datacenters dotés de solutions de refroidissement et de densité spécialisées diminueront de 20 à 40 %. C'est l'un des sujets abordés dans le cadre de la conférence Gartner IT Infrastructure, Operations & Cloud Strategies Conference en novembre 2021. Le refroidissement compte pour 60 à 65 % de la consommation d'énergie totale d'un datacenter. Des racks très haute densité – de 15 à 25 kW – exigent souvent une charge de climatisation supérieure à 1,5 kW par kW de charge informatique, simplement pour créer le flux d'air froid nécessaire.
Les échangeurs thermiques à porte arrière ou RDHx (rear-door heat exchangers) sont des portes de racks remplaçables sur site (en général) qui refroidissent l'air chaud sortant par la porte du rack au lieu d'utiliser le flux d'air du datacenter. Les RDHx présentent un double avantage : les racks sont plus efficaces et l'énergie – au lieu d'être intégralement consommée pour la climatisation – peut servir aux équipements pour d'autres systèmes des bâtiments ou être réinjectée comme charge informatique supplémentaire. Fujitsu, Vertiv, Schneider Electric, Nortek Air Solutions, Cool IT Systems et Opticool sont des fournisseurs de RDHx.
Le refroidissement par liquide permet de résoudre la question de la climatisation des serveurs haute densité, car le transfert thermique par l'eau (refroidissement par conduction) est de l'ordre de 3 000 fois supérieur comparé à l'air et exige moins d'énergie. Ce type de refroidissement permet d'assurer l'évolution continue de l'infrastructure informatique pour répondre aux besoins métier.
Une analyse de rentabilité permettra de démontrer les avantages économiques des RDHx. Le retour sur investissement (ROI) peut être atteint en quelques années en fonction de la charge thermique et des coûts d'énergie, et la mise à niveau précédemment planifiée pour les équipements (avec un ROI de 15 à 20 ans) devient inutile.
La plupart des fournisseurs proposent désormais une solution à base de réfrigérant et non plus d'eau. Un réfrigérant basse pression peut modérer les problèmes de fuite d'eau, car, le cas échéant, il s'évapore sous forme de gaz non toxique et non corrosif. Les unités de distribution de réfrigérant ont un coût, mais l'équipement est protégé en cas de fuite.
Les systèmes de refroidissement immersif commencent également à voir le jour, surtout dans les environnements qui nécessitent des systèmes autonomes haute densité (de 40 à 100 kW et plus). Des systèmes d'immersion directe et de refroidissement par liquide sont désormais sur le marché et peuvent être intégrés aux datacenters existants avec des serveurs refroidis par air. Toutefois, leur adoption est lente, compte tenu du lourd investissement en solutions de refroidissement mécanique et de l'amélioration permanente du rendement énergétique des systèmes nouvelle génération.
Green Revolution Cooling, Iceotope, LiquidCool, TMGCore et Stulz sont des fournisseurs de refroidissement immersif. Chaque environnement est unique, et les responsables des infrastructures et des opérations ont tout intérêt à exploiter des métriques détaillées, telles que l'indicateur d'efficacité énergétique ou PUE (power usage efficiency) ou l'indicateur d'efficacité d'espace ou DCSE (datacenter space efficiency), pour évaluer les avantages et la rentabilité de ces investissements.
Une rénovation qui n’est pas anodine mais reste avantageuse
Les responsables des infrastructures et des opérations peuvent agrandir leurs installations en rénovant le datacenter par étapes, tout en réduisant les besoins en refroidissement et en libérant de l'énergie pour des charges de travail informatiques supplémentaires. Toutefois, cette opération n'est pas anodine : déplacer un équipement dans un datacenter de production actif comporte des risques. Mais si la rénovation est échelonnée et décomposée en étapes plus simples à gérer, les avantages peuvent largement dépasser les risques.
Côté budget, l'opération s'avère plus simple qu'un projet de construction de datacenter, car les besoins en capitaux sont étalés sur plusieurs trimestres. En outre, le coût global est bien moindre et les avantages globalement similaires.
Les responsables des infrastructures et des opérations ont tout intérêt à adopter cette approche échelonnée pour optimiser les datacenters qui doivent accueillir de nouveaux services métier et pour réduire les coûts opérationnels.
Ajouter un mécanisme de refroidissement, mettre à niveau ou recycler des racks haute densité à refroidissement autonome sont des réponses simples et efficaces au manque d'espace dans les datacenters.