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L’analytique collaborative, une approche vouée à doper le décisionnel
En adoptant un modèle d’analytique collaborative, les organisations cherchent à exploiter tout le potentiel de leurs effectifs et à renforcer par la collaboration le partage d’informations et la prise de décision.
L’essor du télétravail et les efforts de vulgarisation de la data science poussent les organisations à s’intéresser à un modèle d’analytique collaborative. L’objectif : améliorer la coopération pendant la prise de décision.
Nous n’en sommes qu’aux prémisses. Les entreprises se retrouvent actuellement confrontées aux défis du partage de données, de la sécurité et des workflows. Cependant, les éditeurs ayant compris ce modèle, les principaux outils d’analytique prennent mieux en charge les fonctions de collaboration. Les organisations, elles, commencent à relier les sources de données, les outils d’analytique et les plateformes collaboratives.
Selon Eric Madariaga, directeur des services marketing de CData Software, « une organisation véritablement pilotée par les données doit se nourrir des connaissances, des perspectives et des objectifs de tous ses effectifs, pas uniquement des talents IT ou en modélisation de données ».
Seules les entreprises qui sauront profiter des expertises sur leurs données au sein des services obtiendront des indicateurs exploitables.
« Les entreprises qui profitent le mieux de la prise de décision “data-driven” ont déployé des solutions analytiques collaboratives et entretiennent une culture ouverte basée sur les faits », ajoute Eric Madariaga.
Qu’est-ce qu’un modèle d’analytique collaborative ?
Un modèle d’analytique collaborative modifie l’approche des initiatives décisionnelles dans l’entreprise pour inclure davantage d’effectifs en amont dans l’analyse et la prise de décision à partir des données. Ainsi, les organisations ne sont plus simplement réactives.
« Traditionnellement, le décisionnel rend compte de ce qui s’est passé et non de ce qui arrive maintenant ou est susceptible de se produire », expose Satya Sachdeva, vice-président Insights and Data chez Sogeti, une division du groupe Capgemini.
L’analytique prédictive et prescriptive, ensemble de pratiques qui relient entre elles les données de toute l’entreprise, donne aux organisations un aperçu de l’avenir. L’analytique collaborative aide les entreprises à optimiser les fonctions métier, à mettre au jour de nouveaux modèles économiques, et à créer des produits et services pour monétiser les données.
L’analytique prédictive utilise des modèles entraînés sur des données historiques pour prévoir ce qui va se produire. L’analytique prescriptive va plus loin et recommande certaines actions, du simple moteur de recommandation de produits au plan complexe de chaîne logistique qui tient compte de nouvelles circonstances.
Dans les deux cas, la clé est d’exploiter davantage de données contextuelles qu’avec l’informatique décisionnelle classique. Des experts spécialisés de différents types peuvent apporter leur éclairage du contexte approprié sur des aspects différents du modèle.
Par exemple, pour améliorer un moteur de recommandations, on pourrait faire appel à la collaboration des experts en marketing produit, des conseillers du service client, des data scientists et des spécialistes de l’UI. Les outils d’analytique collaborative vont faciliter la communication entre les différents experts pour que chacun se concentre sur les informations importantes, sans se perdre dans des questions de format de fichier, de schéma de données ou autre.
« Dans le cadre de l’analytique, la collaboration est la capacité des organisations et des utilisateurs métier à travailler ensemble à faire émerger des informations et à agir pour que l’entreprise obtienne de meilleurs résultats », développe Satya Sachdeva.
Type d'analytique collaborative
Parmi les opérations essentielles à l’analytique collaborative figure la création d’un pôle de compétences BI. Selon Satya Sachdeva, cette démarche devrait faciliter la collaboration entre l’IT, la gestion du changement organisationnel et les fonctions métier afin de promouvoir l’analytique, de stimuler l’innovation, de surveiller les progrès et d’améliorer en permanence les fonctions d’analytique. Parmi les exemples de collaboration en analytique, citons :
- La collaboration entre l’équipe IT et les utilisateurs métier pour faire émerger de nouveaux ensembles de données et cas d’usage et définir des besoins.
- La collaboration graphique pour modéliser des données et des éclairages entre plusieurs fonctions métier, par exemple, la conception de produit, vente, marketing et après-vente, pour trouver comment monétiser les données dans de nouveaux produits et services.
- Des workflows collaboratifs entre utilisateurs métier pour enregistrer et réutiliser les ensembles de données et les indicateurs.
- Discussions instantanées et commentaires entre différents groupes d’utilisateurs pour recueillir des avis et poser des questions sur divers aspects de l’analytique et y apporter des annotations.
Comment utiliser un modèle d’analytique collaboratif dans une organisation ?
Avec l’analytique collaborative, les entreprises s’affranchissent de l’approche traditionnelle axée sur la précision historique pour s’orienter vers la prise de décisions stratégiques et opérationnelles critiques.
C’est d’autant plus important que la fréquence des cygnes noirs, ces incidents aléatoires ou inattendus aux ramifications étendues, augmente. Par exemple, toutes les organisations ont tout récemment dû s’adapter dans l’urgence aux effets de la pandémie de covid-19.
Elif TutukVP innovation et conception, Qlik
Parce qu’il implique davantage de personnes dès les prémisses du processus, ce modèle d’analytique collaborative aide les organisations à s’adapter. L’analyse n’est pas reléguée à la fin, après la production des tableaux de bord et des rapports. À la place, cette approche favorise une prise de décision plus précoce, car les informations sont plus aisément accessibles et partagées au fur et à mesure.
« Rares sont les décisions prises en vase clos : plus il y a de collaboration au cours du cycle de vie de l’analytique, meilleure sera la prise de décision fondée sur les données », affirme Elif Tutuk, vice-présidente de l’innovation et de la conception chez Qlik.
Arsenal d’une collaboration ample et approfondie, l’analytique collaborative en entreprise va faciliter la création et le partage de produits d’analytiques par les utilisateurs finaux voire l’exploitation des éclairages des uns par les autres, managers, employés ou utilisateurs finaux.
« Dans une approche collaborative, les données peuvent vraiment guider l’entreprise puisqu’elles passent plus facilement d’un service à l’autre et que les différentes équipes peuvent s’en servir à leur profit », expose Maciej Zawadzinski, directeur général de Piwik Pro.
Les indicateurs de chaque département sont alors mis en commun pour le plus grand bénéfice du reste de l’organisation. Les employés peuvent contextualiser les données et l’analytique par l’ajout de notes internes à certaines dates dans les rapports, par exemple pour faire le lien avec le remaniement du site web ou le lancement d’une nouvelle campagne marketing. Ainsi, chacun dans l’organisation aura une meilleure compréhension des variations dans les données.
Par exemple, l’administration néerlandaise utilise Piwik pour surveiller et optimiser les performances de ses sites web selon les types d’expertise. Le modèle d’analytique collaborative sert à la direction à évaluer les performances globales de la page, et les rédacteurs en exploitent les données pour optimiser le contenu.
Options des outils de collaboration
Toutes les grandes plateformes d’analytique ajoutent des fonctions d’analytique collaborative. Qlik déploie une grande initiative d’intelligence active qui combine un pipeline de données en temps réel à des fonctions d’analytique orientées action pour agir sans délai. À ce socle, Qlik Sense joint les alertes intelligentes, la collaboration et l’analytique embarquée pour aider les utilisateurs à affiner les déclencheurs et les réponses automatiques.
Tableau améliore aussi ses capacités de collaboration en analytique : avec sa fonction « collections », les usagers n’ont qu’à sélectionner du contenu et le partager en toute simplicité avec leurs collègues pour créer du contenu analytique. Qui plus est, il met l’analytique à la portée des profanes avec des solutions comme Parlez aux données (Ask Data) et Explique-moi les données (Explain Data) qui exploitent le traitement du langage naturel (NLP). La dernière version publiée s’insère plus étroitement dans la plateforme Salesforce afin de simplifier le développement d’analytique et le partage des clés de compréhension. Tableau offre, par exemple, depuis peu une nouvelle intégration qui favorise la collaboration dans le domaine des analytiques de décarbonisation sur Salesforce Net Zero Cloud.
Microsoft Goals est un nouvel outil qui aide les équipes à choisir les indicateurs et à partager le processus des projets d’analytique. Enfin, ThoughtSpot exploite le NLP pour faciliter le partage et la découverte d’analytiques dans toute l’organisation à l’aide d’une recherche simple en langage naturel.
Collaboration : attention à la sécurité
Au bout du compte, les organisations voudraient arriver à exploiter le travail les uns des autres comme avec les autres types de plateformes de productivité et de collaboration de contenu. Les plateformes de collaboration autour des contenus commencent à implémenter quelques fonctions de linking et de collaboration riches que l’inventeur de l’ordinateur fictif Memex laissait entrevoir dès le départ.
Satya SachdevaVP Insights and Data, Sogeti
Mais les enjeux de sécurité des données à prendre en compte dans les analytiques collaboratives sont plus subtils. Certains des indicateurs les plus précieux sont issus de données qui doivent être protégées des employés malintentionnés, des pirates ou de la négligence. Les entreprises doivent aussi respecter des obligations légales (RGPD, loi américaine HIPAA, réglementation californienne CCPA).
« Quand elles développent des stratégies de collaboration en analytique, les entreprises doivent chercher à établir des politiques de cybersécurité restrictives et protectrices équilibrées », confie Satya Sachdeva.
Appliquées sans discernement, ces politiques de gouvernance peuvent sembler gêner les efforts de collaboration, mais elles participent aussi à éviter les problèmes de sécurité des données qui surgissent rapidement quand plusieurs parties ont accès à des données confidentielles.
Certaines organisations mettent en place des politiques de sécurité basées sur les rôles pour faciliter la collaboration en analytique, poursuit Satya Sachdeva. Ce garde-fou n’autorise que les utilisateurs métier qui le doivent à accéder aux jeux de données sous-jacents afin d’éviter d’éventuelles fuites de données.
Les plus grandes organisations peuvent utiliser leur infrastructure d’authentification unique pour octroyer les accès, ajoute Maciej Zawadzinski. Avec cette politique, les utilisateurs peuvent facilement se connecter sans risque qu’un compte reste actif au départ d’un employé.