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ERP hybride : que garder « sur site » et que mettre dans le cloud ?
Dans une architecture hybride, il faut avant tout trouver un équilibre entre les processus métiers et les objectifs stratégiques. Plusieurs experts partagent leurs conseils sur la manière d’aborder sereinement le problème.
Beaucoup d’entreprises envisagent le cloud pour moderniser leurs infrastructures, y compris pour leurs applications et leur ERP. Mais cela ne signifie pas pour autant qu’elles soient prêtes à tout mettre dans un cloud public.
Selon Accenture, 51 % des DSI préfèrent déployer leurs ERP dans un cloud privé, tandis que 35 % restent entièrement au « sur site ». Il n’en reste pas moins qu’une partie des organisations (10 %) explore prudemment les options cloud pour leur applicatif en passant d’abord par un ERP hybride.
Un environnement hybride pour l’ERP permet à ces organisations de mettre certaines fonctions dans le cloud, mais de conserver les données sur site. À l’inverse, elles peuvent stocker des données sensibles dans un environnement cloud – quand celui-ci est plus sûr que l’infrastructure qu’elles peuvent mettre en place elles-mêmes – et conserver certains processus sur site.
Cette approche accepte le fait que certaines organisations ne sont tout simplement pas prêtes pour un ERP 100 % cloud. Et que le transfert de certaines fonctions est une façon de commencer ce voyage vers le SaaS.
Existe-t-il des règles pour bien équilibrer un ERP hybride ?
Techniquement, il n’y a pas de règles strictes et immuables pour déterminer quand rester sur site, quand aller dans le cloud, et quoi y mettre dans un contexte hybride, assure Sean Feeney, directeur des pratiques cloud dans le cabinet de conseil digital The Nerdery. Mais, ajoute-t-il, il existe des indicateurs qui peuvent aider à savoir si la mise en œuvre d’un ERP hybride convient.
Sean FeeneyThe Nerdery
« Pour commencer, les décideurs doivent examiner leur existant (matériel et logiciel) et étudier le degré de complexité de leurs workloads afin de déterminer l’investissement qui sera nécessaire pour les faire migrer vers le cloud », conseille-t-il. Par exemple, des contraintes de licence ou de réglementation pourraient exiger que les processus soient physiquement séparés. Ce qui se prête naturellement à une approche hybride, en particulier pour les organisations qui veulent héberger des workloads sensibles sur site, tout en explorant de nouveaux cas d’utilisation dans le cloud, illustre-t-il.
Ce qu’il faut prendre en compte avant de déplacer des workloads
Avant de passer au cloud, les décideurs IT doivent donc analyser leurs existants, mais ils doivent aussi aligner la stratégie de déploiement avec les objectifs business à long terme ; tout en travaillant avec l’ensemble des parties concernées, pour s’assurer que tout le monde dans l’organisation comprend bien à quoi ressemblera l’infrastructure hybride.
Une de ces décisions concernera le choix des options matérielles et/ou logicielles. Par exemple, les organisations peuvent choisir entre des logiciels purs comme Azure Arc ou Google Anthos, ou des options matérielles et logicielles comme Azure Stack ou AWS Outposts. En outre, certaines entreprises peuvent vouloir étendent leurs environnements VMware dans le cloud pour migrer des workloads.
Le coût sera toujours un facteur important dans la décision. « En raison de certaines idées répandues (mais qui peuvent s’avérer fausses) et d’un manque de visibilité sur les actifs IT, de nombreuses entreprises pensent (à tort) que le cloud public est plus coûteux que le système on-prem. Cependant, la plupart des options hybrides s’accompagnent de coûts de maintenance supplémentaires, alors que le transfert des workloads vers un environnement pur cloud peut faire économiser de l’argent à long terme », estime Sean Feeney.
La vitesse à laquelle on souhaite mettre en place de nouvelles fonctionnalités jouera également un rôle dans la décision, ajoute Adam Mansfield du cabinet de conseils en négociation IT UpperEdge. En général, les applications cloud peuvent être déployées plus rapidement que les versions sur site, ce qui permet de mettre ces nouvelles fonctions à la disposition des utilisateurs beaucoup plus rapidement.
Adam MansfieldUpperEdge
« Le SaaS doit être envisagé lorsqu’il est nécessaire d’apporter de la valeur aux utilisateurs dans un délai court afin d’obtenir un avantage concurrentiel », résume Adam Mansfield.
« Ce que les entreprises doivent se demander, c’est si elles prévoient de devoir adapter rapidement [leur ERP] pour faire face à des pics importants de données provenant de sources multiples, en plus de la rapidité avec laquelle elles doivent mettre de nouvelles fonctions à disposition. Si la réponse est oui à ces deux questions, le cloud est probablement la meilleure option », déclare-t-il.
De l’importance du Core ERP
Tout système ERP, même dans un déploiement hybride, a besoin d’un core (noyau central) qui comprend des fonctions comme la logistique, les finances et les achats. Avant de passer à un modèle hybride, les entreprises doivent définir ce qu’elles mettent dans leur core ERP, prévient Renat Zubairov, PDG et co-fondateur d’Elastic.io, un éditeur de logiciels d’intégration. Par exemple, certaines organisations auront un besoin critique d’une brique inventaire et d’une brique SCM (chaîne logistique) quand d’autres auront besoin d’un système d’achat (procurement).
L’idée est de garder le core sur site. Mais il n’est pas exclu que les besoins clefs soient hébergés dans le cloud, tempère immédiatement Renat Zubairov. « Nous voyons très souvent le scénario inversé, où des solutions spécialisées sont développées et hébergées en interne, alors que le noyau est constitué de composants “as-a-service” hébergés dans le cloud ».
Conclusion
Au final, il est impératif de se pencher sur ses objectifs globaux futurs avant de passer à une architecture d’ERP hybride.
« Le cloud hybride a du sens pour certaines entreprises, mais pas du tout pour d’autres », avertit M. Feeney de Nerdery. Un environnement hybride peut aussi être une bonne solution à court terme, mais il peut ne pas répondre à tous les objectifs long terme de l’entreprise.
Les décideurs IT doivent donc examiner les objectifs d’un déploiement cloud, estimer les coûts associés – comme la maintenance et autres frais – et la criticité des briques logicielles avant de prendre quoi que ce soit du sur site pour le déplacer. Personne d’autre ne peut le faire à leur place dans l’organisation.