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Big Data et Machine Learning : comment faire de la vraie hyper personnalisation dans l’e-commerce ?
Qu’est-ce que l’hyper-profiling (ou hyper-personnalisation) ? Comment le mettre réellement en pratique dans l’e-commerce ? Réponse dans cette tribune du cabinet de conseils Daveo (Magellan Partners).
Le « profiling » fait correspondre l’utilisateur d’un site à un profil type en termes de comportements tels que « l’utilisateur qui vient pour acheter un seul article », ou « celui qui s’intéresse exclusivement à l’univers des baskets ».
Là où le profiling « classique » s’appuie sur des profils ou des segments d’utilisateurs définis par les équipes marketing ou métier, l’hyper-personnalisation nous conduit à aller plus loin. Il est désormais possible grâce à l’Intelligence artificielle, pour un site d’e-commerce, de créer des segments directement liés aux profils et aux comportements utilisateurs, couvrant beaucoup plus d’usages.
Pousser la personnalisation offre également à l’utilisateur une expérience « unique » et entièrement adaptée à son besoin. Un des meilleurs exemples de l’hyper-personnalisation est les suggestions YouTube ou Instagram. Elles s’appuient sur le comportement de l’utilisateur ainsi que celui des autres identifiés ayant des intérêts similaires, pour proposer un contenu plus pertinent.
Dans quels contextes l’hyper personnalisation est-elle utilisée ?
Avec l’avènement du machine learning et l’explosion du commerce en ligne, plusieurs opportunités sont apparues pour les entreprises :
- Le machine learning qui permet dorénavant d’offrir un traitement en temps réel des données ainsi qu’une mise en place applicative relativement simple de la part des data scientists et des équipes techniques.
- L’évolution des solutions de suivi du comportement utilisateur qui permet d’accéder à de nouvelles données relatives aux habitudes de consommation (comportement d’achats, segmentation, etc.) auprès des revendeurs.
L’hyper personnalisation dans le e-commerce se traduit par la récolte des données de l’utilisateur ainsi que le recueil des interactions entre le client et les articles, dans le respect de la vie privée (RGPD, etc.). Pour exploiter au mieux cette donnée et la faire parler, des questions se posent : par quel canal l’utilisateur est-il arrivé ? Comment a-t-il interagi avec le produit ? Quels articles ont été vus, ajoutés au panier, achetés ? Quelles catégories ont été consultées ? Combien de temps a-t-il passé sur la page, etc. ?
Les réponses à ces questions permettent de définir ce qui plaît le plus à l’utilisateur. C’est cette connaissance qui permet de créer des expériences uniques avec des tunnels d’engagement (succession d’étapes) beaucoup plus efficaces.
L’hyper personnalisation en e-commerce s’utilise principalement sur deux axes : l’engagement et le taux de transformation.
En proposant des articles pertinents aux utilisateurs, il est donc possible de créer des tunnels d’engagement beaucoup plus facilement. L’expérience utilisateur est, elle aussi, considérablement améliorée grâce à une connaissance plus approfondie du « profil ». Avec un jeu de données bien catégorisé, il est possible de savoir quelles sont les catégories les plus parlantes pour un client, et donc de construire son parcours sur le site web en fonction de ces résultats. Cette personnalisation a directement un impact positif sur le taux de transformation.
Quelle approche adopter pour faire de l’hyper personnalisation ?
L’approche la plus utilisée actuellement par les sites d’e-commerce est relativement simple. Il s’agit de faire correspondre les interactions entre les utilisateurs et les articles. Puis, en fonction du nombre de vues, de recommander ceux qui ont le plus de succès. Cette approche peut facilement être mise en place. Cependant, elle atteindra très vite sa limite, sur plusieurs points.
Dans un premier temps, seuls les articles les plus vus seront recommandés, créant une boucle autosuffisante. Ainsi, il sera difficile d’intégrer de nouveaux produits dans le système. Quant aux données commerciales, elles seront biaisées, rendant tout le processus inutile. Cette approche exclut également la partie exploratoire permettant de faire remonter des articles dits de « fond de catalogue » pertinents pour l’utilisateur.
Elle implique également une mise à jour régulière ainsi qu’une maintenance du modèle relationnel conduisant à une perte de temps pour les équipes.
C’est dans ce contexte que le Big Data et le Machine Learning entrent en jeu. Au cours des dernières années, avec la simplicité grandissante des implémentations techniques, du machine learning et des plateformes cloud, il est de plus en plus simple de mettre en place un modèle aux résultats beaucoup plus pertinents.
Là où l’approche se tenait à une création et une analyse en amont (création des profils, rédaction des parcours utilisateurs et implémentation), le machine learning va, quant à lui, avoir une approche centrée sur la donnée dont le parcours est le suivant : définition des données, création de segments utilisateurs, création de modèles et mise en place du machine learning.
Un exemple qui est utilisé dans l’e-commerce est celui des modèles de langage et de construction syntaxique pour la suggestion des articles pouvant intéresser les utilisateurs. La méthode se rapproche des générateurs de texte que l’on peut voir depuis quelques années, où grâce au deep learning il est possible de « prévoir » le mot suivant dans une phrase. En écrivant par exemple sur Gmail « Comment vas-tu » ? ou « As-tu passé » l’éditeur de texte proposera à l’utilisateur « as-tu passé de bonnes vacances ? ». Dans d’autres cas, les mots que vous pourriez utiliser sont scorés. « Le tournevis est… » donnera un score de 70 % au mot le plus probable, puis 50 % à une autre proposition… En reprenant ces méthodes pour la recommandation de produits, ces approches conduisent à une meilleure pertinence des résultats contrairement à une solution basée uniquement sur des données statistiques.
Les modèles prédictifs sont dorénavant plus puissants que les modèles comportementaux, utilisés par le passé.
Le modèle prédictif prend tout son sens grâce aux plateformes cloud qui offrent maintenant (pour la plupart) un panel de services pouvant recueillir les données et les exploiter de manière optimale, mais également qui permettent de construire et déployer des solutions d’IA et de machine learning avec tous les avantages du cloud (coûts, scalabilité, haute disponibilité).
Pour la personnalisation, c’est également un avantage considérable. Certains clouds publics comme AWS et GCP offrent des services managés, faciles à mettre en place et qui demandent peu de maintenance (comme « Personalize » chez AWS, qui utilise le moteur de recommandation d’Amazon et de Prime Video, ou « Recommendation AI », son équivalent chez GCP).
Et demain ? Une home page à votre image !
Avec les bons outils et les bons experts, l’hyper-personnalisation peut se mettre en place rapidement. Certains grands groupes s’en servent déjà et utilisent des outils extrêmement puissants pour définir des stratégies de communication hyper ciblées.
Par exemple, le site StockX a ajouté une simple ligne « Produits recommandés pour vous » sur sa page d’accueil (il utilise AWS Personalize pour traiter les données). Cette simple ligne de plus est devenue très rapidement la zone de leur page d’accueil ayant le plus de succès !
Un des grands chantiers en cours est la création d’expériences utilisateurs ultra-personnalisées. Le but est d’offrir des espaces en adéquation totale avec le profil de l’utilisateur.
Amazon, par exemple, adapte complètement son interface en fonction du profil de l’utilisateur. La liste des catégories est par exemple triée différemment en fonction de l’historique d’achat.
Mais le défi aujourd’hui pour se différencier est plus important. Actuellement l’hyper-personnalisation se concentre naturellement sur la transformation des visites sur les sites, mais de nouvelles approches vont émerger. Comme mentionné précédemment, le fait d’utiliser des modèles prédictifs peut avoir d’autres impacts : et si nous utilisions le modèle prédictif pour gérer les stocks ? Que se passe-t-il si on utilise une solution e-commerce sur du contenu écrit ? Le terrain de jeu est immense et les évolutions certaines.