Reportage : naissance d’un méga-centre de calcul au cœur de l’Europe
Un ancien site nucléaire à réhabiliter, un bunker de 10 000 m2 à aménager, des tonnes de déchets à gérer, des kilomètres de fil et de fibre à dérouler : 1&1 construit actuellement en Allemagne l’un des plus grands centres de calcul en Europe. Un chantier qui se déroulera sur toute l’année 2009 et que LeMagIT a décidé de suivre pas à pas.
L’hébergeur 1&1 est en train de bâtir un énorme centre de calcul au cœur de l’Europe, l’un des plus importants sur le continent, à quelques kilomètres de Francfort. Le chantier est d’importance et la première tranche du centre de données – 25 000 serveurs sur les 100 000 potentiels - devrait voir le jour à la toute fin de l’année 2009. Rien de très original puisque les datacenters constituent l’un des piliers des services Internet depuis des années et devraient encore voir leur position centrale se renforcer avec la montée en puissance de l'informatique en nuage (cloud computing). Mais le centre de 1&1 est néanmoins exemplaire du tournant pris par les technologies, à la croisée du green IT et des futures applications distribuées en mode Saas. 1&1 a pour stratégie de devancer la demande de 2 ou 3 ans et anticipe l’explosion des services logiciels en ligne et du cloud computing. Côté énergie, tant le choix des technologies que celui de l’opérateur et du mode de consommation sont censés faire du site d’Hanau un espace exemplaire en matière d’économie et de prise en compte des questions environnementales.
Suivre le chantier pas à pas Le chantier est impressionnant puisqu’il s’agit de réhabiliter… une installation nucléaire bâtie dans les années 80 par Siemens. De quelle manière et à quel prix transforme-t-on un bunker en centre de calcul ? En exclusivité, LeMagIT suivra le chantier tout au long de l’année afin de vous faire partager la naissance d’un datacenter à chacune des étapes de sa réalisation. Un feuilleton qui nous amènera de la réhabilitation du bâtiment au déploiement des serveurs en passant par la mise en place des kilomètres d’infrastructure réseau – avec les spécificités d’ingénierie du bâtiment – ou encore par le déploiement des technologies liées au refroidissement. Un focus sera également porté sur la prise en compte de la dimension environnementale. L’histoire commence dans les années 80, à Hanau donc, l’un des centres historiques du nucléaire allemand où Siemens cherche à implanter une usine de production de plutanium et d’uranium enrichi. Un site monumental – baptisé "New Mox" - est construit… il n’entrera jamais en fonction et s’avérera un gouffre financier pour le conglomérat allemand. Dès le début Siemens omet d’obtenir les autorisations nécessaires en matière nucléaire et la résistance locale s’organise pour empêcher l’ouverture de l’activité. A la fin des année 90, alors qu’une coalition intégrant les Verts arrive au pouvoir, un moratoire sur le nucléaire sur le territoire allemand est décidé… c’en est fini des espoirs de Siemens à Hanau. S’ensuit une tentative de cession de l’immense terrain et de son bunker central. Des Russes sont notamment contactés, mais aucun dossier n’aboutit, et Siemens conserve son coûteux bâtiment sur les bras. Jusqu’à l’explosion des centres de données et l’arrivée de 1&1, l’un des principaux hébergeurs européens, en quête d’espace pour ses datacenters sécurisés. Aucun détail financier n’est communiqué sur l’opération immobilière, mais 1&1 admet avoir fait une "très très bonne affaire". Pas la première puisque l’hébergeur détient également un ancien bunker datant cette fois de la seconde guerre mondiale dans la région de Baden-Baden. D’un potentiel de 30 000 serveurs il est cependant trois fois moins important que celui d’Hanau.
Trois vastes plateaux
Une fois l’acquisition actée en novembre dernier l’énorme chantier peut commencer, pour un investissement total de 15 millions d’euros. Une salle ayant tout de même abritée quelques matières fissiles, des tests drastiques de radioactivité sont pratiqués. Ils s’avéreront négatifs. Les travaux débutent fin janvier 2009. Il s’agit dans un premier temps de détruire l’intérieur du bunker de 10 000 m2 ; seuls les murs – épais de 170 cm - devant être conservés. Une partie des appareils de climatisation – n’ayant jamais servi – sont démontés et revendus à une société polonaise. Pour le reste, les murs intérieurs sont découpés pour laisser place à trois vastes plateaux, des ouvertures sur la façade sont pratiquées du côté des futurs bureaux… et des tonnes de débris sont extraits. A compter de mai, les travaux d’aménagement pourront débuter. LeMagIT sera présent pour voir comment est déployée l’infrastructure nécessaire pour accueillir les premières salles de serveurs à l’automne.