DBA : les compétences évoluent au rythme du Big Data
Le Big Data modifie les architectures de données des entreprises. Les conséquences pour le DBA sont réelles et des ajustements techniques utiles.
De nouvelles technologies viennent rebattre les cartes de la gestion des données. Malgré la montée en puissance des plateformes NoSQL sans schémas de données et d’Hadoop, ainsi que de l’ensemble des outils qui s’y adossent, les répercussions sur le métier d’administrateur de données semblent plutôt limitées.
Toutefois, alors que ces systèmes sont de plus en plus déployés dans les entreprises, de nouvelles compétences peuvent s’avérer d’une grande aide pour les administrateurs de bases de données (DBA). En bref, l’époque du DBA, unique gardien des schémas de données, semble aujourd’hui dépassée.
« Nous assistons clairement à un bouleversement, mais il n’est pas aussi marqué du côté des administrateurs », soutient Joe Caserta, président de Caserta Concepts, une société de conseil spécialisée dans les déploiements d’entrepôts de données et de technologies Big Data. Dans les entreprises, les équipes de DBA sont encore bien occupées par la maintenance de bases de données relationnelles et d’entrepôts de données, bien ancrés au SI, ainsi que par leurs environnements SQL bien huilé.
Reste que certains éléments de contexte ont évolué. Les développeurs ont désormais davantage d’influence dans la conception même des données, et pour Joe Caserta, cela a pour effet de pousser les DBA à élargir leur champ de compétences.
Mettre à jour ses connaissances
Par exemple, le fait que les développeurs puissent initier des projets Hadoop et NoSQL avec peu ou sans schémas définis représente une petite révolution dans les méthodes de développement des entreprises. Pour autant, il est toute de même préférable de créer des modèles de données de référence, a posteriori.
Un DBA certifié sur une base Oracle ne saura probablement pas configurer une base NoSQL Cassandra
Si cet effort de modélisation peut être effectué par les architectes de données, les DBA ont également un rôle à jouer dans cette opération. Ils doivent alors apprendre les mécanismes et fonctionnements des systèmes NoSQL, affirme Caserta. « Cela implique d’utiliser des outils et des stratégies de modélisation différents. Nous avons encore besoin de quelqu’un pour appréhender ces modèles et d’une personne qui sache administrer ces nouvelles bases de données. »
Cette dernière opération, d’ailleurs, nécessite une formation supplémentaire : un DBA certifié sur une base Oracle ne saura probablement pas configurer et implémenter automatiquement une base NoSQL Cassandra, par exemple. « Les méthodes traditionnelles d’un DBA doivent être revues », explique Joe Caserta, ajoutant que la capacité à savoir administrer des clusters Hadoop est également devenue une compétence clé pour les DBA. « Ils doivent apprendre comme stocker les données, sans avoir de schéma. »
NoSQL : l'agilité avant l’intégrité
Pour Craig Mullins, président et principal consultant de Mullins Consulting, le mouvement NoSQL a bien des antécédents, susceptibles de faciliter la montée en compétences de certains administrateurs. « Ce n’est pas aussi nouveau qu’on le pense », lance-t-il, pointant du doigt les similarités entre la technologie de fichiers VSAM (Virtual Storage Access Method) sur Mainframe IBM et les datastores clé / valeur.
Mais ce serait cacher des différences qui restent fondamentales. L’agilité apportée par le NoSQL se fait au prix de l’intégrité des données, bien plus difficile à obtenir avec ce modèle. Pour le moment, l’intégrité a cédé sa place au profit de la flexibilité des données dans les applications Web de nombre d’entreprises. Les DBA doivent s’adapter, alors que les styles de design et de développements changent.
« Certains administrateurs sont plus malléables que d’autres. Nous avons déjà assisté à cela ces vingt dernières années », soutient encore Craig Mullins qui travaille depuis 30 ans dans le domaine de la gestion des données.
Selon lui, dans les entreprises, on attend des administrateurs de bases de données qu’ils opèrent plusieurs systèmes relationnels. Les DBAs doués de cette capacité devraient alors « considérer la technologie NoSQL de près pour guider l’entreprise sur la marche à suivre et savoir quand il est nécessaire de la déployer ».
A terme, ajoute-t-il, la définition des schémas de données sera minimisée et « la disponibilité des systèmes et la compréhension du modèle distribué des données seront bien plus importantes ».
Etendre l’empreinte des DBAs et des salaires à la hausse
Appréhender les bases NoSQL nécessite clairement de changer sa façon de penserGreg Novikov, expert en base de données chez MetLife
Pour Sue Geuens, présidente de DAMA International, une association qui réunit des professionnels de la gestion des données, ces nouvelles architectures de données sont une opportunité pour les administrateurs : celle d’accroître leur portée et leur empreinte dans les entreprises. « Les DBAs sont vus comme les geeks qui cajolent les serveurs de bases de données. Je crois qu’ils sont fatigués d’entendre cela », précise-t-elle.
Selon elle, il existera plusieurs types de DBA dans le futur : ceux cantonnés à un rôle de technicien et d’administrateur traditionnel, et d’autres, qui chercheront à apprendre les nouvelles technologies et leurs outils pour gérer le Big Data. « De nouveaux titres vont apparaître pour qualifier les DBAs et les spécialisations vont devenir encore plus précises. »
Comme Sue Geuens l’affirme, la montée en compétence n’est pas nouvelle pour le métier d’administrateur, qui est déjà attaché à une longue liste de savoir-faire. Les compétences les plus pertinentes sont liées à la modélisation, la gestion des performances et l’administration, avec des spécialisations pour chaque technologie ; ce qui ajoute de la complexité au métier – et par voie de conséquence, un salaire parfois à la hausse.
Que le salaire soit élevé ou pas, « appréhender les nouvelles technologies comme les bases NoSQL nécessite clairement de changer sa façon de penser », conclut enfin Greg Novikov, un expert en base de données qui travaille chez l’assureur américain MetLife. « Mais justement, c’est pour cela que nous sommes bien payés », avait-il lancé lors des MongoDB Days 2014 qui se sont tenus en octobre à Boston.