Edelweiss - Fotolia
Broadcom veut racheter Qualcomm pour 130 Md$ et se poser en concurrent d'Intel et Samsung
En proposant 130 milliards de dollars pour racheter Qualcomm et en se relocalisant aux Etats-Unis, Broadcom entend devenir le numéro trois mondial des semi-conducteurs. L'opération pourrait aussi débloquer l'acquisition en cours de Brocade, jusqu'alors bloquée par le fait que le siège de la firme était réparti entre les USA et Singapour.
Broadcom pourrait bien tenter de faire d’une pierre deux coups en lançant la plus grande opération d’acquisition que le monde de la technologie ait connue. La firme américano-singapourienne vient en effet de proposer la somme colossale de 130 milliards de dollars pour mettre la main sur l’américain Qualcomm.
Elle avait quelques jours plus tôt indiqué son intention de rapatrier son siège social aux États-Unis, une manœuvre qui devrait lever les obstacles juridiques à son acquisition en cours de Brocade - C’est aux côtés de Donald Trump, à la Maison Blanche, que le patron de Broadcom, Hock Tan a affirmé son intention de déplacer son siège social aux USA, afin de profiter des nouvelles règles fiscales généreuses proposées par l’administration Trump.
Si l’opération réussit, elle fera de Broadcom le numéro trois mondial des semiconducteurs derrière Intel et Samsung. Surtout, elle fera de la firme le leader incontesté des composants pour équipements de communication fixes et mobiles et la positionnera en concurrent direct d’Intel sur le marché des processeurs pour ordinateurs portables et serveurs.
Qualcomm est en effet allié à Microsoft pour développer une nouvelle famille de puces ARM capable de faire tourner Windows et les applications existantes pour puces x86 sur ARM, via une couche d’émulation. La société met aussi la dernière main à sa famille de puces ARM pour serveurs Centric 2400, une famille conçue pour rivaliser avec les Xeon d’Intel sur le marché des serveurs. Les Centriq pourraient être utilisés par Microsoft au sein de son cloud Azure.
Broadcom : un géant construit par acquisitions
Broadcom a multiplié les acquisitions au cours des dernières années. La firme qui s’appelait précédemment Avago Technologies est historiquement née en 1999 de la cession par Hewlett Packard de sa division électronique Agilent Technologies aux fonds Silver Lake Partners et Kohlberg Kravis Roberts. L’opération avait été l’une des décisions très contestées de Carly Fiorina lors de son arrivée à la tête d’HP. Elle avait été notamment combattue par les héritiers des fondateurs, Bill Hewlett et Dave Packard.
Avago a depuis racheté le spécialiste du stockage LSI, puis PLX, Emulex et Broadcom avant de se rebaptiser BroadCom, suite au rachat de la firme en 2015. Depuis Broadcom a aussi jeté son dévolu sur Brocade, mais cette acquisition est bloquée depuis des mois par les autorités américaines, Broadcom étant une société binationale dont le siège est réparti entre les États-Unis et Singapour.
Le rachat de Qualcomm s’annonce compliqué
La bataille pour le contrôle de Qualcomm pourrait être longue. Le conseil d’administration de la firme californienne pourrait tout d’abord rejeter la première proposition de Broadcom du fait de son prix potentiellement trop faible — elle valorise l’action Qualcomm à environ 70 $. Pour l’instant Qualcomm s’est borné à indiquer qu’il étudie l’offre de Broadcom.
Le rachat devrait aussi logiquement être analysé à la loupe par les autorités antitrust, du fait de la puissance que pourrait avoir le groupe combiné sur certains marchés, dont celui de la mobilité.
Qualcomm est en effet le leader mondial des puces 4G et il est aussi l’un des grands fabricants de processeurs pour mobiles avec sa famille Snapdragon. La firme contrôle aussi un impressionnant portefeuille de brevet dont elle use et abuse pour protéger ses positions sur le marché du mobile. Cette agressivité de Qualcomm fait l’objet de multiples batailles juridique — dont la plus récente avec Apple — et elle a aussi valu à Qualcomm de multiples escarmouches avec les autorités de la concurrence.
On se souvient ainsi qu’au tournant des années 2000, lors de l’émergence de la 3G, Qualcomm avait fait l’objet d’enquêtes poussées de l’Union Européenne du fait de son agressivité dans la gestion de son portefeuille de licence autour de la technologie CDMA, un élément clé de la 3G (aussi appelée WCDMA).
Depuis la firme a aussi subi les foudres de multiples autorités de la concurrence à travers le monde, dont récemment à Taiwan, en Corée et aux États-Unis (la FTC s’intéresse de près aux pratiques de licences de la firme). Il est aussi à noter que Qualcomm est en pleine acquisition de l’ex-division semiconducteurs de Philips, NXP, une opération à 38,5 milliards qui elle-même a replacé la firme sous la loupe des autorités mondiales de la concurrence.