SuiteConnect : Oracle promet d'investir massivement dans NetSuite
L'éditeur s'est engagé à pérenniser son nouvel ERP Cloud, dont la place dans son catalogue se précise peu à peu. A l'OpenWorld 2017, Oracle annonce un développement international et de nouveaux verticaux.
Un voile de mystère persiste autour de l'acquisition de l'ERP Cloud NetSuite par Oracle. Le géant avait croqué le petit, l'année dernière, pour plus de neufs milliards de dollars. Cette année, lour la première fois, l'évènement annuel de NetSuite (SuiteConnect) a été jumelé avec celui d'Oracle (OpenWorld). Mais la parole reste rare et les non dits nombreux.
NetSuite à la conquête de l'international
La grande question concerne la motivation réelle d'Oracle. Car l'éditeur possède déjà un ERP Cloud. NetSuite va-t-il être fondu dans l'offre actuelle ?
Mark Hurd, PDG d'Oracle, a pris la parole au quatrième jour de l'OpenWorld 2017 pour rassurer les 40.000 clients du pure player Cloud.
« Nous n'avons pas dépensé 9,3 milliards de dollars dans cette entreprise pour ne pas investir dedans », lance-t-il.
Ces investissements vont se concentrer sur quatre axes : la R&D (pour de nouvelles fonctionnalités), la localisation (pour l'adapter à de nouveaux marchés), la force de vente mondiale, et l'ajout de micro-verticaux (industrie par industrie).
NetSuite est présent aujourd'hui dans 15 pays. L'ambition à moyen terme est de multiplier ce nombre par deux ou trois.
Mazars client en France... pour l'Asie
« Le problème des acteurs SaaS [NDR : américains] est qu'ils performent bien aux États-Unis mais qu'ils sont du mal à passer à l'international », analyse Mark Hurd. « Oracle fait 65% de ses revenus hors des USA, nous allons pouvoir accompagner NetSuite grâce à notre réseau et à nos partenaires ».
En France, la société d'audit et de conseils Mazars utilise NetSuite... pour gérer son activité en Asie.
« NetSuite OneWorld permet de simplifier et d'accélérer la consolidation financière dans la région dans 12 devises, y compris l'euro, le dollars et les devises de la Chine, de Hong Kong, de Singapour et du Japon ».
La puissance d'Oracle pour épauler NetSuite
Depuis un an, NetSuite a déjà bénéficié - en restant indépendant - de la puissance financière d'Oracle.
La solution s'est enrichie d'un vrai HCM. Et elle a commencé à se lancer dans les verticaux (baptisés "SuiteSucess").
Aujourd'hui, NetSuite cible les éditeurs, les services, la distribution de gros, la grande distribution, les associations, les agences marketing et de design et le manufacturing. D'autres devraient rapidement suivre.
L'ERP Cloud propose également des outils d'intégration et de personnalisation (la "SuiteCloud Dev Plateform" : outil visuel de gestion des workflow, script, API pour des outils partenaires). Des personnalisations qui persistent lors des changements de versions, précise Evan Goldberg, EVP Development de NetSuite.
Mais de l'aveu du même Evan Goldberg, l'ERP 100% SaaS a encore besoin d'améliorer quelques fondamentaux (comme le reproting mondial).
On comprend donc bien l'intérêt pour NetSuite d'avoir été racheté par un Oracle à la trésorerie et aux compétences pléthoriques. D'autant plus que NetSuite est entièrement conçu sur des technologies Oracle.
Au passage, c'est cette infrastructure qui permet à NetSuite de proposer en avant première la blockchain d'Oracle directement intégrée à son ERP pour « sécuriser les transactions et la collaboration entre entreprises ».
NetSuite dans Oracle, une position plus floue
Mais la question demeure du côté d'Oracle. Même si Mark Hurd l'a balayée aujourd'hui.
« C'est une de nos meilleures acquisitions », se félicite-t-il. « NetSuite est un partenaire depuis des années. Pour nous, les deux plus gros marchés sont l'ERP et la base de données. Il nous est apparu que les deux meilleurs ERP Cloud étaient NetSuite et le notre. [Comme] NetSuite cible le midmarket [NDR : en France, les ETI] notre analyse est que c'était un parfait complément ».
Certes. Sauf que deux jours plus tôt, à une question d'une confrère italienne, le même Mark Hurd affirmait que « avec le Cloud, l'ERP d'Oracle s'adresse à présent à tout le monde, de la multinationale à la start-up ».
Dans les allées de l'OpenWorld, le parallèle est fait avec le rachat en 2004 de JD Edwards et de PeopleSoft alors qu'Oracle avait sa e-Business Suite. Dans ce cas, Oracle avait surtout racheté les clients de ses concurrents.
Ici, on peut penser qu'il a racheté un "futur" challenger très prometteur. Le plus prometteur de l'ERP Cloud avec Workday (fondé par le créateur de PeopleSoft), qui aurait pu, à terme, le gêner dans le SaaS.
Officiellement, la réponse à la question est que la philosophie d'Oracle est de proposer le plus de choix possibles à ses clients et à ses prospects.
L'éditeur considère qu'il vaut mieux, stratégiquement, avoir trop d'atouts que pas assez pour toucher le Midmarket/ETI/PME. « Dans beaucoup de pays, le marché est un marché de PMEs », constate Mark Hurd, d'où l'intérêt pour Oracle d'avoir une nouvelle référence à vendre.
Stratégiquement la logique se tient. Mais sur le terrain, le son de cloche est un peu différent. Il semble bien que certains, en interne, considèrent NetSuite purement et simplement comme des concurrents. D'autant plus que les équipes commerciale de NetSuite sont, pour l'instant, encore indépendantes de celles d'Oracle.
Steve Daheb, SVP Oracle Cloud, synthétise la situation. Oracle a une grille claire de segmentation en interne pour ses commerciaux « En fonction de la taille, du secteur, des besoins, des perspectives de croissance, nous allons proposer plutôt NetSuite ou plutôt les Fusion Apps », répond-il au MagIT. « Mais au final c'est le client qui choisit. Il peut avoir testé les deux et nous demander directement l'un ou l'autre ».
En clair, les deux offres s'articulent dans une logique de "concurrence amicale" sur le marché des PME.
Vers une accélération en Europe
Il y a cependant fort à parier que les choses vont rapidement se clarifier. Soit avec une intégration plus importante de NetSuite dans Oracle. Soit avec une segmentation de marché plus "officielle". Soit avec les deux.
En attendant, trois ballons bleu-blanc-rouge frappés du nom de NetSuite flottent sur la Oracle Place, pile en face du centre de conférence où, année après année, se tient l'Open World. Signe prémonitoire pour le marché français ?
A priori oui, si l'on en croit la carte du monde des nouvelles implantations de NetSuite qui passent de une (au Royaume-Uni) à une dizaine sur le vieux continent. Dont une directement en France.