Bruxelles inflige une amende record de 2,4 Md€ à Google
La Commission européenne a établi que Google avait abusé de sa position dominante sur le marché de la recherche en ligne pour favoriser son comparateur de prix dans ses résultats de recherche. Au détriment d’autres services donc.
Google s’est finalement vu infliger une amende de 2,42 milliards d’euros par la Commission européenne pour ne pas avoir respecté les règles anticoncurrentielles. En cause : les pratiques de Mountain View et de son service de comparateur de prix « Google Shopping ».
Google est scruté par Bruxelles depuis 2008, suite à une enquête portant que la position du groupe californien sur le marché de la recherche sur Internet. La commission en charge de l’enquête a d’ailleurs établi que Mountain View a occupé une position dominante dans certains pays – en République Tchèque, Google a été déclaré dominant qu’à partir de 2011.
Bruxelles a établi que Google a abusé de sa position dominante en tant que moteur de recherche en donnant un avantage illégal à un autre produit Google, son service de comparaison « Google Shopping ». Selon le jugement, Google a ainsi positionné favorablement son service de comparaison dans les résultats de recherche, ayant pour effet de rétrograder dans ces mêmes résultats des d’autres comparateurs concurrents.
« Google est à l'origine d'un grand nombre de produits et de services innovants qui ont changé notre vie, ce qui est positif », explique Margrethe Vestager, la commissaire chargée de la politique de concurrence. « Mais sa stratégie relative à son service de comparaison de prix ne s'est pas limitée à attirer des clients en rendant son produit meilleur que celui de ses concurrents. En effet, Google a abusé de sa position dominante sur le marché des moteurs de recherche en favorisant son propre service de comparaison de prix dans ses résultats de recherche et en rétrogradant ceux de ses concurrents. »
La Commission soutient que les entreprises dominantes ont la responsabilité de ne pas abuser de leur position sur le marché en freinant la concurrence, que ce soit sur le marché dominé ou d’autres. Le risque serait alors qu’une entreprise puisse exploiter ce positionnement pour étendre sa domination sur son marché ou l’utiliser dans d’autres.
L’enquête a en fait conclu que Google a abusé de sa position dominante sur le marché de la recherche en ligne en donnant à un produit Google (initialement appelé Froogle, puis Product Search en 2008 et Google Shopping en 2013) un avantage illégal sur le marché des comparateurs de prix.
« Depuis que chaque abus de position dominante a commencé, le trafic du service de comparaison de prix de Google a été multiplié par 45 au Royaume-Uni, par 35 en Allemagne, par 29 aux Pays-Bas, par 19 en France, par 17 en Espagne et par 14 en Italie », raconte la Commission dans un communiqué. Alors que celui des concurrents s’est dégradé : « Le trafic vers des services concurrents de comparaison de prix a, par contre, connu une chute spectaculaire. Ainsi, la Commission a trouvé des preuves spécifiques de chutes soudaines du trafic vers certains sites concurrents, de l'ordre de 85 % au Royaume-Uni et jusqu'à 92 % en Allemagne et 80 % en France. Ces chutes soudaines ne sauraient davantage s'expliquer par d'autres facteurs. Certains concurrents se sont adaptés par la suite et sont parvenus à regagner une part du trafic, mais jamais la totalité », soutient encore Bruxelles.
Google conteste et prône une innovation supérieure
De son côté, Google affirme dans un billet de blog « contester respectueusement » la décision de Bruxelles. « Alors que certains comparateurs de prix veulent naturellement avoir une présence plus affirmée sur Google, nos informations montrent que les consommateurs préfèrent les liens qui les dirigent directement vers les bons produits et non pas vers des sites où ils doivent effectuer, une nouvelle fois, leurs recherches », explique Kent Walker, senior vice-président et avocat général chez Google, dans ce même billet de blog.
« Lorsque la Commission se demande pourquoi certains comparateurs n’ont pas fait aussi bien que d’autres, nous pensons qu’elle doit prendre en compte le fait que de nombreux sites ont émergé à cette époque, y compris des plateformes comme Amazon et eBay. Amazon ayant progressé, il est normal que d’autres comparateurs aient reçu moins de soutien que d’autres. Nous rivalisons avec Amazon et d’autres sites en matière de recherche de produits en montrant l’information la plus utile », ajoute-t-il.
« Lorsque vous utilisez Google pour rechercher un produit, nous essayons de vous donner ce que vous recherchez. Notre capacité à bien faire cela ne nous favorise pas, nous ou d’autres sites. Cela est le résultat d’un travail intensif et d’une innovation constante, reposant sur les retours d’utilisateurs. »
En plus de 2,4 milliards d’euros d’amendes, Bruxelles demande également à Google de mettre fin à cette pratique dans les 90 jours, sans quoi la société s’expose à des pénalités « pouvant atteindre 5% du chiffre d'affaires moyen réalisé quotidiennement au niveau mondial par Alphabet, la société mère de Google », affirme encore la Commission.