Le « Edge Computing », solution aux problèmes de réseaux de l’Internet des Objets Industriels ?
Lors d’une allocution au MIT, le directeur financier de General Electric – maison mère de GE Digital et spécialiste mondial des outils industriels – faisait ce constat. Qui semble se réaliser un peu plus jour après jour chez Cisco, IBM, GE ou dans des start-ups prometteuses.
Jeffrey S. Bornstein déclarait récemment au MIT CFO Summit que « l’infrastructure et l’architecture de l’Internet dans son usage industriel sont complètement différentes de l’internet grand public actuel ». Plutôt que d’envoyer la totalité des données des objets connectés (les machines industrielles) dans un Cloud distant pour qu’elles soient toutes analysées, l’IIoT (Industrial Internet of Things) reposera, affirmait le DAF, sur le « Edge computing » - c’est-à-dire sur la capacité à collecter et à traiter les données brutes au plus près des machines qui les génèrent.
Ce « Edge computing » consiste à mettre de l’intelligence (du code) dans les objets eux-mêmes (l’embarqué), dans les éléments du réseau comme les routeurs (le « Fog computing » cher à Cisco) ou à placer des « petits clouds » à proximité des processus (des « Cloudlets »). Un autre terme regroupe ces logiques sous le nom de « Smart edge ».
Internet grand public vs IIoT
« Quand un client achète un article sur Amazon, la transaction se fait en quelques secondes – pas en millisecondes », explique Jeffrey Bornstein. « Cela tient au fait qu’Amazon capture les données (NDR : du surf du client), les envoie dans son cloud, les analyse, les compare au profil du client, trouve des produits qui peuvent être intéressants, puis renvoie la réponse ».
Autre élément, « quand Amazon vous fait des recommandations, cela vous prends quelques secondes pour les évaluer et décider si elles vous intéressent ou pas. Cela n’a pas réellement de coût. » Dit autrement, « un faux positif n’a pas de coût ».
Dans l’IIoT, il en va tout autrement. « Dans le milieu industriel, des faux positifs [ou des temps de latences trop important] peuvent avoir des conséquences catastrophiques ».
Une pièce d’une machine industrielle critique comme un moteur d’avion doit pouvoir répondre aux évènements – comme une anomalie détectée – en quelques microsecondes, « et pas en quelques secondes ». Pour cela, l’infrastructure de l’IoT industrielle doit être pensée en conséquence. Plutôt que d’envoyer ses données, un avion doit être capable de gérer les urgences avec une appliance ou une solution embarquée à bord.
« Le compute là où vit la machine »
« Ce n’est qu’une petit quantité de données qui ira jusqu’au back-end cloud, là où vous pourrez stocker et archiver des données et faire des analyses sur le long terme ». Pour le reste des informations, « le compute » se fait là où « vit la machine ».
Dernière raison qui explique cette architecture avec de l’intelligence répartie en trois endroits (objet, réseau, back-end), « la quantité de données dont nous parlons est énorme ; rien que notre métier de motoriste aéronautique génère une masse d’informations qui dépasse de loin ce qu’un Facebook ou un Google doit gérer. […] Vous ne pourriez de toute façon pas transférer toutes ces informations à un cloud distant via le réseau ».
Pour donner un ordre de grandeur, une présentation officielle de GE - qui souligne également la différence de durée de vie entre les appareils grand public et industriels - explique qu'une journée de Tweets représente environ 80 Go de données brutes. Un seul vol d'avion en réprésente 500 Go.
Cette vision de bon sens pour minimiser les problème de réseaux que pose l'IIoT se répend de plus en plus chez les éditeurs. Après le Fog Computing de Cisco (qui y voit aussi l'opportunité de continuer à vendre du matériel plus élaboré avec des ASICs dédiés pour limiter l'érosion de son coeur d'activité, attaqué par le matériel générique et le SDN/NFV), IBM a par exemple annoncé Quarks début 2016 et GE Digital ses outils pour le développement embarqué et l'IoT industriel (Predix Machine).
En France, un des fondateurs de Business Object s'est lancé dans une nouvelle aventure avec TellMePlus. Cette jeune société, basée dans le Languedoc, propose une solution baptisée Predictive Object qui sélectionne automatiquement les algorithmes adaptés à un usage et à un historique de données puis qui permet de déployer cette « intelligence » soit dans un objet, soit dans un routeur (soit de la déployer dans un Cloud). Elle a passé d'ores et déjà des accords avec... Cisco et GE Digital.