Accès indirectes : SAP demande plus de 600 M$ de compensation à la brasserie AB InBev
Selon SAP, AB InBev aurait permis à ses employés un accès aux systèmes SAP sans qu’il n’en possède les licences. Un autre imbroglio, après celui de Diageo, portant sur les licences indirectes.
Le brasseur belge Anheuser-Busch (AB) InBev dans le viseur dans SAP. Selon des documents de la SEC, le gendarme des bourses américaines, la filiale US de l’éditeur allemand a entamé des poursuites à l’encontre de l’une des plus grosses brasseries mondiales (Budweiser, Stella Artois, Beck’s, Leffe, Hoegaarden et Michelob), cherchant plus de 600 millions de dollars de compensation pour usage de logiciels sans licences.
Il faut dire que chez Anheuser-Busch InBev, SAP occupe une place clé. La société s’est certes bâtie à force d’acquisitions, mais a consolidé les systèmes IT de ces acquisitions – des systèmes disparates donc – dans un ERP SAP. Infosys a notamment participé à ce projet. En 2016, le groupe a affiché un chiffre d’affaires de 45,5 milliards de dollars.
Ce document de 544 pages remis à la SEC stipule, comme le révèlent nos confrères et partenaires britanniques de Computerweekly (groupe TechTarget, propriétaire du MagIT), que « le 21 février 2017, SAP America Inc (SAP) a entamé une procédure à New York contre Anheuser-Busch Companies LLC conformément aux Règles d'arbitrage commercial de l'American Arbitration Association. La requête porte sur des violations multiples d'un contrat de licence daté du 30 septembre 2010 (avec les modifications connexes et les documents auxiliaires, le SLA) et se base sur des allégations selon lesquelles les employés de la société utilisaient les systèmes et les données SAP - directement et indirectement - sans les licences appropriées et que l’entreprise a sous-payé les sommes dues en vertu du SLA. La déclaration requiert à la fois la révision du SLA à certains égards et des dommages potentiellement supérieurs à 600 millions de dollars. Nous avons l'intention de nous défendre vigoureusement contre les réclamations de SAP ».
Cette révélation intervient quelques semaines après l’affaire Diageo. Ce dossier portait sur un cas d’utilisation indirecte d’un ERP SAP via la plateforme CRM de Salesforce. SAP réclamait dans ce cadre 54 millions de dollars en compensation. La Haute cour de justice de Londres avait rendu son verdict en faveur de l’éditeur allemand.
Toutefois, à l’inverse de l’affaire Diageo, il est peu probable que les détails de la conclusion du dossier ne soit au final rendus publics. Robin Fry, directeur juridique chez Cerno Professional Services, interrogé par ComputerWeekly, soutient que la plainte contre Anheuseur-Busch InBev porte fort probablement sur le fait que SAP impose un droit de licence pour tous les « accès indirects » à ses systèmes, comme par exemple, par les forces commerciales ou encore les fournisseurs (et partenaires) de la société.
Selon lui, « SAP soutient que 76% des revenus issus de transactions dans le monde sont effectués via un système SAP. Les conditions de licences de SAP sont vastes et incalculables, avec souvent des accès distants en ligne, comme c’est le cas auprès de clients ou de fournisseurs, avec des frais de licences très élevés. Les grandes entreprises font tout leur possible pour être dans la conformité, mais, souvent, la modification la plus mineure peut entraîner un risque élevé par la suite, lorsque le prochain audit est déclenché. Les entreprises doivent faire face à ce risque latent en avance de phase ».
Pour AB InBev, difficile de se passer de SAP
Le document de la SEC montre que le brasseur belge est un gros consommateur d’IT. Ainsi, entretenir de bonnes relations avec un fournisseur IT comme SAP est essentiel. Ce qui donne à SAP un certain avantage, car il est peu probable qu’Anheuser-Busch InBev souhaite se passer de l'ERP de SAP et de ses fonctionnalités très intégrées aux processus métiers de l’entreprise.
C'est ce que confirme en soi le document. « Les défaillances de l’IT peuvent interrompre nos activités. Nous nous reposons sur des systèmes IT pour traiter, transmettre et stocker des informations numériques. Une partie significative de nos échanges avec le personnel, les clients et les fournisseurs dépend de l’IT », précise le brasseur.
« Comme avec tous les systèmes IT étendus, nos systèmes sont exposés à nombre d’interruptions de services provoquées par des événements hors de contrôle, comme par exemple - mais pas uniquement – les désastres naturels, les attaques terroristes, les pannes des systèmes télécoms, les virus, les pirates ou d’autres problèmes de sécurité. Nous dépendons de l’IT pour mener efficacement nos opérations et communiquer avec nos clients ainsi que pour soutenir notre gestion interne. Nous avons également signé plusieurs accords de services technologiques pour externaliser notre infrastructure IT auprès de fournisseurs », rappelle-t-il enfin. Il avait juste peut-être sous-estimé un autre risque : SAP lui-même.
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