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Le Français Greenerwave optimise la qualité de réception Wi-Fi en réduisant le nombre d'émetteurs
Avec ses tableaux passifs issus de recherches menées à l'institut Langevin à Paris, Greenerwave estime être en mesure d'améliorer significativement la qualité de réception du Wi-Fi dans les bâtiments tout en réduisant le nombre de points d'accès et donc la "pollution électromagnétique".
La jeune pousse française Greenerwave, basée à Sophia-Antipolis, a développé une technologie d’optimisation « passive » visant à renforcer la réception Wi-Fi dans les bâtiments tout en minimisant le nombre des points d’accès déployés. L’objectif de la firme est d’améliorer la qualité de service délivrée aux utilisateurs tout en réduisant la “pollution électromagnétique.
Greenerwave est le fruit de recherches menées au sein de l’institut Langevin, le laboratoire « ondes et images » de l’école supérieure de physique et chimie industrielle (ESPCI) de la Ville de Paris. La start-up a vu le jour en août 2015 et a levé ses premiers fonds en 2016 auprès de la BPI, du CNRS et de Kima Ventures.
Des tableaux qui focalisent intelligemment les signaux vers les terminaux
Dans un environnement de bureau ou à domicile, les ondes émises par un point d'accès Wi-Fi subissent de multiples phénomènes, comme la réflexion la réfraction, la diffusion ou la diffraction lorsqu'elles rencontrent un obstacle (mur, poteau, meuble, être vivant...). Ces phénomènes peuvent déclancher des interférences au niveau du récepteur ou atténuer la puissance du signal. Le principe de la technologie développée par la firme est de focaliser les ondes radio vers le terminal pour contrer ces phénomènes. « L’idée est un peu similaire à celle d’un four solaire ou d’une parabole satellite », nous a expliqué Eric Labarre, le CEO et co-fondateur de la société, lors d'un entretien. À la différence près que Greenerwave a développé un système de « parabole plane » qui permet de focaliser les signaux vers les équipements des utilisateurs.
« Techniquement, le principe est de raccourcir le chemin parcouru par une ou plusieurs ondes pour qu’elles arrivent en phase sur le terminal. En Wi-Fi 2,4 GHz, la longueur d’onde est d’environ 6 cm. On a donc créé un système de tableau avec des carrés de 6 cm de côté, fabriqués dans un matériau qui réfléchit la quasi-totalité du signal. Ces carrés sont pilotés individuellement par des résonateurs et se reconfigurent en avant ou en arrière. Électroniquement, on émule un mur dont les différents éléments bougeraient très vite. Cela permet de remettre le signal en cohérence spatiale et temporelle. En fait, on fait l’équivalent du “beam forming” de façon passive », indique explique Eric Labarre.
La magie du dispositif imaginé par la firme est qu’il améliore sensiblement la qualité du signal reçu par les terminaux sans avoir à ajouter des amplificateurs ou plus de points d’accès émetteurs. En l’état, l’électronique de contrôle du tableau communique avec les points d’accès pour lui permettre de former le signal vers les terminaux de façon à améliorer la qualité de réception.
Des gains de performances significatifs allant jusqu'à 12db en laboratoire
En laboratoire à l’institut Langevin, Greenerwave a observé des gains pouvant aller jusqu’à 12 db avec ses dispositifs. « On a un PoC avec des Raspberry Pi sur lesquels on a des gains réguliers de 6 à 9db, soit un facteur de gain de 8x en matière de débit théorique » affirme Eric Labarre.
La technologie n’est pas limitée au seul Wi-Fi. Selon Eric Labarre, elle est tout à fait applicable à la 4G et à ses évolutions futures. La seule différence pour l’instant est qu’il n’y a pas de place dans le standard pour que le tableau puisse communiquer avec les stations de base. La firme a donc bâti des prototypes qui communiquent en bluetooth avec les terminaux via une app, afin de focaliser les ondes vers ces derniers. « Cela fonctionne très bien avec un cadre à la maison. Dans le cadre d’une entreprise, l’idée est d’installer un certain nombre de tableaux qui seront pilotés par une passerelle ou un routeur en Wi-Fi.
Selon Eric Labarre, le principal avantage de la technologie de Greenerwave est qu’elle permet de réduire le nombre d’émetteurs, tout en augmentant la qualité de réception des terminaux. Elle permet donc à la fois de diminuer la pollution électromagnétique dans les bâtiments et de minimiser la consommation électrique (un tableau Greenerwave consomme environ 100mw contre 30 voire plus pour un point d’accès Wi-Fi d’entreprise).
Des applications qui vont au delà du Wi-Fi
La beauté de la technologie est aussi qu’elle pourrait être adaptée à différentes fréquences selon ses fondateurs. Il suffit pour cela de produire des tableaux avec des carrés mobiles (que la firme appelle des “patches”) de différentes dimensions pour couvrir les principales fréquences. Des patches existent déjà pour le 2,4 GHz, le 5 GHz et le 2,6 GHz (4G). Un autre bénéfice est que les tableaux de Greenerwave peuvent être installée de façon transparente dans un environnement de bureau. Les tableaux peuvent en effet être “habillés” par des images ou des photos et peuvent aussi s’insérer en remplacement d’éléments comme les dalles de plafond.
Pour Eric Labarre, la technologie a aussi un vrai intérêt dans les nouveaux bâtiments HQE qui du fait de leur conception et des matériaux utilisés sont de plus en plus étanches aux ondes radio. Elle peut aussi s’appliquer aux avions et aux trains qui sont des formes de cages de faraday avec beaucoup d’absorption. “Dans un avion, on ne peut émettre à n’importe quelle puissance. En aéronautique, du fait des limitations, il faut un point d’accès Wi-Fi toutes les 4 rangées de sièges pour respecter les règles d’émission. Cela veut dire 500 à 600 m de câbles à tirer, et une consommation électrique non négligeable. Dans cet environnement très contraint, notre système permettrait de réduire sensiblement le nombre d’équipements tout en améliorant la qualité de service. Les gens de l’aviation ont donc très vite compris son intérêt”.
Greenerwave est en discussion pour des PoC avec plusieurs mairies et ministères en France. La firme a aussi reçu de nombreuses manifestations d’intérêt de constructeurs et d’utilisateurs lors du récent CES, où elle avait un stand. “Nous avons attiré l’intérêt de plusieurs équipementiers télécoms qui anticipent l’accroissement des mesures de précautions sur les ondes électromagnétiques. Notre technologie étant passive, nous pouvons contribuer à réduire les émissions”.
À l’heure actuelle, Greenerwave produit ses tableaux en petite série d’une centaine pour mener ses POC avec ses premiers clients et partenaires. Mais l’objectif de la firme est de licencier sa technologie à des constructeurs et à des partenaires, afin de la déployer le plus largement possible. Comme l’explique Eric Labarre, « Notre objectif à terme est de fournir des designs de références à nos partenaires et de les aider à produire des équipements utilisant notre technologie. Nous conserverions alors un rôle de qualification pour des produits, avec un label de type ”Greenerwave inside” ».