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« Veritas s'est perdu au sein de Symantec », Bill Coleman (CEO)
Le CEO de Veritas, Bill Coleman, explique comment il entend relancer la société sur le marché de la protection de données, de la gestion de données et du cloud après sa séparation d'avec Symantec.
La semaine dernière, Veritas Technologies a tenu sa première conférence technologique depuis sa séparation d’avec Symantec au mois de janvier. Désormais contrôlé par le Carlisle Group, un fonds d’investissement basé à Washington, Veritas Technologies entend étendre son spectre d’influence au-delà du stockage pour devenir un spécialiste de la gestion de données. La sauvegarde a toutefois un rôle capital dans la stratégie de la société. Le logiciel et les appliances de sauvegarde NetBackup restent l’offre phare denotre entreprise et Veritas Technologies tente aussi de ressusciter les ventes de Backup Exec, sa solution de sauvegarde pour PME, après des années de déclin.
À l’occasion de Veritas Vision, nos confrères américains de SearchStorage.com ont pu s’entretenir avec Bill Coleman, le CEO de la firme [ et ex-patron de BEA Systems avant son rachat par Oracle en 2001, puis ex-CEO de Cassat, avant son rachat en 2009, au bord du dépôt de bilan par CA Technologies, N.D.L.R.] pour discuter des dernières tendances en matière de protection de données et de ses plans pour relancer une société, qui a été négligée par un spécialiste de la sécurité pendant 11 ans.
En quoi les choses ont-elles changé chez Veritas Technologies depuis votre séparation d’avec Symantec ?
Coleman : Symantec était pour l’essentiel concentré sur le marché de la sécurité, ce qui fait qu’il y avait peu de marketing [autour des produits de stockage]. Symantec n’avait pas de stratégie à long terme pour Veritas. Ils avaient des roadmaps pour chaque produit. Nous n’avions pas de force de vente propre. Nous n’étions guère qu’un catalogue de références sur une liste destinée à une force de vente mondiale de 7000 personnes.
Désormais, nous sommes libres de notre marketing, nous pouvons faire de la publicité, planifier notre avenir et construire notre propre stratégie. Cette conférence est l’une des pierres angulaires de cette stratégie, visant à nous refaire connaître de nos clients.
Trois semaines à peine après mon arrivée, en février, j’ai reçu un appel du directeur technique mondial de Citigroup. Nous étions en train de négocier un contrat pluriannuel de 5 ans avec eux. Il m’a dit « je dois vous parler ». Sa première question a été « Qui est Veritas Technologies ? » J’ai répondu : qu’entendez-vous par là ? Il m’a alors expliqué : « Et bien, je connais vos produits. Mais pourquoi devrais-je signer un contrat de cinq ansavec vous, alors que je ne sais absolument pas ce que vous serez dans cinq ans et si vous allez être capables de régler mes problèmes ». C’est assez révélateur de la situation dans laquelle se trouvait la société. Elle s’est égarée, en ne vendant que des produits et en ne se préoccupant pas d’aider ses clients.
Cette transformation numérique… Il s’agit d’aller au-delà du stockage et de la gestion des données. Il faut aussi gérer les questions de gouvernance et de compliance et prendre en compte des élements de Big Data. Symantec ne disait rien à ses clients de cela. Il n’avait pas une stratégie autour de ces problèmes. La seule bonne nouvelle est que les feuilles de route des produits de Veritas intégraient certains de ceséléments.
Que voyez-vous de nouveau sur le marché de la sauvegarde ?
Coleman : La gestion des copies de données est certainement un thème d’actualité. Mais il ne s’agit pas que de limiter le nombre des copies. Il s’agit aussi de pouvoir provisionner et déprovisionner des environnements DevOps dans le cloud. La prochaine grande évolution pour les entreprises est qu’elles veulent éliminer les CAPEX, c’est pourquoi il y a un mouvement fort vers le paiement à la consommation et vers les modèles d’abonnement. Ce que nous voyons est que la plupart des entreprises veulent de l’abonnement, pas de la facturation à l’usage. Comme me l’a expliqué un des grands CIO de Wall Street « le problème, quand vous payez au verre, est qu’à un moment vous devenez ivre et c’est alors que vous dépensez bien trop ».
La vraie tendance est celle de l’abonnement. Les entreprises ne se préoccupe pas du fait qu’il s’agisse d’un abonnement au logiciel ou au matériel. Elles veulent que vous installiez une appliance et que vous facturiez en fonction de leur besoin. Sur le marché de la sauvegarde, ce sont les deux tendances fortes du moment.
Veritas continue à avoir une activité soutenue autour de NetBackup, Mais quel est le futur de Backup Exec au sein de la société ?
Coleman : [les ventes de Backup Exec] sont en recul. Le produit a vraiment été négligé. Ce que nous avons fait est de créer un groupe séparé, chargé de se concentrer sur les ventes du logiciel. À l’ère de Symantec, les ventes de Backup Exec étaient gérées par les mêmes commerciaux en charge de vendre les autres produits du catalogue. Si vous êtes un commercial et que vous avez le choix entre vous concentrer sur un contrat de demi-million de dollars de NetBackup et un contrat de 5000 $ de Backup Exec… Il n’y avait pas non plus de force de vente interne pour Backup Exec.
Nous nous concentrons à nouveau là-dessus. Nous avons mené des entretiens et parlé à un grand nombre de partenaires Backup Exec et de clients. Et ils aiment le produit. Dans un premier temps, nous pensons pouvoir le renforcer et stopper l’hémorragie. À plus long terme, le logiciel sera délivré comme un service couplé à Microsoft [Azure] et Amazon [Web Services]. Nous pensons que c’est là que les PME réaliseront leurs sauvegardes, plutôt que d’avoir leurs propres disques et leurs propres datacenters.
Tous les acteurs du backup parlent de cloud. Est-ce que le marché de la sauvegarde cloud est saturé ?
Coleman : On en est loin. La plupart des entreprises ne mettent pas encore leurs données tier-1 ou leurs données critiques dans le nuage. Elles font, en revanche, pas mal de DevOps dans le cloud. De plus en plus, l’archivage se fait aussi dans le nuage, mais il ya de bonnes raisons pour lesquelles les workloads de type Tier-1 ne sont pas dans le cloud. La première est liée à des interrogations autour de la fiabilité et de la sécurité, même si ces deux points s’améliorent. L’autre est liée à des questions de portabilité. Personne ne veut être dépendant d’Amazon dans le futur.
Un dernier aspect est que les fournisseurs cloud ne font pas de sauvegardes, mais des snapshots. Ils réalisent des images périodiques et les mettent sur disque. Ce qui veut dire que pour récupérer une donnée, il faut tout restaurer. On ne peut faire de restauration sélective. Mais le point le plus important est qu’Amazon dit à ses clients que si quelqu’un dans leur organisation demande à effacer quelque chose par accident, ils vont le supprimer. Et il n’y aura alors aucun moyen de revenir en arrière. Il ne font pas de sauvegarde, pas de façon adaptée aux besoins critiques des entreprises pour leurs applications transactionnelles. Cela va évoluer dans les années à venir. Nous travaillons avec les trois grands fournisseurs de cloud pour leur permettre de répondre à ces besoins.
Adapté d'un texte en anglais de Sonia Lelli, SearchStorage.com