ServiceNow met le cap sur la diversification

Le spécialiste de l’ITSM dans le Cloud veut quadrupler de taille d’ici 2020. Un objectif ambitieux qui pousse l’Américain vers une diversification vers de nouveaux marchés où la concurrence des autres acteurs du Cloud sera rude.

L’objectif a été fixé par Frank Slootman, PDG de ServiceNow, en mai dernier lors de la conférence annuelle Knowledge16. ServiceNow vise un chiffre d’affaires de 4 milliards de dollars à l’horizon 2020. Un objectif de taille quand on sait que l’éditeur de services ITSM a atteint la barre du milliard de dollars en 2015 et vise entre 1,35 et 1,38 milliards de dollars pour cette année.

Objectif : être la plateforme n°1 du service client

Si ServiceNow vient de réaliser l’acquisition de BrightPoint, spécialiste du prédictif dans le domaine de la sécurité informatique, l’éditeur veut réaliser l’essentiel de cette croissance sur le développement organique de sa plateforme. Un pari pour l’éditeur dont l’interlocuteur privilégié reste le DSI pour la gestion de ses infrastructures et service desk informatiques - un marché où il fait face à HPE, BMC, IBM, CA depuis sa création, en 2004.

« Notre vraie différenciant était notre approche plateforme », explique Christophe Bouchardeau, vice-président Europe du Sud de ServiceNow. « C’est ce qui nous a réellement permis de proposer des applications totalement intégrées, tirant profit d’un Single System of Record sans redondance, avec un seul système d’engagement avec le client, quelle que soit l’application qui va se reposer sur cette plateforme. Il ne s’agit rien d’autre qu’une plateforme d’intermédiation de services qui fait le lien entre une personne qui demande un service et celui qui va le délivrer. »

Dans la stratégie de ServiceNow, ce qui est valable pour l’IT l’est tout autant dans de nombreux cas d’usages métiers. « Qu’y a-t-il de si différent entre un utilisateur qui demande un service à la direction RH de son entreprise et ce même utilisateur qui  passe par un portail pour demander le renouvellement de son iPhone d’entreprise ? Rien », ajoute Christophe Bouchardeau. «Mettre en relation le demandeur d’un service et son pourvoyeur, c’est un processus qui n’est pas si différent et notre plateforme peut faire de l’intermédiation de services indépendamment du service qui est requis. » C’est dans cette logique que ServiceNow positionne sa plateforme face aux problématiques RH, marketing, finance, facilities management, légal, etc.

Un marché potentiel de 60 milliards de dollars

Selon les chiffres avancés par l’éditeur, ServiceNow se met en ordre de bataille pour se positionner sur un marché de 60 milliards de dollars. Sur ce total, la gestion des opérations IT, le cœur des activités de ServiceNow, représente une opportunité de 10 milliards de dollars, la gestion de projet PPM, 5 milliards de dollars. L’offre PME baptisée ServiceNow Express vise un marché de 2 milliards « seulement ». C’est bien entendu cette diversification vers les métiers qui devra être le « booster » du chiffre d’affaires de ServiceNow dans les prochaines années. L’éditeur estime le marché global de l’Enterprise Service Management à 25 milliards de dollars, sans même compter le marché du Customer Service qui pèse 9 milliards à lui seul. Avec son offre « Customer Management » dévoilée à Las Vegas, ServiceNow est désormais en concurrence frontale avec d’autres poids lourds du Cloud, notamment le « Service Cloud » de Salesforce.com.

Ce marché de l’ « Enterprise Service Management » est donc clé dans le plan d’expansion de Frank Slootman. ServiceNow va devoir faire ses preuves face aux DRH, aux directions marketing, commerciale, aux directions financières, etc. Une révolution culturelle pour un éditeur plus habitué à parler de CMDB que de processus RH ou financiers.

ServiceNow a déjà commencé à marquer des points, notamment dans le domaine RH. Il y a quelques mois ING a fait le choix de ServiceNow afin de déployer son portail d’automatisation de ses processus RH. Un projet gagné au nez et à la barbe des plateformes Saas RH que sont Workday, TalentSoft, Cornerstone ou HR Access. « Est-ce qu’un jour nous seront amenés à remplacer un HR Access ou un Workday, clairement la réponse est non » affirme Matthieu de Montvallon, responsable des consultants avant-vente de ServiceNow. « Notre métier reste la gestion des services, le Case Management. » Christophe Bouchardeau ajoute : « La plateforme va accueillir de plus en plus de nouveaux applicatifs pour gérer des cas et des processus liés à d’autre métiers. »

L’éditeur mise sur les DSI pour se frayer un chemin jusqu’aux directions métiers. ServiceNow leur fournit un portail et un moteur de gestion de processus fédérateur qui, s’il ne concurrence par les Workday ou Salesforce, se substitue néanmoins aux portails self-services que désormais tous les fournisseurs Cloud métier ont à leur catalogue. C’est sans doute la limite de la stratégie qui a si bien réussi à ServiceNow jusqu’à présent.

Si en 2004, l’Américain partait sur une terre vierge avec une solution Cloud face à des concurrents bien établis avec des solutions logicielles classiques, ServiceNow s’attaque désormais à des marchés où des leaders se sont déjà dégagés et où l’innovation est rapide. Personne n’a attendu ServiceNow pour proposer de tels portails self-services aux métiers et les avant-ventes vont devoir apprendre à parler métier avec de nouveaux interlocuteurs.

Helsinki 2016, une version qui marque la volonté d’ouverture de l’éditeur

Frank Slootman a-t-il les yeux plus gros que le ventre à se lancer dans une diversification rapide pour aller vers les 4 milliards de chiffres d’affaires ? Un atout indéniable de ServiceNow est d’avoir l’oreille des DSI de nombreuses de grandes entreprises. Des DSI tentés de reprendre la main sur des projets Saas menés par les directions métiers qui ont chacune constitué leur silo, leur propre portail self-service. Les DSI qui voudront mettre en peu de cohérence dans ces multiples services pourraient bien suivre la voie proposée par ServiceNow.

Les nouveautés dévoilées par l’éditeur lors de Knowledge16 à Las Vegas s’inscrivent bien dans une volonté d’étendre les usages de sa plateforme bien au-delà de l’ITSM. Illustration de ce nouveau cap, un nouvel outil de création de portail a fait son apparition dans la version Helsinki 2016 de la plateforme. « Nous proposons un nouveau framework, le Service Portal qui vient se placer au-dessus de la plateforme », détaille Matthieu de Montvallon. « Ce framework va permettre de construire plus facilement des portails métiers. Nous le faisions déjà avec ce que l’on nomme le CMS qui reste en place, mais la nouveauté c’est la technologie mise en œuvre (Angular.js) et la flexibilité que cela apporte. » Un look plus moderne pour les portails, ainsi que des tableaux de bord qui peuvent être créés en Drag&Drop, l’outil ne vise plus seulement les informaticiens. De plus, le service Paas ServiceNow a désormais la capacité de bien séparer les groupes d’utilisateurs.

Les utilisateurs IT disposent désormais d’environnements isolés de leurs collègues. « Avant la version Helsinki, tout le monde travaillait dans un même environnement, ce qui posait un véritable problème quand une entreprise voulait passer de 10 développeurs à 100. Les développements sont aujourd’hui isolés par métier sur la plateforme. Tous ceux du facilities qui créent des applications pour réserver les salles auront leur espace et ne verront pas ce que font ceux de la direction financière ou RH. Les déploiements sont effectués à un niveau global mais les gens sont cloisonnés dans la création des packages, les tests, etc. » Si l’entreprise le souhaite, celle-ci a désormais la possibilité de bien séparer ses environnements ServiceNow, mais aussi des données.

Autre nouveauté apparue sur cette version Helsinki, un assistant de paramétrage ITIL. Peut-être verra-on se multiplier ce type d’assistance dans des domaines bien plus éloigné de l’ITSM lors des prochaines versions majeures de ServiceNow. « Si les responsables des RH nous écoutent, c’est que nous portons justement cette casquette ITIL », estime Matthieu de Montvallon. « Ils ne peuvent s’appuyer sur une telle démarche dans leur domaine, or nous avons 20 ans d’ITIL derrière nous. Nous pouvons transposer ce que l’on faisait dans l’IT auprès des RH. Il est très probable que ce type d’assistants fassent leurs apparition dans des processus RH et autres ». Rapidement « boucler » les projets ITIL pour pouvoir se positionner au plus vite sur des projets hors IT, c’est maintenant l’objectif des avant-ventes de ServiceNow.

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