Big Data Paris : l’heure des projets a (légèrement) sonné
L’édition 2016 de Big Data Paris est marquée par une progression des projets où le Big Data joue un rôle clé. Même si l’industrialisation des PoC reste encore aléatoire. Le lac de données reste le cas d’usage premier.
Une époque charnière. C’est ce que nous aurions pu retenir de ce premier jour de l’édition 2016 du salon Big Data Paris , qui s’est ouvert aujourd’hui à Paris. Si cet événement a pour vocation de réunir le gratin de l’écosystème de la donnée en France côté fournisseurs et prestataires, il est également marqué par un afflux important de partenaires, clients et prospects qui ont confirmé leur venue. Les organisateurs attendent en effet quelque 10 000 personnes. Ils ont ainsi déplacé Big Data Paris vers la Porte Maillot, délaissant le CNIT devenu trop exigu.
Il faut dire que le marché de la données en France, et par extension celui du Big Data, connaît actuellement une progression révélatrice de l’avancement des entreprises dans leurs projets. Selon une étude menée par le cabinet Pierre Audoin Consultants pour le compte de GFI Informatique, révélée lors de Big Data Paris, ce marché devrait connaître une croissance moyenne annuelle de 9,6% jusqu’en 2019, pour représenter à cette date un marché de quelque 5 milliards d’euros. La moitié sera issue de projets Big Data en 2019, rappelle encore l’étude, qui annonce de fait « un tassement » de l’analytique traditionnel.
Et pour cause, entre 2015 et 2019, le marché des logiciels et services lié au Big Data en France devrait progresser à un taux moyen de 35% par an. Le Big Data devient le segment cœur pour le marché de la donnée ; symbole d’une prise de conscience des entreprises, révèle clairement cette étude de GFI.
Le Big Data s’immisce progressivement au cœur des innovations pour s’installer soit au sein des SI, soit à la périphérie…Mais bien au cœur des activités et des métiers. Aujourd’hui note encore l’étude, 56% des entreprises sondées dans le cadre de cette étude (220 entreprises ont répondu) affirment que la donnée occupe une dimension critique de leur activité. Elles étaient 32% jusqu’alors. Elles devraient être 74% dans 2 ans. Autre donnée clé, les deux tiers des projets de transformation numérique sont réalisés autour de la donnée.
« Nous assistons enfin au passage du point d’inflexion tant attendu en France », écrit d’ailleurs Alvin Ramgobeen, directeur des practices BI et Big Data, chez GFI Informatique, citée dans l’étude. L’ère des PoC (Proof-of-concept) semble passée; l’heure est aux projets concrets et au passage en production, selon lui.
Le datalake, l'usage le plus courant en France
Si les entreprises françaises ont dépassé le stade du PoC, elles ont d’abord opté pour la mise en place de lacs de données («Datalake»). Cela est vrai pour 60% des entreprises répondantes. Si certes cette démarche est facilitée avec une baisse des coûts du stockage (Hadoop fonctionne sur des serveurs de commodité), il apparaît également que ces lacs de données sont initiés par la DSI avec un périmètre fonctionnel le plus ouvert possible. Comprendre sans cas d’usage spécifique de prime abord. Mais l’idée est bien de créer une fondation technologique pour faire émerger les applications côté métier. « Ces lacs de données sont initiés par la DSI, puis elle attend de voir ce que cela va donner. On ne part pas sur une démarche spécifique, mais sur une vue unifiée des données. Il s’agit là de préparer le terrain aux métiers », explique Olivier Rafal, analyste principal chez PAC. Les usages viennent donc des métiers par la suite.
Un point que rejoint d’ailleurs Patrick Darmon directeur Big Data de Keyrus, présent lors de l’événement : « Le lac de données ressemble au traditionnel entrepôt de données. Et cela évite de se poser trop de questions. Avec un lac de données, la DSI est au rendez-vous des métiers ». Et d’ajouter : « 80% des PoC Big Data sont faits à partir de PoC pour des usages de Data Science, car cela a un rapport étroit avec le métier. »
« Les entreprises n’ont plus besoin de PoC pour savoir que le Big Data fonctionne, sauf dans certains projets , comme par exempe la mise en place de clusters Hadoop dans le Cloud », ajoute Olivier Rafal « Elles ont compris que cela fonctionne sur des cas d’usages bien identifiés. » Création de nouveaux services, optimisation de l’activité et surtout affinage de propositions commerciales sont ici cités comme des cas d’usage qui tirent la croissance en France. Ils sont les plus courants.
Une industrialisation qui n’est pas systématique
Reste pourtant que tout n’est pas si rose. Si la transformation des PoC n’est pas systématiquement au rendez-vous, un effet de levier a bien été aperçu, nuance Patrick Darmon. « On savait que 2015 était une année de PoC. On pensait que pendant tout 2015, on commercialiserait des PoC et des cadrages. Cela n’a pas manqué. Il y a eu beaucoup de PoC chez des entreprises où cela se justifiait et chez d’autres qu’on ne voit généralement pas dans le monde du Big Data – elles ont par exemple peu de données. Tout le monde s’est essayé au Big Data en 2015 », commente-t-il.
A cela s’est ajouté 2 réflexions complémentaires à la fin 2015, poursuit-il. Si certaines entreprises continuent le mode PoC, il est apparu « une montée en compétences des équipes, tant métier que DSI ». Cela apparait surtout chez les grandes entreprises, qui s’organisent pour cela. « On constate aussi qu’il y a une porosité entre le SI et le métier qui est de plus en plus forte. Car la technologie n’est pas encore suffisamment abordable (user-friendly) ».
Autre tendance aperçue en fin d’année dernière : l’industrialisation, même légère. « Les entreprises ont réalisé un ou plusieurs PoC, ont obtenu ainsi un résultat. Elles s’interrogent donc sur la façon de généraliser », constate-t-il. Et cela peut alors passer par la mise en place d’un projet de Big Data. Mais pas systématiquement.
Chez Keyrus par exemple, la part de revenus de Keyrus porté par le Big Data en France est de l’ordre de 7-8%, assure Patrick Darmon. « Cela a décollé et reste révélateur du marché : beaucoup de PoC et peu d’industrialisation. » Si d’évolution il s’agit bien, les déploiements généralisés se font encore un peu attendre.