Le Gouvernement Britannique ne veut plus dépendre des produits d’Oracle
En cause, trop de licences Oracle par fonctionnaire issues d'achats non contrôlés. Un analyste de Forrester tire à boulet rouge sur la décision.
Le Gouvernement Britannique en a assez d’Oracle. C’est en tout cas ce qu’affirment nos confrères anglais du Register dans une enquête exclusive.
Le Bureau du Cabinet – bras exécutif du Premier Ministre – aurait en effet clairement demandé de « se débarrasser d’Oracle ». En cause, les montants importants versés à l’éditeur, le nombre de licences et les doublons qui seraient courants dans l’administration du Royaume.
C’est d’ailleurs ce point, plus que le prix, qui semble poser problème d’après nos confrères. En 2013, le secteur public aurait versé 209 millions de livres à Oracle. Une somme importante certes. Mais qui pourrait être justifiée.
Or ce qu’a constaté le Cabinet (qui explique mener des missions régulières pour améliorer l’IT de l’Etat), c’est que des responsables informatiques ont des relations personnelles avec les commerciaux d’Oracle. Résultat, ils achèteraient de nouvelles licences à l’éditeur sans même se demander si leur secteur en possède déjà.
L’équivalent de notre Ministère de l’Agriculture (le « Department for Environment, Food and Rural Affairs ») aurait ainsi versé 1.3 millions de livres à Oracle, ce qui représente un coût de 155 £ par utilisateur… mais surtout 200 licences par fonctionnaires.
Ce qui a le don d’horripiler le Bureau du Cabinet dont l’objectif chiffré est 93 £ par utilisateur avec un but affiché de descendre à 52 £.
Autre problème – dont l’administration est entièrement responsable – aucun état des lieux et aucun inventaire des licences informatiques n’existe. Personne ne sait donc qui, ni où sont utilisées les licences Oracle. Ni combien elles sont avec précision.
D’après la source du Register, la demande du Cabinet a été clairement perçue en interne comme un ordre de se détourner d’Oracle. Mais la chose n’est pas encore faite. Les contrats, le nombre de versions différentes et leurs supports composent un existant complexe dont il sera difficile de s’affranchir. Un atout dans la main d’Oracle qui entend bien rester en place.
« Oracle a toujours été une entreprise qui facture cher, très orientée vers la vente… ils ne sont pas là pour vous expliquer comment dépenser moins », confirme un ancien de la société devenu consultant spécialisé en contrats Oracle, Craig Guarente.
Ce projet du Gouvernement britannique n'a pas été commenté par Oracle mais il s'est d'ores et déjà attiré les foudres d’un VP de Forrester. « Décréter est une mauvaise idée », écrit Duncan Jones.
D’abord parce que les produits d’Oracle sont bons (souvent en tête des classements du cabinet d'analyse, rappelle-t-il) et que le prix n’est pas la seule variable à prendre en compte. « Pourquoi imposer à un Ministère d’acheter moins cher si ce qu’il achète à la place n’est pas bon », lance-t-il. « Si Oracle est le bon choix stratégique, il faut vous y faire et faire avec ».
Ensuite parce que la meilleure option n’est pas, d’après lui, de s’affranchir d’un éditeur ou de créer une concurrence (notamment avec des produits open source) mais de créer un contexte stable et une relation constructive et durable pour l’inciter à devenir un vrai partenaire.
« Trop de concurrence décourage les meilleurs » résume-t-il dans un billet de blog qui fait – de manière assumée - l’éloge des projets qui se préoccupent des résultats et pas des coûts, et qui tire à boulets rouges sur les décisions venues d’en haut déconnectées du terrain et sur une mise en compétition trop importante.
Deux conceptions - presque deux philosophies - qui s'opposent donc.