Suse met de la haute disponibilité sur les marchés de niche
L’éditeur Linux a présenté une version de SLES pour les systèmes SAP , portant le concept de kGraft au plus de Hana. Comparé à Red Hat, Suse fait valoir son statut de Linux de niche.
Avalé par le spécialiste du mainframe Micro Focus en avril dernier, (dans la cadre du rachat d’Attachmate) Suse reste le spécialise du Linux pour les marchés niches. L’éditeur lance ces jours-ci une version de son Linux SLES 12 spécialement adaptée à l’offre logicielle de SAP. « Sur le segment des produits SAP au dessus de Linux, nous détenons 70% de parts de marché pour les applications et 90% de parts sur la base de données en mémoire Hana. Décliner notre dernière distribution SLES 12 en version SAP était logique », lance Julien Niedergang, ingénieur système chez l’éditeur.
Il existe des versions spéciales de la SLES pour SAP depuis 2009. Par rapport à la SLES 11 pour SAP, cette nouvelle version apporte principalement l’outil kGraft, qui permet de patcher le noyau sans pour autant redémarrer le système, et l’outil Snapper, qui sert à restaurer le système de manière très pointue. Par exemple uniquement le noyau, justement, si l’on soupçonne que sa mise à jour la plus récente a causé un problème. « L’intérêt - et c’est notre exclusivité - est de pouvoir construire des appliances SAP Hana hautement disponibles, sans interruption de service », avance Julien Niedergang.
oXya, spécialiste français de l’intégration SAP et réputé fervent défenseur de la distribution de Suse en guise de système sous-jacent, n’était pas disponible pour commenter cette annonce.
Un train d’avance sur Red Hat, techniquement
L’année dernière, devant l’émergence d’appliances SAP à la sauce SLES chez IBM, HP et Dell, Red Hat a fini par lui aussi proposer sa RHEL 6.5 en version spéciale SAP. Dans les semaines suivantes, Suse répliquait en ajoutant l’extension Pacemaker à sa SLES 11 SAP. Cette extension, qui initiait la haute disponibilité dans les appliances SAP sous Linux, permettait de déployer un cluster SAP capable de s’auto-réparer tout en basculant les traitements sur des nœuds sains, afin d’éviter les interruptions. Red Hat n’a fait de même que tout dernièrement, avec plusieurs mois de retard sur son challenger. « PaceMaker est essentiellement développé par des ingénieurs de Suse et nous revendiquons aujourd’hui la solution ‘out-of-the-box’ la mieux configurée des deux », insiste Julien Niedergang.
Simultanément, Suse s’est aussi lancé dans une distribution OpenStack, alias le kit Open source qui sert à bâtir une offre de cloud IaaS. Seule dans son genre à être basée sur PaceMaker, cette distribution a remporté la première place du concours King of the Stacks qui déterminait l’OpenStack le plus rapide lors du dernier OpenStack Summit.
Aujourd’hui, outre kGraft et Snapper, qui pourraient arriver dans une prochaine RHEL 7 pour SAP, la principale différence entre les deux Linux pour SAP du marché est que celui de Suse est livré avec le système de fichiers BtrsFS (meilleur pour les snapshots et l’éclatement d’un volume virtuel sur plusieurs disques) alors que celui de Red Hat favorise XFS (meilleur pour les entrées/sorties).
Commercialement, un numéro 2
Selon les estimations des différents cabinets de recherche, Red Hat s’accaparerait environ 65% de parts sur le marché des serveurs Linux, quand Suse obtiendrait plutôt 25%. Alors que Red Hat concurrence Microsoft et VMware sur le segment de la virtualisation du datacenter avec sa RHEV, Suse leur offre plutôt sa SLES pour peupler leurs machines virtuelles. De même, si Red Hat s’adresse à tous types d’entreprises, les Linux de Suse se sont surtout illustrés dans l’industrie, dans le supercalcul et, en France, dans tout ce qui a trait à l’aérospatial et à la défense. « Sans aller jusqu’à dire que SLES le remplace, je constate que notre Linux se vend particulièrement bien auprès des entreprises qui utilisaient auparavant Solaris », commente Julien Niedergang.
Dans les semaines à venir, Suse devrait focaliser ses forces de ventes sur les solutions de Software Defined Storage. « Nous pensons que le logiciel de stockage Ceph permettra de remplacer d’ici à 5 ans les baies de stockage par des serveurs génériques bardés de disques », révèle l’ingénieur système. Selon lui, une distribution SLES basée sur Ceph contribuerait à réduire le coût du stockage d’un facteur 6, ou 7. « Si l’on cumule Ceph à Pacemaker, il y a même l’opportunité de proposer une solution extrêmement fiable et rapide », suggère-t-il. Ironiquement, le stockage de nouvelle génération fut également le relai de croissance de Solaris. Juste avant que Sun ne soit racheté par Oracle.
Suse a lancé en mars dernier une première version de cette distribution Enterprise Storage basée sur Ceph, mais sans Pacemaker. Problème, Suse n’a accès qu’au cœur Open Source de Ceph, et non à sa version commerciale complète. Car la compagnie à l’origine de Ceph, InkTank, a été rachetée l’année dernière par... Red Hat.