EnterpriseDB veut professionnaliser le support PostgreSQL en France
L’éditeur américain vient d’ouvrir son premier bureau en France. Son objectif est simple : convaincre les entreprises déjà utilisatrices d’opter pour un support professionnel.
Avec 2 700 clients dans le monde, EnterpriseDB surfe sur le succès de la base de données Open Source PostgreSQL. Créée en 1995 par Michael Stonebraker, le gourou des bases de données, celle-ci compte des dizaines voire des centaines de milliers d’entreprises utilisatrices dans le monde, un vivier de clients potentiels pour EnterpriseDB (EDB) qui commercialise à la fois une offre de support, des outils de monitoring additionnels ainsi qu’un nouveau moteur amélioré dans une version « Enterprise ».
De nombreuses entreprises françaises ont fait le choix de PostgreSQL et pourtant aucune d’entre elles n’est à ce jour cliente d’EnterpriseDB, comme le déplore Mathieu Le Faucheur (en illustration), tout nouveau directeur des ventes Europe du Sud d’EnterpriseDB en France : « Nous n’avons pas encore de clients en France à ce jour. C’est la raison pour laquelle EDB a souhaité ouvrir un bureau en France, pour pouvoir adresser physiquement les utilisateurs de PostgreSQL et leur proposer du support et améliorer les performances de PostgreSQL avec les solutions EDB. »
De belles références PostgreSQL qu’EnterpriseDB rêve de faire signer
Avec l’ouverture de ce bureau, l’éditeur américain compte bien pousser les grands comptes français qui ont déjà déployé PostgreSQL à recourir à ses services et déployer sa version Enterprise : «J’ai pu rencontrer quelques grands utilisateurs PostgreSQL en France comme EDF, Total, l’AFP, Leroy Merlin et plus largement le groupe Mulliez. Je n’ai pas véritablement à vendre PostgreSQL aux entreprises, mais c’est vrai que les Français aiment bien avoir la présence de l’éditeur. Précédemment, un commercial basé au Pays-Bas couvrait aussi la France, mais culturellement, ça ne passait pas. Il n’y avait pas cette proximité. C’était une faiblesse. »
Une faiblesse aujourd’hui compensée par la mise en place de ce bureau français, même si EnterpriseDB va devoir faire face à un frein culturel bien franco-français : celui de se passer de support commercial sur les solutions Open Source : « Je couvre la France et l’Europe du Sud et en Espagne et en Italie, nous commençons à avoir des clients. En France, c’est culturel. Quand une entreprise décide de sortir du modèle de l’éditeur propriétaire type Oracle, Microsoft ou IBM pour aller vers l’Open Source, elle n’accepte pas d’avoir à se tourner vers un nouvel éditeur et basculer dans un modèle de souscription. C’est une réaction qui évolue ensuite avec le temps, chez les clients plus matures. Si on prend l’exemple d’Adeo, le GIE Leroy Merlin, ils sont utilisateurs de PostgreSQL depuis de nombreuses années. Ils ont maintenant pris conscience qu’il est important pour eux d’investir sur des solutions connexes. Maintenant que l’essentiel de leurs applications métier est développé sur PostgreSQL, ils doivent industrialiser leur démarche avec des outils, du support. »
Remplacer les instances Oracle
Plutôt que se livrer à un combat contre d’autres bases de données Open Source telles que MongoDB ou MySQL, l’objectif d’EnterpriseDB est d’aller déboulonner les bases de données Oracle chez les entreprises qui commencent à trouver la note présentée par l’Américain un peu salée : « Notre stratégie, c’est avant tout de cibler les clients Oracle. Si on veut être honnête, Oracle reste la meilleure base de données propriétaire du marché, c’est la Rolls des bases de données. Toutefois, leur base est très couteuse et les pratiques commerciales de l’éditeur sont peu acceptables au regard des clients. La meilleure alternative à Oracle, c’est PostgreSQL, c’est ce qui ressort des études menés par les utilisateurs que j’ai été amené à rencontrer. »
Pour crédibiliser PostgreSQL auprès des grandes entreprises et des DSI toujours rassurés par un support, EnterpriseDB propose des contrats 24/7 avec un délai de réponse d’une heure. L’éditeur propose aussi un ensemble d’outils de migration, de monitoring, de backup et de réplication pour la base de données. En outre, ses développeurs ont retravaillé le moteur de la base de données pour la doter de quelques fonctionnalités additionnelles intéressantes dont un mode compatibilité Oracle (sur le plan des procédures stockées), une sécurisation des données au niveau ligne, un optimisateur de requêtes, ainsi que de multiples nouvelles fonctions pour les développeurs. Baptisée Postgres Plus Advanced Server, cette version enrichie de la base de données n’est disponible que sous licence commerciale.
Ancien responsable des activités deMulesoft pour la France et la Suisse francophone, Mathieu Le Faucheur espère que les entreprises utilisatrices françaises, tout en gagnant en maturité, se tourneront finalement vers EnterpriseDB pour bénéficier de ces améliorations : « Que nos clients soient des grandes entreprises ou des entreprises plus petites, dans un premier temps, elles déploient des applications non critiques. C’est ce que fait Total, par exemple et, si je prends le cas de BNP, ils ont fait un choix de base de données « corporate » qui n’est pas Postgres, mais, dans certaines de leurs directions, les développeurs utilisent Postgres pour créer des applications non critiques. » La plus belle référence Postgres en France est certainement le GIE Adeo, auquel appartient Leroy Merlin et qui a fait le choix de PostgreSQL en 2001. « Adeo est un gros utilisateur de Postgres, avec plus de 1000 instances en production, dont certaines applications critiques, mais c’est un cas qui reste encore atypique. »
Cloud : EnterpriseDB doit revoir sa copie
Outre en France, EnterpriseDB est bien implanté en Europe, avec un centre de développement au Royaume-Uni, des bureaux dans les pays nordiques, au Benelux. Un autre moyen d’atteindre de nouveaux clients passe peut-être par le Cloud. EnterpriseDB dispose déjà d’une offre Cloud baptisée Postgres Plus Cloud Database (PPCD). La console PPCD permet de déployer le moteur de base de données sur de multiples instances Cloud EC2, chez Amazon Web Services. L’éditeur a décliné cette offre en 2 éditions. L’édition « Basic » met en œuvre le moteur Open Source, tandis que l’édition « Advanced » s’appuie sur le moteur de Postgres Plus Advanced Server, l’éditeur soulignant la compatibilité Oracle de l’offre pour aider les entreprises à franchir le pas et tester la solution sur le Cloud. Enfin, pour ceux qui jugeraient ces offres Cloud trop coûteuses, EnterpriseDB les invite à se tourner vers Amazon RDS for PostgreSQL.
Il est néanmoins difficile d’estimer la valeur ajoutée apportée par EnterpriseDB sur ces offres puisqu’il est tout aussi rapide de gérer ses instances PostgreSQL sur EC2 directement via les outils Amazon Web Services. De plus, l’offre Dbaas d’EnterpriseDB n’est pas particulièrement mise en valeur du point de vue marketing, ce que reconnait Mathieu Le Faucheur qui souligne : « Nous sommes en train de réfléchir sur le repositionnement et sur le pricing de notre offre Cloud. Elle existe bien à notre catalogue, mais nous n’en faisons pas réellement la promotion. Néanmoins, ce type d’offre est intéressant pour les entreprises qui peuvent ainsi lancer un nouveau projet sans devoir déployer une nouvelle infrastructure. Avec le Cloud, la disponibilité est immédiate. On se doit en tant qu’éditeur de disposer d’une offre Cloud. »
Embauché voici 2 mois, Mathieu Le Faucheur espère signer des contrats de support pour 2 à 3 grands clients français d’ici à la fin de l’année. L’objectif commercial assigné au bureau « Europe du sud » pour 2015 est d’atteindre 1,7 million de dollars de chiffre d’affaires. Le responsable souligne : « j’ai la chance que les marchés italiens et espagnols soient déjà en croissance. Ils devraient représenter la moitié de mon chiffre d’affaires. »