Nokia – Alcatel : création d’un géant industriel des telcos
Nokia et Alcatel-Lucent ont officialisé leur fusion. La complémentarité technologique et géographique devrait positionner le nouveau groupe pour concurrencer les USA et la Chine.
Nokia et Alcatel-Lucent ont, ce jour, officialisé leur rapprochement dont l’ambition est de donner naissance à un géant des télécoms européen capable de rivaliser avec les Chinois et les acteurs nord-américains.
La transaction, qui avait fuité dans la presse américaine le week-end dernier et conduit les deux groupes à confirmer les négociations, est réalisée à travers une offre publique d’échange pour une valorisation de l’opération à 15,6 milliards d’euros. Le tout avec le soutien du gouvernement français : les patrons des deux entités avaient rencontré hier François Hollande et Emmanuel Macron à l’Elysée.
La nouvelle entité conservera le nom de Nokia ainsi que son siège en Finlande, mais disposera d’une forte présence en France, a tenu à assurer Rajeev Suri, le PDG de Nokia lors d’une conférence de presse.
Nokia entend ouvrir un centre d’excellence R&D en France, dont les travaux porteront autour de la 5G, l’une des évolutions clés des technologies sur laquelle Nokia entend se positionner. Un laboratoire dédié à la Cyber-sécurité est également prévu, similaire à celui déjà en place à Berlin, a encore expliqué Nokia. Une collaboration européenne sera par ailleurs déployée entre ces deux centres.
Des technologies complémentaires et une forte R&D
Pour Nokia, comme pour Alcatel, ce rapprochement est présenté comme la meilleure alternative et option possible, alors que les deux groupes ont chacun de leur côté entrepris une transformation de leur modèle pour s’adapter à un marché qui évolue. « L’industrie change vite et nous devions considérer les options pour étendre notre potentiel sur le marché », a expliqué Philippe Camus, le président du Conseil d’administration d’Alcatel-Lucent.
Il faut dire que depuis 2013, le groupe a entrepris de se repositionner, via son plan Shift, et de faire évoluer son portefeuille technologique et son organisation. « Mais il reste encore des faiblesses en 2015 », commente Michel Combes, le directeur général du groupe, comme « une taille insuffisante sur le mobile et un bilan un peu faible ». D’un point de vue stratégique, le rapprochement avec Nokia ferait donc sens.
« Nokia offre un complément parfait pour le périmètre de nos activités et la mise en commun des activités permet d’atteindre une taille critique optimal e», a également ajouté Philippe Camus.
Chez Nokia, même constat. Cette fusion représente « une étape importante pour le groupe », a indiqué Risto Siilasmaa, le président du Conseil d’administration de Nokia, rappelant que depuis 2013, le groupe a également entamé sa transformation avec par exemple la cession de ses activités de téléphones portables à Microsoft.
« Une nouvelle structure » pour Nokia.
Mais si le Finlandais est certes un pilier sur certaines technologies, comme l’infrastructure mobile haut débit, il ne l’est pas sur d’autres, confirme-t-il. Or sur ce marché, « il faut maîtriser de nombreuses technologies ». Le portefeuille d’Alcatel arrive ainsi comme un allié précieux, et « la meilleure alternative possible »,.
Cette complémentarité des deux portefeuilles a également été mise en avant par Rajeev Suri. En commun, le nouveau Nokia proposera des technologies pour répondre aux problématiques d’un monde connecté et programmable, avec des technologies pour les réseaux fixes et mobiles haut débit, de routages IP et du Cloud, pour la virtualisation des fonctions du réseau.
Rajeev Suri évoque également des complémentarités géographiques, avec une présence renforcée Etats-Unis, en Chine, en Europe, et en Asie Pacifique ainsi qu’en Amérique Latine. En terme d’innovations, Nokia s’appuiera sur les très populaires Bells Labs et y associera ses entités Future Works et Nokia Technologies. Le groupe commun emploiera 40 000 personnes pour sa R&D.
Des questions sur les emplois
« Le projet a été soutenu avec force par les pouvoirs publics », a précisé Michel Combes, ajoutant que seulement des « ajustements » avaient été proposés par les pouvoirs publics sur le plan défendu par Nokia et Alcatel-Lucent. Michel Combes a insisté sur « le renforcement des plateformes de Lannion et de Villarceaux ».
Au-delà des contraintes, a-t-il souligné, Nokia et son PDG croient « aux compétences en France et dans le coût attractif du soutien à l’innovation, via le crédit impôt recherche ». Histoire sur de rassurer.
Si Michel Combes et Rajeev Suri ont montré un visage rassurant quant au maintien des emplois en France, il apparaît toutefois que des questions restent en suspend – d’autant le plan Shift d’Alcatel porte sur un dégraissage de l’effectif . Si le groupe prévoit un maintien global du niveau des effectifs, Michel Combes évoque quant à lui, « une évolution de la composition des effectifs, avec moins de fonctions support et plus de R&D ». Mais pour l’heure, aucun chiffre n’est communiqué.
Avec ce rapprochement, Nokia compte réaliser des synergies de coûts de 900 millions d’euros d’ici à la fin 2019 et 200 millions d’euros de réduction de charges financières d’ici à la fin 2017.