Objets connectés : Suez Environnement dévoile son architecture smartwaters
Face aux enjeux environnementaux mais aussi à la baisse continue de la consommation d’eau en France, Suez Environnement mise sur les objets connectés et la gestion intelligente de l’eau pour améliorer les performances de ses services. Une amélioration où le SI joue un rôle clé.
Il y a quelques semaines, Suez Environnement inaugurait au Pecq, en région parisienne, son Smart Operation Center, un centre de supervision tel qu’on a l’habitude de voir chez les opérateurs de télécoms. C’est la partie émergée de la stratégie « smart water » du numéro 2 mondial de la gestion de l’eau et de déchets. Philippe Maillard, DG adjoint de Suez Environnement et DG Lyonnaise des eaux décrypte les défis du marché de l’eau : « les enjeux du marché de l’eau varient d’un pays à l’autre. En Europe, les consommateurs sont plus exigeants, plus impliqués, veulent mieux comprendre, mieux savoir ce qui se passe. C’est une demande légitime et qui s’impose aux collectivités et aux opérateurs. En outre, on observe une baisse continue de la consommation de l’eau dans nos pays, de l’ordre de 1% par an en France depuis 15 ans. Ce qui met une pression sur l’économie des services d’eau dont les charges sont essentiellement fixes. Des enjeux qui font que nous devons nous adapter, nous transformer. »
Le choix de Suez Environnement a été de créer une filiale dédiée au développement de ces nouveaux services, pour les opérer. Cette société, Ondeo Systems est une évolution du département d’informatique technique de Suez Environnement. Entre 10 à 15 personnes du service informatique technique ont contribué à la formation de l’entité. Elle compte 140 ingénieurs aujourd’hui.
Autre levier de transformation pour Suez Environnement, les compteurs intelligents. Actuellement, le Français gère un parc de 1,4 million de compteurs intelligents pour plus de 500 collectivités clientes. « Sur la France, le quart des compteurs d’eau que nous gérons sont aujourd’hui télé-relevés et je pense que d’ici 10 à 15 ans, tout le parc français de compteurs sera équipé », estime Philippe Maillard qui ajoute : « Ce que l’on appelle le ‘smartwater’ connait une progression de l’ordre de 10% par an dans les pays où nous sommes présents, essentiellement en Europe, mais l’Asie et les Etats-Unis vont constituer de belles opportunités. »
Une architecture IoT « maison » appuyée sur Oracle MDM
Pour ses compteurs intelligents, Suez Environnement a fait le choix de la technologie de transmission longue portée 169 MHz. Un réseau de 4 000 récepteurs, généralement placés sur des toits d’immeuble, collecte une fois par jour les données des compteurs à leur portée. Ces données sont ensuite injectées dans le réseau d’Ondeo Systems. Farrokh Fotoohi, le Directeur Général de l’entité, livre quelques détails sur cette architecture : « Nous avons commercialisé 2 millions de compteurs avec notre technologie longue-portée basée sur une fréquence européenne libre de droit, la 169 MHz. Actuellement 1,4 million ont été déployés, dont un million en France, 200 000 en Espagne et 200 000 à Malte. Parmi nos clients, Suez Environnement/Lyonnaise des eaux, le groupe Agbar, et d’autres filiales environnement à l’international, mais aussi des collectivités dont la Water Services Corporation de Malte, la ville de Mulhouse, le syndicat intercommunal de distribution d’eau de la région du Mans, ou encore l’aéroport de Toulouse. » Des pilotes sont en cours au Portugal, en Italie, en République tchèque, mais aussi hors d’Europe, avec le Maroc à Casablanca et un pilote en Chine.
« Globalement nous gérons 4 000 récepteurs, dont 3 600 en France », ajoute le responsable. « Tous les jours ils envoient les données, ce qui représente un milliard de données nouvelles chaque mois. Pour la partie gestion de données, nous utilisons le MDM (Master Data Management) d’Oracle. Pour ce qui est des couches de supervision basses, il s’agit de solutions maison mais pour la partie SI, nous avons recours aux outils traditionnels du marché. » Ainsi, les instances Oracle sont surveillées dans le centre de supervision Suez Environnement avec la solution ‘Spotlight on Oracle’ développée par Quest Software et aujourd’hui commercialisée par Dell.
Suez Environnement s’est mué en fournisseur Saas pour les collectivités
Une architecture solide puisqu’elle a été choisie il y a deux ans par Grdf pour développer la télé-relève des 11 millions de compteurs de Gaz connectés – et dont les déploiements sont prévus jusqu’en 2022. Si le directeur général d’Ondeo Systems s’intéresse aux technologies Big Data, selon lui, il n’y a pas urgence d’abandonner l’architecture Oracle mise en place : « Nous sommes encore loin des chiffres annoncés dans les projets Big Data du secteur électrique, par exemple. Les infrastructures mises en place ont bien tenu jusqu’à présent tant en France qu’à l’international. » De même, Suez Environnement préfère disposer de sa propre infrastructure de serveurs infogérés, plutôt que d’aller dans le Cloud, essentiellement pour des raisons d’acceptation par les collectivités, ses clients.
Ondeo Systems s’appuie sur deux entrepôts de données Oracle pour héberger les données avec un portail cartographique et Microsoft Reporting Services, pour exploiter ces données. Pour ses représentations cartographiques, très présentes dans le centre de supervision du Pecq, Ondeo Systems s’appuie sur ses propres développements, menés en C# .NET sur un fond de carte Google. « Développer cette brique en interne est un choix historique », explique Bruno Martin, responsable des développements chez Ondeo Systems. « Nous allons poursuivre dans cette voie, car nous n’avons pas besoin d’un SIG sophistiqué. Nous avons essentiellement besoin de développer une représentation symbolique sur un fond de carte. »
Gérer aussi les mises à jour
Les données collectées sont gérées via Oracle MDM mais Ondeo Systems s’appuie aussi sur le catalogue de solutions Oracle pour gérer ses équipements. C’est la solution Oracle Utilities Operational Device Management (ODM) qui permet à l’entreprise de gérer tous ses récepteurs et tous les dispositifs de transmission chez les particuliers et dans les immeubles. Le logiciel joue le rôle de référentiel pour les équipements, mais il est aussi utilisé pour gérer les interventions de maintenance, les inspections et la gestion des configurations. Prochainement, Ondeo Systems va devoir gérer les mises à jour logicielles à distance des compteurs. En effet, Suez Environnement se prépare à l’arrivée de la 2G, c’est-à-dire des réseaux de compteurs intelligents bi-directionnels, plus intelligents, avec plus de capteurs et bientôt capables de recevoir des données – comme des mises à jour. « L’arrivée de la deuxième génération va nous amener à gérer plus de données. Les émetteurs vont produire 3 à 4 fois plus de données, ils vont par exemple envoyer des données de température que nous n’avions pas jusqu’à présent. Il y aura beaucoup plus de données « métier » sans compter qu’en matière de supervision, nous allons aussi devoir gérer le sens descendant. Néanmoins, nous n’avons pas un besoin immédiat de nous tourner vers Hadoop, même si cela reste un sujet d’études intéressant pour nous. »
Ondeo Systems fonctionne comme un éditeur de logiciel et fait évoluer son offre Saas proposée aux collectivités, tous les six mois. Ses développeurs travaillent aujourd’hui à intégrer la 2G. « Nous auront deux versions majeures en 2015 et en 2016 , souligne Bruno Martin, d’abord pour permettre d’exploiter de manière opérationnelle la 2e génération dans le sens montant et gérer les données issus des nouveaux concentrateurs et émetteurs de deuxième génération, puis nous allons organiser les flux descendants pour permettre la mise à jour des firmwares. Enfin, une dernière version au tout début 2017 permettra d’administrer à distance les émetteurs eux-mêmes. L’impact est conséquent sur notre architecture, mais c’est quelque chose que nous savons gérer », conclut le responsable.