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Une transformation digitale n’est pas qu’un projet IT : les entreprises l’auraient oublié en 2024 ?

Une étude à l’échelle mondiale avance que les entreprises auraient tendance à sous-estimer l’ampleur des projets de transformation, leurs dimensions RH, de changement de culture et de qualité des données. La France se démarquerait sur quelques points.

En 2024, les entreprises ont sous-estimé l’ampleur des chantiers de leurs transformations numériques. C’est la conclusion d’un rapport des sociétés de conseils NTT Data, spécialisée dans les solutions SAP et Natuvion, spécialisée dans la migration de données.

Le rapport est d’autant plus intéressant qu’il a été mené à l’échelle internationale auprès de 1 200 dirigeants dans 15 pays – dont des PDG, des DSI et des IT informatiques.

Des délais et des budgets dépassés

L’étude souligne que seulement 13 % des entreprises auraient réussi à respecter les délais initialement prévus pour leurs projets de transformation. Plus de 70 % des répondants ont signalé un dépassement de 20 % ou plus, et près de la moitié (45 %) ont enregistré un retard d’au moins 30 %.

De même, les budgets sont souvent dépassés. 60 % des entreprises ont déclaré avoir dépensé 20 % de plus que prévu, et 36 % ont dépassé leur budget d’au moins 30 %.

Vers une pénurie de talents IT

Plusieurs facteurs expliqueraient ces difficultés.

Le premier serait un manque d’expertise. « L’étude montre clairement que le manque d’expertise et la pénurie de personnes qualifiées sont les principaux facteurs qui ralentissent la transformation des entreprises », avance Norbert Rotter, PDG de NTT DATA Business Solutions AG.

Les précédents rapports de 2022 et 2023 soulignaient déjà ce point qui, semble-t-il, s’aggrave.

« Selon une étude à long terme menée par Bitkom (l’association professionnelle du secteur numérique allemand), il y aura une pénurie d’environ 663 000 spécialistes IT rien qu’en Allemagne d’ici 2040, soit 510 000 de plus qu’en 2024 », note l’édition de cette année. Plus d’un tiers des entreprises interrogées dans le monde confirment ce constat.

Des projets IT qui impliquent un changement de culture

Le deuxième facteur tient au fait que les entreprises auraient beaucoup trop tendance à minimiser la complexité des projets de transformation. Tant sur le plan technique que sur celui de l’organisation.

La communication interservices serait par conséquent trop souvent négligée, tout comme l’importance d’une analyse approfondie des systèmes et des données.

« Le postulat selon lequel la refonte des méthodes de traitement des données d’une entreprise est un projet purement informatique est faux. C’est ce que démontrent les réponses à une nouvelle question que nous avons introduite : “Quelle partie de votre projet de transformation avez-vous le plus sous-estimée ?” L’aspect le plus sous-estimé est de loin “l’organisation de la communication entre les départements et les divisions” », insiste le rapport. « Avec 45,1 %, les directeurs généraux et exécutifs ont classé ce point loin devant le deuxième aspect “fournir des ressources” (31 %) ».

Ce constat souligne l’importance de la gestion du changement, mais surtout celle de la communication permanente entre les différents départements, ajoute NTT Data.

« Quelle que soit la manière dont on l’envisage, une transformation informatique n’est tout simplement pas un simple projet IT. C’est au contraire une tâche majeure qui implique l’ensemble de l’entreprise », martèle l’étude. Or « la coopération étroite entre les services IT et les autres départements n’est pas toujours une pratique courante ».

Le corollaire est que la transformation digitale implique souvent un changement de culture – ou en tout cas des changements profonds dans l’organisation et le mode de fonctionnement des entreprises. Mais ces changements culturels seraient, là encore, souvent sous-estimés et mal gérés, ce qui entraînerait des résistances et des difficultés d’adoption.

« Les chiffres montrent que la plupart des entreprises s’occupent du développement des compétences, de l’implication de consultants externes et de la réaffectation des ressources avant d’entamer une transformation. Mais ce qui est étonnant, c’est que le sujet de la gestion du changement est à peine mentionné dans le contexte du processus de transformation », constate le rapport. « D’après notre expérience, les grands projets sont pratiquement impossibles à mettre en œuvre sans une bonne gestion du changement. Ceci est principalement dû au fait que les compétences de demain sont de plus en plus requises pour la mise en œuvre des processus de transformation dans les entreprises. »

Mauvaise qualité des données

Le troisième point bloquant serait, sans surprise, la qualité des données.

45 % des répondants ont ainsi indiqué que la vérification et l’amélioration de la qualité de leurs données ont joué un rôle crucial dans leurs processus de transformation.

Les entreprises chercheraient également à réduire leurs volumes de données.

« Les projets de transformation impliquent une analyse approfondie et un inventaire, ainsi qu’un nettoyage complet et une amélioration de leur qualité des données », rappelle le rapport. « Ce thème [des data] est au coude à coude avec l’amélioration de la sécurité des systèmes et des données ».

L’Intelligence artificielle encore peu exploitée

Malgré les promesses de l’IA et le battage médiatique autour de l’IA générative, seulement 25 % des entreprises considéreraient ces technologies comme un moteur principal de leur transformation.

La majorité (53 %) voit l’IA comme un avantage additionnel, quand 21 % ne l’intègrent tout simplement pas dans leur projet.

Cette prudence s’explique peut-être par le fait que les entreprises sont encore en phase d’apprentissage et de découverte des applications concrètes de l’IA dans leurs métiers.

« Une chose est sûre : ceux qui souhaitent tirer pleinement parti de l’IA doivent ancrer cette technologie dans le projet de transformation à un stade très précoce », conseille le rapport. « Ce n’est qu’à cette condition qu’elle pourra être introduite avec succès et utilisée de manière optimale ».

L’approche Selective Data Transition gagne en popularité

L’étude souligne par ailleurs un recours croissant au cloud. 56 % des entreprises auraient ainsi augmenté leur utilisation du IaaS, du PaaS et autres SaaS, pour gagner en flexibilité, accélérer les processus métier et accéder plus facilement aux innovations technologiques.

Dans les projets de migration, l’approche de migration sélective des données (Selective Data Transition) gagnerait en popularité face aux approches Brownfield et Greenfield.

« Les migrations Brownfield pures diminuent (de 5 %), tandis que les migrations hybrides (combinant la migration sélective avec d’autres méthodes) augmentent au même rythme. Il reste à voir si cette tendance se maintiendra » anticipe l’étude. « Au quotidien, cependant, nous rencontrons encore rarement des migrations Greenfield ou Brownfield pures ».

L’exception française ?

La France se distinguerait d’autres pays étudiés sur l’importance accordée à la protection des données – une importance moindre ! – et sur les délais de mise en production.

Sur la protection des données, la France fermerait la marche des pays les moins impliqués avec la Turquie.

Le pays afficherait par ailleurs un taux élevé de reports de mise en production, avec 73 % des entreprises qui ont dû repousser leur go-live (un niveau moyen similaire aux pays d’Europe du Sud, mais très supérieur à la région DACH, à 43 %).

Enfin, la réduction des coûts serait considérée en France comme le principal objectif et succès des projets de transformation, suivie de l’augmentation de la flexibilité. La capacité à innover arrive loin derrière. Comme dans tous les pays du monde (17 %).

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