Les premières cartes mères RISC-V dévoilées à l’Ubuntu Summit
Le fabricant DeepComputing mise sur le processeur Open source pour proposer des alternatives aux portables, tablettes, PC et même serveurs basés sur des puces ARM. Pour l’heure, il s’agit surtout d’une preuve de concept.
Des premières cartes mères équipées de processeurs RISC-V. Telle a été l’une des surprises les plus notables du salon Ubuntu Summit, organisé par l’éditeur Canonical durant le dernier week-end d’octobre, à La Haye, pour rassembler les projets les plus innovants de l’écosystème lié à son Linux.
« Nous fabriquons par exemple des cartes mères à 99 euros qui embarquent un processeur RISC-V à 1,5 GHz avec 4 cœurs 64 bits, équivalent à un ARM Cortex-A53 [qui équipe notamment les Raspberry Pi 3, N.D.R.] et 8 Go de RAM. Pour l’heure, il s’agit surtout de laisser les développeurs jouer avec, pour nous aider à trouver les problèmes matériels ou logiciels qui peuvent subsister et que nous résoudrons dans les plus brefs délais. L’année prochaine, nous présenterons une seconde génération bien plus performante, avec une gravure plus fine et davantage de cœurs », explique Yuning Liang (en photo), le patron de la société DeepComputing, au MagIT.
Perçus comme une alternative Open source – comprendre libre de droits – aux processeurs basse consommation ARM, les processeurs RISC-V portent la double promesse d’être encore plus économes en énergie et de favoriser la construction d’ordinateurs débarrassés de toute technologie américaine propriétaire.
La mise au point du jeu d’instruction RISC-V remonte au début des années 2010, à l’université américaine de Berkeley. Le projet a été officialisé en 2015 avec la création de la fondation RISC-V International qui définit un design standard pouvant être implémenté gratuitement, par quiconque sait dessiner des semiconducteurs. Cette fondation a déménagé en Suisse en 2020, afin de garantir son indépendance de toute stratégie géopolitique américaine. Durant les deux dernières années, une vingtaine d’acteurs des semiconducteurs ont commencé à faire fabriquer des SOCs RISC-V (cœurs + circuits spécialisés) chez divers fondeurs.
Une preuve de concept en attendant une offre concurrentielle en 2027
Les processeurs RISC-V qui équipent les cartes mères montrées par DeepComputing sur son stand sont l’œuvre de l’Américain SiFive qui les aurait fait graver avec une finesse de 20 nm. Deep Computing évoque l’utilisation en 2025 de SOCs conçus par Qualcomm et fabriqués par TSMC avec une finesse de gravure de 7 nm. « En fait, nous n’avons pas de partenariat spécifique. Nous prendrons ce qui sera disponible à ce moment-là », dit Yuning Liang.
Yuning LiangCEO, DeepComputing
Outre la petite carte mère à 99 € destinée aux portables et tablettes, DeepComputing propose aussi un modèle pour serveurs ou station de travail doté d’un processeur RISC-V, intégrant cette fois 64 cœurs à 2 GHz, et de 128 Go de RAM.
En France, l’hébergeur de cloud Scaleway possède lui aussi des cartes mères RISC-V qu’il propose d’utiliser en ligne à des fins de recherche et de développement logiciel, mais pas encore pour exécuter des applications en production.
« Les modèles de cartes mères que nous avons conçus peuvent équiper des ordinateurs portables, des ordinateurs de bureau ou des tablettes. Ils fonctionnent sous une version d’Ubuntu Linux qui a été recompilée pour les processeurs RISC-V. Pour autant, il s’agit d’une preuve de concept. La compatibilité d’Ubuntu n’est (à ce stade) pas exempte de défauts. C’est aussi le but de ce produit : mettre au point un Linux Ubuntu fonctionnel sur RISC-V », assure Yuning Liang.
Selon lui, il serait possible d’avoir d’ici deux à trois ans des machines RISC-V sur le marché comparables aux machines ARM, que ce soit dans les appareils clients, comme dans les objets connectés et comme dans les serveurs.