DBaaS : l’avenir d’Oracle passe aussi par la colocation chez les géants du cloud

Après des partenariats avec Azure et GCP, Oracle annonce Database@AWS, une offre DBaaS s’appuyant sur la colocation de ses infrastructures Exascale/Exadata dans les centres de données de son « vieux rival » AWS. Une stratégie qu’Oracle espère satisfaisante pour ses clients et financièrement fructueuse.

La firme de Larry Ellison, président du conseil d’administration et directeur technique d’Oracle, est en train de généraliser le déploiement d’infrastructure Exadata chez les grands fournisseurs cloud américains.

Après l’annonce d’un partenariat avec Google Cloud en juin, Oracle a présenté lors de CloudWorld 2024 la disponibilité générale d’Oracle Database@Google Cloud dans quatre régions cloud aux États-Unis (US East à Ashburn et US West à Salt Lake City) et en Europe (Germany Central à Francfort et UK South à Londres). Le nom des régions a été choisi par Oracle.

Pour rappel, le principe d’Oracle Database@Google est simple : déployer des baies Exadata dans les data centers de GCP capables d’exécuter Oracle Exadata Database Service, Autonomous Database, Real Application Clusters (RAC), ainsi que des services de restauration Autonomous Recovery Service en sus d’un service de migration « zero dowtime ». Le fournisseur précise par ailleurs que Google Cloud prend désormais en charge le système d’exploitation Oracle Linux. D’ici à un an, Oracle assure qu’il sera possible de provisionner des images Oracle Linux dans les VM Google Compute Engine depuis la console GCP.

Et sans surprise, il est possible d’intégrer les fonctionnalités de recherche vectorielle d’Oracle Database 23ai avec la plateforme Google Vertex AI et les grands modèles de langage Gemini. Évidemment, il s’agit de propulser les applications RAG (Retrieval Augmented Generation).  

Oracle promet que le partenariat sera étendu dans d’autres régions cloud de GCP, en Amérique du Nord, en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique, en Asie Pacifique, et en Amérique latine.

Oracle ne s’oppose plus forcément aux trois géants du cloud

Ce même modèle de partenariat sera répliqué avec AWS. Oracle et AWS ont annoncé un partenariat permettant de déployer Exadata Database Service et Autonomous sur des infrastructures Exadata déployées dans les centres de données AWS. Le service est déjà nommé Oracle Database@AWS. Il pourra être connecté aux instances EC2, Amazon S3, aux services analytiques d’AWS, ainsi qu’aux services de machine learning, dont SageMaker et Amazon Bedrock. Le « go live » est prévu pour le mois de décembre 2024.

« Nos clients auront le choix entre Exadata Database Service et Autonomous Dabatase », déclare Jenny Tsai-Smith, SVP Product Management bases de données chez Oracle. « Pour ceux qui déployaient des bases de données Oracle sur RDS ou directement sur EC2, ils profiteront de l’infrastructure spécifique Exadata et de RAC, ainsi que quelques autres fonctionnalités spécifiques aux services Oracle », ajoute-t-elle.

« Avec Autonomous Database, nous avons verrouillé certaines des choses que les gens ont l’habitude de faire s’ils sont sur site, mais ils renoncent à ce contrôle, tout en bénéficiant de l’automatisation. »
Jenny Tsai-SmithSVP Product Management bases de données, Oracle

La promesse ? Simplifier la migration ou le déploiement de bases de données Oracle 19c, 23c et 23ai sur les clouds choisis par les entreprises pour héberger leurs plateformes applicatives.

« Pour certains de nos clients les plus importants, en particulier s’ils passent d’une solution on prem à une solution cloud, en fonction de la complexité de l’application, il peut être un peu plus facile d’opter pour un service Exadata Database Service parce que les scripts qu’ils ont déjà écrits peuvent fonctionner directement », explique Jenny Tsai-Smith. « Avec Autonomous Database, nous avons verrouillé certaines des choses que les gens ont l’habitude de faire s’ils sont sur site, mais ils renoncent à ce contrôle, tout en bénéficiant de l’automatisation ».

« Nous proposerons les mêmes services que sur OCI et au même prix », ont annoncé de concert Larry Ellison et Matt Garman, CEO d’AWS (à droite sur la photo de une).

« Nos adversaires de longue date sont devenus nos partenaires de choix », avance Safra Catz, CEO d’Oracle, lors du keynote d’ouverture de CloudWorld 2024. Pour rappel, plusieurs années de suite, Andy Jassy, ex-CEO d’AWS et actuel président d’Amazon, et Larry Ellison joutaient à distance lors des conférences annuelles respectives d’AWS et d’Oracle. Mais depuis deux ans, l’acteur historique déploie ses services sur les clouds de ses concurrents.

Avant Google et AWS, Oracle avait démarré avec Microsoft. Après une alliance présentée en 2019, Oracle a lancé la disponibilité générale d’Oracle Database Service for Azure en 2022. Ce service repose sur l’exécution des bases de données Oracle sur Oracle Cloud Infrastructure et une interconnexion avec des instances Azure distantes, réceptacles des applications.

Au mois de décembre 2023, Microsoft a annoncé la disponibilité générale d’Oracle Database@Azure dans une région cloud américaine (US East) et des intégrations avec les services Azure, dont Azure AI. Lors de CloudWorld 2024, Oracle a précisé que Database@Azure est désormais disponible dans six régions cloud : Australia East, Canada Central, East US, France Central, Germany West Central et UK South. Les deux partenaires ont déjà prévu d’étendre ce déploiement dans quinze autres régions cloud.

Par ailleurs, Oracle Database Zero Data Loss Autonomous Recovery Service est « live », tandis que OCI GoldenGate sur Azure sera « prochainement disponible ».

Deux approches coexistantes du multicloud chez Oracle

Que ce soit chez Google Cloud, Azure et bientôt AWS, Oracle Dabase@ est techniquement un service basé sur la colocation. Les infrastructures Exadata installées dans les centres des données des fournisseurs partenaires hébergent les machines virtuelles qui accueillent les instances de bases de données et les services Autonomous. Ces équipements et logiciels sont déployés et maintenus par des équipes techniques d’Oracle.

Les clients passent des contrats avec Oracle, mais peuvent souscrire à une offre à travers la place du marché du fournisseur cloud. C’est le cas chez Azure et GCP. Ils peuvent utiliser leurs crédits issus d’un engagement à long terme avec Azure, GCP et bientôt AWS pour souscrire à un modèle pay as you go. S’ils veulent obtenir un contrat d’une durée d’un ou deux ans à un prix négocié, ils doivent pour l’instant passer par les équipes de vente d’Oracle. Les clients peuvent, par ailleurs, importer leurs licences Oracle Database en mode BYOL.

Le lien avec les services des fournisseurs engagés passe par une connexion VPC permettant d’intégrer les SGBD aux services et applications gérés par GCP, Azure et bientôt AWS. L’équivalent d’Oracle Database for Azure chez GCP se nomme Cross-Cloud Interconnect et offre le même niveau de service que son équivalent sur Azure. Ici, il s’agit de connecter des régions cloud de deux fournisseurs différents.

La même chose sur AWS est possible, selon Larry Ellison, mais un service qu’Oracle Database@AWS propose une intégration plus élégante, considère-t-il.

Les bases de données en cloud, le « troisième pilier » de la croissance d’Oracle

« Nous observons un élan significatif de la part des clients, les entreprises internationales accélérant leurs migrations vers le cloud avec Oracle Database@Azure », avance Karan Batta, vice-président senior d’Oracle Cloud Infrastructure.

« Ce qui est très important, c’est que les bases de données sur site migrent vers le cloud, directement sur OCI ou par le biais de nos services de base de données dans le cloud avec Azure, Google et AWS. »
Safra CatzCEO d’Oracle

« Les revenus liés aux services de nos bases de données en cloud ont augmenté de 23 %, ce qui représente aujourd’hui un chiffre d’affaires annualisé de 2,1 milliards de dollars », confirme Safra Catz, lors de la présentation des résultats du 1er trimestre fiscal 2025. « Ce qui est très important, c’est que les bases de données sur site migrent vers le cloud, directement sur OCI ou par le biais de nos services de base de données dans le cloud avec Azure, Google et AWS », souligne-t-elle. « Nous prévoyons que les revenus des bases de données dans le cloud constitueront collectivement le troisième pilier de la croissance des revenus, à côté d’OCI et de nos solutions SaaS stratégiques ».

Au 1er trimestre fiscal 2025, le chiffre d’affaires des abonnements aux bases de données, qui comprend la gestion des licences, a lui aussi augmenté de 4 % en glissement annuel.

Quant aux revenus non GAAP liés aux offres IaaS et SaaS d’Oracle, ils s’élèvent à 5,7 milliards de dollars, soit 21 % de plus par rapport à la même période l’année dernière. Le chiffre d’affaires SaaS atteint 3,5 milliards de dollars en augmentation de 10 %, et près de 2,2 milliards de dollars sont attribués aux services IaaS, en hausse de 42 %. Au total, Oracle a engrangé 13,2 milliards de dollars au Q1 2025 pour un bénéfice de 2,92 milliards de dollars. Oracle a annoncé 99 milliards de dollars d’obligations de performance restantes, une augmentation de 53 % par rapport au Q1 2024.

Selon Larry Ellison, techniquement, Oracle ne déploie pas des baies X9M ou X10M, mais des régions cloud OCI entières chez ses coopétiteurs.

« Le taux de croissance de nos activités liées aux bases de données augmente grâce à nos accords multicloud avec Microsoft et Google. À la fin du premier trimestre, sept régions Oracle Cloud étaient en service chez Microsoft et 24 autres en cours de construction. Quatre régions Oracle Cloud sont en service chez Google et 14 autres sont en cours de construction », a-t-il expliqué lors de l’annonce des résultats du premier trimestre fiscal 2025. « Le contrat AWS que nous avons récemment signé constitue une étape importante dans l’ère multicloud. Bientôt, les clients pourront utiliser la dernière technologie de base de données Oracle à partir des clouds de tous les hyperscalers ».

Reste désormais à déterminer la taille de ces régions cloud. « Avec Oracle Database@Azure, nous avons commencé en déployant huit à dix racks par région en même temps que notre pipeline de clients se remplissait », indique Jenny Tsai-Smith. La taille des régions dépend donc du nombre de clients.

Si Oracle a évoqué les premiers retours de deux clients, il ne révèle pas le nombre actuel de clients d’Oracle Database@Azure. « Nous avons environ 150 clients qui ont déployé des interconnexions entre OCI et Azure et nous discutons avec des centaines d’autres », assure Jenny Tsai-Smith..

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