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L’IA est devenue un critère de choix pour l’ERP cloud
Les projets d’ERP sont pluriels, tant au niveau du type d’approche (big bang, hybride, progressive) que de leur nature (implémentation, transformation digitale, etc.). Une étude de Panorama Consulting souligne la prévalence du cloud, qui s’explique en grande partie par la popularité croissante de l’intelligence artificielle.
Pour l’USF (l’association des Utilisateurs SAP Francophones), la transition vers le cloud demeure une question d’actualité – et probablement aussi pour les clients des autres éditeurs. Une analyse de Forrester de 2020 mettait en lumière des résistances à cette évolution cloud dans le domaine des ERP, en particulier en France.
Quatre ans plus tard, une partie des obstacles semble avoir été surmontée. C’est ce que suggère en tout cas « The 2024 ERP Report », publié par la société de conseils, Panorama Consulting Group – et portant sur 131 organisations (à 43 % des multinationales) au chiffre d’affaires médian de 200 millions de dollars.
78,6 % de déploiements d’ERP dans le cloud
La part croissante du cloud peut s’expliquer par la politique des fournisseurs eux-mêmes. Ce mode d’hébergement d’un ERP est devenu majoritaire. Dans la précédente édition du rapport, 65 % des entreprises sondées avaient opté pour le cloud. Elles sont désormais 78,6 %, le on-premise ne pesant plus que 21,4 % des choix d’implémentation.
« Avec la popularité croissante de l’intelligence artificielle (IA), les organisations se sont tournées vers des solutions flexibles et adaptables qui soutiennent l’innovation rapide », justifient les auteurs du rapport.
Les solutions cloud présenteraient ainsi l’avantage d’être « facilement extensibles pour répondre aux besoins fluctuants des systèmes d’IA », et en particulier à leurs exigences en matière de puissance de calcul.
Autres arguments avancés en faveur des ERP cloud : l’intégration facilitée des données (dont le stockage est centralisé) et la modernisation & innovation (les plateformes cloud « offrant généralement des fonctionnalités modernes telles que des outils d’IA/ML et des analyses avancées. »)
Pour étayer la corrélation entre ERP cloud et IA, l’étude constate que les personnes interrogées étaient moins susceptibles de choisir la technologie cloud si elles ne prévoyaient pas d’adopter l’IA. Ainsi, 91,6 % des consommateurs de progiciel en mode SaaS prévoient de déployer de l’intelligence artificielle, contre 8,7 % pour les utilisateurs de solutions on-premise.
Le SaaS justifié par le climat économique et les technologies émergentes
Le cloud n’est cependant pas unique. En matière de modèle de déploiement, c’est le SaaS qui s’impose parmi les organisations à 70,9 %, nettement devant les services managés et le hosting d’ERP (29,1 %).
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Cette part du SaaS a fortement progressé puisque dans le rapport 2023, les sociétés étaient 52 % à avoir fait ce choix. Pour les auteurs, trois facteurs principaux expliquent cette tendance : une plus grande attention portée à la rentabilité en raison du climat économique actuel, un besoin accru d’accessibilité et d’ergonomie de l’UX, et enfin et encore l’accent mis sur les technologies émergentes.
« Les technologies émergentes, comme l’IA et l’IoT, deviennent des points centraux pour les entreprises qui cherchent à acquérir un avantage concurrentiel », détaille le rapport concernant ce troisième levier.
La nature des projets ERP évolue aussi. Plutôt que des transformations numériques profondes, en 2024, ces projets sont majoritairement des implémentations (50,4 %). Les consultants expliquent ce changement par l’incertitude économique et les pressions concurrentielles. Elles inciteraient « les organisations à donner la priorité à des améliorations pratiques et immédiates. »
L’ERP comme réponse au déficit de compétences
L’intérêt pour l’implémentation tiendrait également à des déficits de compétences et des pénuries de talents, en particulier dans le domaine de l’IA. « Cela pourrait inciter les organisations à mettre en place des projets bien définis plutôt que des transformations à grande échelle », décrypte le cabinet de conseil.
Ce dernier observe en outre une forte proximité entre déploiement d’ERP et décisionnel, un tel progiciel favorisant l’exploitation des données pour la BI. C’est une confirmation des résultats de l’étude de 2023. L’obtention « d’informations fiables sur les données est devenue une priorité pour les entreprises ».
La combinaison ERP/BI permettrait dès lors d’utiliser la veille stratégique pour prendre des décisions fondées sur des données et d’atteindre des indicateurs de performance clé spécifiques (KPI).
L’IA demeure certes « l’initiative numérique la moins populaire parmi les personnes interrogées », mais son adoption augmente. Sur un an, la part des répondants ayant déployé de l’IA aurait progressé de 10,2 %. ChatGPT participerait à ce mouvement, tirant l’intérêt pour l’IA en général.
Les implémentations hybride et progressive partagent l’affiche
L’adoption de l’IA n’est cependant pas uniquement liée aux décisions en matière d’ERP. Et concernant ces progiciels, des choix stratégiques sont à opérer, à commencer par celui de l’approche. L’étude en recense trois majeures : le big bang (soit la mise en œuvre simultanée et à l’échelle de tous les modules), l’hybride et l’implémentation progressive.
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Aucune de ces approches n’est majoritaire. L’hybride, qui consiste à combiner plusieurs stratégies de déploiement différentes basées sur les besoins uniques d’une organisation, se démarque néanmoins à 36,6 %. Elle devance l’implémentation progressive par module (22,1 %) et le big bang (18,3 %).
Bien que considéré comme risqué, le big bang se classe donc troisième. Ce choix est cependant assez corrélé à la taille de l’entreprise. « Elle est trop risquée pour la plupart des organisations, en particulier celles de taille moyenne ou grande, comme celles qui ont fait l’objet de notre étude », notent les auteurs.
L’hybride, moins risqué d’un point de vue technique, constitue un compromis. Il semble aussi plus adapté aux entreprises caractérisées par une hétérogénéité d’unités opérationnelles. Ainsi, certaines sont en mesure d’affronter un big bang quand d’autres départements « sont trop grands et trop complexes pour cette approche. »
« Ces départements pourraient bénéficier davantage d’une approche progressive. Dans ce cas, les employés passent progressivement au nouveau système en fonction du module, de la localisation ou de la business unit. »
Promesses non atteintes sur la gestion des stocks
Indépendamment de la stratégie de déploiement ou de l’architecture technologique retenue, l’implémentation d’un ERP tient-elle ses promesses ? « Les avantages attendus qui ont été le plus souvent réalisés sont ceux liés à l’expérience du client ». Les progrès sont notables sur un an.
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La tendance est inverse en revanche, en ce qui concerne les avantages escomptés au niveau des stocks. Cela pourrait s’expliquer par des perturbations globales des chaînes logistiques et par une évolution rapide de la demande des consommateurs.
Mais ce que les organisations attendent avant tout de leur ERP, ce sont des gains de productivité et d’efficacité (85,5 %), des bénéfices sur les coûts de maintenance IT (67,2 %) et enfin le maintien de la stabilité opérationnelle et la réduction des frais généraux (57,3 %).
Les entreprises privilégiant cette troisième typologie de bénéfice « donnent la priorité aux investissements dans les technologies qui peuvent rationaliser les opérations IT et réduire les coûts, considérant ces résultats comme un retour sur investissement suffisant. »
Le cloud, facteur de dépassement budgétaire
L’obtention d’un tel ROI passe sans doute déjà par une maîtrise… du budget ERP (d’une valeur médiane de 450 000 dollars). Les dépenses apparaissent en tout cas mieux maîtrisées que par le passé. 55 % des projets menés ont ainsi respecté l’enveloppe initiale.
Pour 27,5 %, le coût a été légèrement supérieur. Et si le cloud progresse en matière d’adoption, il est aussi une des principales raisons qui explique un dépassement budgétaire. Complexité propre au cloud, sous-estimation des besoins de mise en œuvre et avancées technologiques (rapides) sont susceptibles d’expliquer les dépenses supplémentaires.
Ce constat peut probablement justifier en partie les demandes exprimées par l’USF auprès de SAP, afin que l’éditeur éclaire sa feuille de route et lève les ombres qui peuvent les inquiéter, en particulier au sujet de l’avenir du on-premise.