Power BI évolue sous l’influence de Fabric et de Copilot
Depuis l’introduction de Fabric et de Copilot, Microsoft élargit les capacités de Power BI en le rendant, selon ses dires, plus facile d’accès et programmable. Les clients ne semblent pas encore profiter de ses avancées, selon les données de Gartner.
Microsoft n’est pas très « sonore » concernant Power BI. Et pourtant, Satya Nadella, PDG du géant de l’IT, évoquait en avril dernier, lors de la présentation des résultats financiers du troisième trimestre fiscal 2024, que l’outil décisionnel est dans les mains de 350 000 utilisateurs payants.
Bien évidemment, le CEO met en avant Copilot pour Power BI. Pour l’instant, ce Copilot est activé par défaut dans Microsoft Fabric, la plateforme analytique, incluant un lakehouse (OneLake) composé par le géant du cloud pour concurrencer Snowflake, Databricks, AWS (Redshift) et Google Cloud (BigQuery).
Copilot dans Fabric pour Power BI
C’est en mai que Microsoft a annoncé la disponibilité générale de Copilot dans Fabric pour les charges de travail Power BI. Il a ainsi effectué un déploiement progressif de l’outil pour les clients Power Power BI Premium (P1 et plus, qui ne seront plus disponibles à l’achat à partir 1er juillet 2024) et Fabric (F64 ou plus).
La fin de certaines licences Power BI Premium
En réalité, en mars dernier, Microsoft a modifié son modèle de licence. À partir du 1er juillet 2024, les nouveaux clients ne pourront plu se procurer les SKU P, représentant les offres Power BI Premium. Au lieu de ça, ceux-là devront acheter des SKU-F, pour Fabric.
Les clients existants pourront renouveler leur SKU Power BI Premium jusqu’au 1er janvier 2025. Après cela, ils devront basculer sur Fabric. Cela sera également vrai pour les clients ayant un accord d’entreprise (Enterprise Agreement).
« Si l’accord EA existant prend fin après le 1er janvier 2025, ils devront passer à la capacité Fabric une fois l’accord terminé, pour continuer à utiliser Microsoft Fabric », précise Kim Manis, vice-présidente de la gestion de produit Power BI chez Microsoft. Le géant du cloud assure que les plans Fabric offriront le même niveau de fonctionnalités que ceux pour Power BI Premium. « Power BI Pro et Power BI Premium par utilisateur (PPU) ne sont pas concernés par ce retrait ».
En revanche, toutes les fonctionnalités de l’assistant propulsées à l’IA générative ne sont pas en disponibilité générale. Ainsi, il est possible de générer des rapports. L’outil permet « d’identifier les tables, les champs, les mesures et les diagrammes les plus pertinents pour le prompt », indique Kim Manis, vice-présidente de la gestion de produit Power BI chez Microsoft, dans un billet de blog.
En préversion, Copilot pour Fabric peut rédiger et expliquer des requêtes DAX (Data Analysis Expression), le langage pour exprimer des formules dans Power BI et Excel (entre autres), depuis la vue de requêtes DAX.
Depuis le lancement de la préversion de Copilot pour Power BI, Microsoft a fait également en sorte de rendre interrogeables les rapports. Jusqu’au mois de mai, l’assistant ne pouvait produire des réponses qu’à partir des données disponibles dans les visualisations, mais il est désormais possible, en préversion, d’interroger le modèle de données sémantique sous-jacent. Auparavant, ces « modèles sémantiques » se nommaient « Dataset » avant que Microsoft n’en change le nom en novembre dernier.
« À l’ère de Fabric, le terme “dataset” est trop générique et ne rend pas justice à la richesse des fonctionnalités offertes. Le périmètre des rôles, des charges de travail et des services, qui créent des artefacts qui pourraient être étiquetés comme des “jeux de données”, est beaucoup plus large que lorsque le terme a été introduit à l’origine », justifiait Christian Wade, group product manager chez Microsoft.
Ainsi, une ou plusieurs tables extraites d’une source de données tierce (par exemple Snowflake ou Databricks) connectée à Power BI peuvent former un modèle sémantique, mais la réunion de plusieurs fichiers plats (CSV, XLSX), un cube ou des modèles multidimensionnels (plusieurs cubes et plusieurs dimensions) traités via Analysis Services ou Azure Analysis Services porteront le même nom. Les modèles sémantiques volumineux (environ 10 Go chacun) peuvent également être chargés depuis Power BI Desktop au format .pbix.
Ces modèles peuvent être explorés depuis Power BI par l’intermédiaire d’une fenêtre dédiée. C’est d’ailleurs à travers cette interface qu’il est possible d’interroger Copilot. La vue de requêtes DAX est également récente. Celle-ci permet de sélectionner visuellement les composants qui pourront être interrogés lors de l’exécution d’une requête. Un mécanisme de revue des requêtes DAX permet par ailleurs de simplifier leurs corrections. Celui-ci est propulsé par l’outil d’aide à la saisie et à la correction « semi-automatique » IntelliSense, également présent dans Visual Studio Code.
Rendre Power BI programmable
En parlant d’IntelliSense et de Visual Studio Code, Microsoft veut rendre Power BI programmable. Outre l’amélioration de l’intégration avec Git, Azure DevOps et GitHub, le géant de l’IT a présenté en février le Tabular Model Definition Language (TMDL). Ce langage, accessible en préversion et utilisable à travers Visual Studio Code, est une « syntaxe de définition de modèle objet pour des modèles de données tabulaires au niveau de compatibilité 1200 ou supérieur ». Le niveau de compatibilité évoqué indique que cette syntaxe inspirée de YAML fonctionne avec SQL Server 2016. Il est différent de TMSL (Tabular Model Scripting Language) qui sert principalement à créer des scripts de gestion et d’administration des modèles tabulaires.
Surtout, TMDL utilise une structure de dossiers, avec un seul niveau de sous-dossiers par défaut contenant des fichiers .tmdl cultures, perspectives, rôles, dans les tables et des fichiers racines pour les bases de données, les modèles, les relations, les expressions et les sources de données. « Toutes les propriétés de métadonnées internes des tables (Column, Hierarchies, Partitions…) se trouvent dans le fichier TMDL de la table parente », précise Microsoft.
Quand un dossier TMDL représente un modèle sémantique, un fichier PBIR (Power BI ehanced report format, également en préversion) rassemble la définition d’un rapport et ses paramètres principaux, dont le modèle sémantique. Il est stocké dans le dossier de rapport de projet dans Power BI Desktop (le fichier PBIR est différent du fichier PBIB, qui contient un pointeur vers un dossier de rapport ou l’entièreté des métadonnées d’un rapport).
Rui RomanoPrincipal Program Manager, Microsoft
« C’est la première fois que nous rendons public, avec de la documentation, notre format de rapport », indique Rui Romano, principal program manager chez Microsoft, dans une vidéo publiée sur YouTube le 12 juin dernier. « Cela va permettre de contrôler les sources dans une expérience de codéveloppement. Chaque visuel, page, bookmark aura son propre fichier JSON et un schéma JSON qui permettra de comprendre les propriétés et rendre réutilisables certains éléments, dont les matrices de rapports ». Pour les développeurs, cela pourrait faciliter l’édition de rapports en batch afin d’y appliquer la même charte graphique ou les mêmes configurations de visualisation pour des diagrammes similaires.
Pour l’instant, le format PBIR n’est pas compatible avec les fonctions de production de rapports PDF et PPTX ni avec Susbscriptions, Power BI Mobile, et Embedded.
Microsoft entend également simplifier l’expérience d’utilisation pour les nouveaux usagers finaux. C’est pour cela qu’il a refondu les infobulles et intégré cet ajout par défaut en mai et qu’il a revu différents éléments d’interface depuis l’année dernière.
Un renouveau qui doit encore faire ses preuves, selon Gartner
Dans son Magic Quadrant consacré aux plateformes BI et analytiques, publié le 20 juin 2024, Gartner place Microsoft Power BI comme un leader clairement séparé du peloton formé par ses concurrents Qlik, Google, Oracle, Tableau et ThoughSpot. « Au cours des quatre dernières années, Microsoft est devenu le fournisseur dominant sur le marché des plateformes ABI grâce à une combinaison de prix bas, de fonctionnalités complètes et d’intégration avec un écosystème largement déployé qui comprend Microsoft 365, Azure et Dynamics », assurent les analystes. Outre les apports de Copilot, Gartner note que les travaux autour de Fabric et l’intégration avec Power Apps et Power Automate sont des forces.
Pour autant, les analystes signalent que les clients de Power BI « rencontrent des difficultés à gouverner la création et la publication de contenu analytique, une situation susceptible de s’aggraver avec l’arrivée de Copilot ».
GartnerRapport Magic Quadrant 2024 plateformes analytiques et décisionnelles
Et si Microsoft offre plusieurs options pour accomplir des tâches comme la modélisation de données ou la diffusion de rapports, les clients semblent déroutés par cette trop grande quantité de choix. D’autant qu’en raison du « faible coût et de la facilité d’installation, les déploiements de Power BI ont tendance à proliférer ». Et il s’avère « difficile d’appliquer des pratiques de gouvernance standards », constatent les analystes. C’est en train de changer. Microsoft a, tout du moins en matière de confidentialité, introduit des mécanismes pour empêcher l’accès aux données ou aux rapports à des rôles qui n’auraient pas les bons droits.
Enfin, « il y a une demande croissante pour plus d’interopérabilité avec des plateformes concurrentes », souligne Gartner. Microsoft Fabric serait un pas dans la bonne direction, « toutefois, il reste à voir dans quelle mesure OneLake fonctionnera avec d’autres bases de données ».
La remarque des analystes sur Azure comme seule option de déploiement de Power BI revient régulièrement. Or, il y a peu de chances que le fournisseur modifie ses habitudes à ce sujet.