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IBM affine le rôle de Watsonx dans sa stratégie GenAI

Le vétéran de l’IT, dont les racines sont profondément ancrées dans l’IA, fonde sa stratégie consacrée à l’IA générative sur l’open source, le support multimodèle et l’aide aux entreprises pour la modernisation de leur code et de leurs opérations IT.

Alors que ses concurrents technologiques, plus grands et plus jeunes, font la course pour s’égaler et se surpasser dans le domaine de l’IA générative, IBM adopte une approche différente et plus ciblée.

L’entreprise, vieille de 113 ans, se concentre sur les cas d’usage destinés aux entreprises. IBM propose des modèles de langage et des assistants plus petits, personnalisables et open source, conçus pour permettre aux entreprises de moderniser leur base de code et d’automatiser leurs opérations, entre autres choses.

Dès le mois de juin, les modèles pourront être contrôlés par la couche Watsonx.governance, qui sera également disponible sur Amazon SageMaker et peut être utilisée avec des LLM tiers.

Au-delà de sa propre gamme de LLM Granite et de ses d’assistants IA reposant sur la plateforme d’IA générative Watsonx, IBM prend également en charge et fournit des intégrations avec plusieurs collections de LLM et des plateformes d’IA de « frères ennemis », notamment Microsoft, Amazon, Meta et Mistral AI.

IBM a par ailleurs annoncé renforcer ses partenariats avec Salesforce pour intégrer Watsonx et Einstein 1 Studio. Dès le début de l’année 2025, il permettra aux clients communs des deux entreprises de recourir aux modèles disponibles depuis la plateforme d’IBM, dont les modèles Granite – pour infuser la GenAI dans leurs applications CRM. Plus tard cette année, IBM Consulting mettra à disposition des templates de prompt afin d’accélérer les déploiements depuis les outils de Salesforce.

Une approche mi-open source, résolument industrielle

Le géant historique de l’IT semble à la traîne par rapport à des acteurs comme Google, OpenAI et Microsoft. Cela correspond à son image de fournisseur fiable, mais peu passionnant, de logiciels et de matériel pour les grandes entreprises traditionnelles, telles que les banques, les agences gouvernementales et les industriels.

Mais il s’est tout de même lancé dans l’IA générative, en se concentrant exclusivement sur la mise en œuvre d’applications d’entreprise de cette technologie.

« L’IA va être déployée dans toute l’entreprise, débloquant et libérant une quantité massive de productivité », déclare Arvind Krishna, président-directeur général d’IBM, lors de son discours d’ouverture de la conférence IBM Think 2024, le 21 mai. « C’est pourquoi nous avons introduit Watsonx. Il vise vraiment à vous aider à accélérer le déploiement de l’IA. »

Malgré sa longue histoire, parfois mouvementée, avec l’IA, qui remonte aux prémices de cette technologie dans les années 1950, IBM s’est engagée avec prudence dans le monde de la GenAI, qui a explosé à la toute fin du mois de novembre 2022 avec l’introduction de ChatGPT par OpenAI.

« IBM est un peu en retard sur le marché, mais elle s’est penchée sur la question et s’est dit : “laissez les autres jouer à ce jeu, ce n’est pas ce que nous voulons faire”. »
Andy ThuraiAnalyste, Constellation Research

La stratégie d’IA générative que Big Blue poursuit – de concert avec sa filiale open core, Red Hat – est prudente. Elle consiste à convaincre sa large base de clients d’entreprise répartie dans le monde entier, selon Andy Thurai, un analyste de Constellation Research. « Ils sont un peu en retard sur le marché, mais IBM s’est penchée sur la question et s’est dit : “laissez les autres jouer à ce jeu, ce n’est pas ce que nous voulons faire” », considère l’analyste. « Ils ont donc entraîné les modèles Granite ».

IBM fait d’ailleurs preuve d’une plus grande transparence que ses partenaires quant aux méthodes et données utilisées lors de l’entraînement de ces LLM sous licence Apache 2.0 consacrés à la génération de code (quatre paires de modèles de base et « instruits » de 3, 8, 20 et 34 milliards de paramètres).

Avec cette stratégie – similaire à certains égards à ce que fait Meta avec ses modèles ouverts –, IBM laisse les entreprises utiliser gratuitement les modèles Granite « open weight », mais les monétise à travers la plateforme Watsonx.

« Ils ne veulent pas dépendre d’un seul modèle de langage », poursuit M. Thurai. « Au lieu de cela, ils disent : “Je vous donnerai tous les modèles que vous voulez” ».

Précisons que d’autres modèles de la collection Granite, ceux consacrés aux usages conversationnels, à la traduction et au suivi d’instructions (Granite 13b chat, instruct, Granite 20b multilingual et Granite Japanese), sont, eux, propriétaires, mais moins performants que les LLM de Meta, Mistral AI ou Google.

Un fort accent mis sur les assistants de programmation

En attendant, Watsonx Code Assistant for Enterprise Java Applications et Code Assistant for Z d’IBM – qui est utilisé pour accélérer la modernisation des applications mainframe – sont de nouveaux outils bienvenus, selon Marshall Graves, partenaire de Stone Door Group.

Ce cabinet de conseil numérique, basé à Monteagle (Tennessee), est un partenaire d’IBM qui passe des contrats avec des entreprises pour mettre à jour et installer le code et les logiciels IBM. L’entreprise utilise les assistants Watsonx pour accélérer le travail des programmeurs, depuis le lancement de la plateforme en juillet dernier.

« Les assistants de code sont très utiles pour les équipes qui n’ont pas assez de ressources pour évoluer, et améliorer le travail et l’automatisation. »
Marshall GravesPartenaire de Stone Door Group

« Les assistants de code sont très utiles pour les équipes qui n’ont pas assez de ressources pour évoluer, et améliorer le travail et l’automatisation », déclare Marshall Graves, lors d’une interview menée à l’occasion de la conférence. « Ils sont utiles parce que nos clients ont besoin d’étendre leurs projets de développement ».

Stone Door Group prévoit d’utiliser les nouveaux assistants Java et Z, lorsqu’ils entreront en disponibilité générale dans les prochains mois, pour des tâches telles que la réécriture de code COBOL, indique-t-il.

De manière générale, Marshall Graves estime que son entreprise et ses clients ont besoin d’une gouvernance accrue en matière d’intelligence artificielle. « Je pense que l’élément de gouvernance d’IBM est énorme, car les gens ne savent pas vraiment comment faire confiance à l’IA », croit-il. « En tant qu’entreprise, quand vous choisissez une plateforme, vous devez vraiment croire que vous pouvez faire confiance au modèle sous-jacent ».

Lors d’IBM Think, Big Blue a également mis en avant IBM Concert, un système qui relie les outils AIOps de diverses sources sur Watsonx.

Concert utilise l’IA générative pour identifier et résoudre les problèmes dans les systèmes informatiques des entreprises, en utilisant le langage naturel pour faire des recommandations et orchestrer les réponses, et résoudre ou isoler les problèmes tels que les vulnérabilités en matière de sécurité.

« J’aime à considérer IBM Concert… comme le système nerveux de votre pile technologique et de vos opérations », lance Rob Thomas, vice-président senior des logiciels et directeur commercial d’IBM, lors d’une conférence le 21 mai.

Auditabilité de l’IA : le retour de la blockchain par la petite porte

IBM mise beaucoup sur les intégrations et les partenariats dans sa stratégie d’IA générative. Certains d’entre eux concernent des startups avec des cultures nettement différentes de celles de nombreux clients d’IBM.

L’un de ces partenaires est Casper Labs, une startup de 2018 basée à Zug, en Suisse, qui développe un système de gouvernance de l’IA, basé sur la blockchain consacrée à la transparence et l’auditabilité des données d’entraînement de l’IA.

Casper, avec le soutien d’IBM Consulting et des services cloud, construit son nouveau produit, Prove AI, sur la blockchain Casper et l’intègre à Watsonx. governance. Prove AIT devrait être commercialisé d’ici à la fin du mois de juin.

Un client potentiel est Greyscale AI – le premier partenaire de conception de Casper pour Prove AIT. Greyscale est une société d’inspection de la chaîne d’approvisionnement qui utilise l’imagerie à rayons X et des algorithmes d’IA pour aider les fabricants à identifier les erreurs d’emballage ou les matériaux indésirables dans les aliments, les boissons et les médicaments avant leur distribution. Casper vise également à se conformer au nombre croissant de lois et de réglementations en matière d’IA en Europe et dans le monde.

Le PDG et cofondateur de Casper, Mrinal Manohar, est apparu mercredi 22 mai avec des cadres d’IBM spécialisés dans les logiciels et l’IA, sur la scène principale de la conférence Think, pour discuter de la manière de générer de la valeur commerciale avec une IA responsable.

L’une des applications de Prove AI consiste à utiliser le grand livre sécurisé et vérifiable de la blockchain pour documenter les changements itératifs dans le développement de modèles d’IA générative spécifiques, selon Mrinal Manohar. « Le contrôle des versions est malheureusement absent de la pile technologique de bases de l’IA à l’heure actuelle », considère-t-il lors d’un interview. « Mais des contrôles de gouvernance appropriés vous permettent de le faire ».

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