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GenAI et DevOps : GitLab veut convaincre les clients les plus exigeants
Ce mois-ci, GitLab a annoncé la disponibilité générale de Duo Chat, l’occasion de partager ses intentions concernant son assistant d’IA à infuser au cœur du cycle de développement logiciel. L’éditeur a le défi de convaincre des clients plus à cheval sur les notions de confidentialité et de sécurité que ses concurrents.
L’éditeur sait très bien que la filiale de Microsoft a pris le devant de la scène en matière de génération de code et d’assistance par IA aux développeurs. Il compte toutefois prouver qu’il peut faire autant, voire mieux que son compétiteur, sur le théâtre de l’IA générative.
C’est pourquoi il a annoncé la disponibilité générale de GitLab Duo Chat, une interface conversationnelle permettant aux développeurs d’interagir avec de grands modèles de langage sous-jacent en langage naturel. Elle fait partie intégrante de l’offre Duo.
Elle reprend les principales caractéristiques de Duo, son offre consacrée à l’assistance au développement propulsé à l’IA générative. Il s’agit d’en savoir plus sur les fonctionnalités propres à GitLab, d’expliquer du code, de le refactoriser et de générer des tests.
GitLab met l’accent sur Duo Enterprise
Ces fonctionnalités préexistaient à Duo Chat, mais David DeSanto, Chief Product Officer chez GitLab explique au MagIT qu’elles sont également entrées en disponibilité générale en même temps que l’interface utilisateur.
Plus précisément, par défaut, les interactions en langage naturel avec Duo Chat sont propulsées par Claude 2.1, et bientôt Claude 3 d’Anthropic. « Suivant le cas d’usage, si la question est posée par un développeur, elle peut être routée vers un autre modèle afin d’obtenir une réponse plus précise. Cela dépend de la complexité de la question et suivant le niveau de confiance dans la réponse mesurée par nos garde-fous », explique le Chief Product Officer.
Duo est aussi compatible avec la plupart des IDE du marché, à savoir VS Code, ceux de Jetbrains et les IDE Web. L’assistant peut s’intégrer aux versions SaaS, self-managed et dédiées de sa plateforme pour peu que les clients aient souscrits aux offres Premium ou Ultimate. Il est compatible avec douze langages de programmation : C++, C#, Go, Java, JavaScript, Python, PHP, Ruby, Rust, Scala, Kotlin et TypeScript.
L’offre n’était que préalablement disponible pour les clients SaaS de l’éditeur. « Au cours des trois prochains mois, nous nous concentrerons sur la mise à disposition de ces fonctions d’IA à nos clients self-managed », affirme David DeSanto.
Duo est divisé en deux éditions qui incluent toutes deux Duo Chat. Duo Pro est proposé à partir de 19 dollars par mois par utilisateur. Duo Enterprise, à partir de 39 dollars par utilisateur par mois, n’est pas encore disponible, mais doit réunir davantage de fonctionnalités.
David DeSantoChief Product Officer, GitLab
Résumé des discussions, des « issues » et des « epics » (un ensemble d’issues et de features réunis dans un ensemble thématique), des merge requests, des revues de code, mais aussi explication et résolution des vulnérabilités, analyse des causes profondes des problèmes, prévision du temps de développement de features, génération de rapports et mesure de l’impact de l’IA… : voilà les éléments mis en avant par l’éditeur pour mettre la primeur sur l’offre Duo Enterprise. A contrario, Duo Pro se concentre sur la génération et la complétion de code.
« Aujourd’hui, le développement ne représente que 25 % de la livraison de logiciels et le reste du temps, les développeurs font d’autres choses », affirme le CPO. « Si vous accélérez la livraison de code, mais que vous remplissez des “backlogs”, pour le reste, vous générez plus de stress chez les équipes ».
Il s’agit de couvrir tout, sinon une grande partie, du cycle du développement logiciel dans une approche DevSecOps.
« Pour nous, les deux fonctionnalités les plus populaires auprès de nos clients sont l’analyse des causes profondes et la remédiation des vulnérabilités », ajoute-t-il.
Analyses des causes profondes et remédiations des vulnérabilités
Pour rappel, la majorité des clients de l’éditeur s’appuie sur une édition self-managed de GitLab. Or les fonctions d’IA générative suscitent la méfiance de certains d’entre eux, qui réclament des garanties concernant la confidentialité de leurs données.
« Avec la plupart des clients que je rencontre dans le monde, et plus particulièrement en France, la question de la protection de leurs données revient dans toutes les conversations », affirme David DeSanto. « La chose sur laquelle GitLab s’est engagée, et que nous continuons à défendre, c’est que vos données sont vos données. Nous ne les utiliserons pas à des fins d’affinage ou d’entraînement. La seule exception concerne la suggestion d’évaluateurs de code ».
En conséquence, GitLab entend proposer le moyen pour ses clients de déployer les grands modèles de langage dans des régions cloud spécifiques, en commençant par le Royaume-Uni, puis l’Allemagne, « et potentiellement la France » ainsi que d’offrir un support régional.
C’est déjà une option supplémentaire par rapport à ce que propose GitHub, selon James Governor, analyste chez RedMonk auprès de SearchITOperations, une publication sœur du MagIT.
« L’une des raisons pour lesquelles GitLab a décollé [à l’origine] est qu’il vendait directement aux entreprises qui, dans de nombreux cas, voulaient faire les choses sur site, étaient préoccupées par la résidence des données et d’autres choses de ce genre », signale-t-il. « L’éditeur a dû transposer une partie de cette réflexion à leurs outils d’IA. Copilot est un excellent outil, mais certains clients veulent que les choses soient un peu plus verrouillées à l’heure actuelle ».
L’éditeur a prévu également un moyen de désactiver Duo et Duo Chat, pour les projets les plus critiques, qui implique un plein contrôle par les équipes de développement. « Notre objectif est de continuer à ajouter des contrôles qui permettent aux clients de s’approprier leurs exigences en matière de confidentialité sans qu’ils aient à se préoccuper de tous les aspects », affirme David DeSanto.
GitLab le sait, l’offre d’hébergement régionale ne satisfera pas ses clients les plus exigeants en matière de sécurité.
En ce sens, il prévoit d’inclure dans cette même offre le moyen pour ses clients d’héberger par eux-mêmes certains modèles de langage et de deep learning et de les personnaliser.
« Dans plusieurs mois, nous allons offrir la possibilité d’auto-héberger des modèles. Il s’agira de modèles fournis par GitLab, dont nous savons qu’ils fonctionnent avec Duo, et nous vous les donnerons dans un conteneur que vous exécuterez dans votre propre environnement et que vous hébergerez vous-même », annonce David DeSanto.
Pour l’heure, GitLab n’imagine pas reproduire ce que propose Jetbrains, c’est-à-dire permettre aux développeurs de déployer des modèles localement, sur leur ordinateur.
« Nous n’avons pas envisagé de mettre les modèles sur l’ordinateur du développeur en raison de la complexité des modèles que nous utilisons. Nous ne voulons pas non plus dégrader les performances et la vitesse de réponse », avance le Chief Product Officer.
Assistant pour développeurs : des débuts prometteurs… à confirmer
La plupart des entreprises qui déploient ces outils d’assistance à la programmation en testent plusieurs, suivant les environnements cibles, les préférences des équipes, les contraintes techniques et de sécurité. C’est le cas par exemple de Sopra Steria.
De fait, en sus de GitLab Duo, de GitHub Copilot et d’AI Asssistant de Jetbrains, l’on trouve également sur le marché Amazon CodeWhisperer, Gemini Code Assist de Google Cloud, Oracle prépare également son propre assistant, sans compter les myriades de solutions greffées aux outils annexes à la chaîne de développement logiciel.
David DeSanto en est parfaitement conscient.
« Contrairement au sujet autour de la sécurité de la chaîne de développement logicielle et la planification Agile [les deux points d’investissements majeurs pour GitLab, N.D.L.R.], le sujet de l’IA est nouveau », reconnaît-il. « Nous constatons que les clients veulent mener des projets pilotes à long terme pour mieux comprendre. Ils vont donc acheter une quantité limitée de licences, quelques centaines peut-être dans les grandes organisations, et nous étendrons la chose petit à petit ».
Reste à savoir si ces tests sont concluants en matière de coût et de gain de productivité. Ce sera déterminant pour toutes les offres qui émergent.
Dans un même temps, les clients sont davantage concentrés sur la rationalisation de leurs chaînes de développement logicielles – pour des raisons de coûts et d’agilité – et seraient attentifs aux arguments de GitLab concernant sa plateforme DevOps capable de réunir la plupart des fonctionnalités qui nécessitent autrement d’intégrer de multiples outils.